Chapitre 22

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Lorsque j'ouvris les yeux, tout était blanc. J'étais dans un espace de vide infini entre deux mondes. Bientôt, je le savais, des voix et des mains invisibles allaient m'attirer et m'épuiser pour capturer mon âme, je m'y préparais. Elles arrivèrent, mais moins violemment que lors de mon premier voyage, comme si elles sentaient ma volonté infaillible. Toutefois, je dus lutter pour m'échapper et garder le contrôle sur mon esprit. Le voyage ne dura qu'une paire de secondes alors qu'il m'avait semblé terriblement long la dernière fois. Puis la gravité se fit plus forte et en un clignement de paupières, j'étais sur Terre.

Il pleuvait, l'air était chargé de pollution, l'autoroute au loin était bruyante. Bienvenue à Paris, au Parc d'exposition où nous avions récupéré le cristal, presque un an auparavant et pourtant, on aurait dit que c'était hier. L'exposition de Phinéas Gage était toujours là, mais fermée. Je fis le tour sur moi-même, il devait être midi, même si je ne voyais pas le soleil derrière les nuages, je sentais les odeurs grasses des fast-food environnants. Je devais me presser, la règle n'avait pas changé : le temps passait beaucoup plus vite à Eldarya qu'ici, je ne devais pas perdre une minute de plus. Immédiatement, j'appelais à moi le maana et me concentrai pour visualiser dans mon esprit la façade de la maison de retraite de ma grand-mère. La seconde d'après, je me retrouvais devant celle-ci à plus de 250 kilomètres au nord. Il n'y avait personne autour de moi, personne surpris de me voir surgir de nulle part à la Joséphine Ange-gardien. Je redécouvris d'anciennes sensations : l'odeur de la soupe qui émanait des cuisines, les fausses fleurs sur les châssis de fenêtres, toujours ce petit vieux assis à l'entrée. Je saluai la secrétaire, comme si je revoyais une vieille amie. Mon attitude devait lui semblait étrange, si elle savait... Je pris les escaliers, puis à droite dans le couloir principal et j'atteignis la chambre 101. Avant de poser ma main sur la poignée, j'hésitai. Avais-je pris la bonne décision ? Comme d'habitude, c'était une envie irréfléchie, mais au fond qu'attendais-je de ce voyage ? J'ouvris la porte et vis ma grand-mère assise à sa place. Elle tourna la tête vers moi et me souris tendrement. Cette simple expression était ce dont j'avais besoin, j'avais fait le bon choix en venant. Ma grand-mère m'avait tellement manqué. Je m'approchais un peu soudainement et l'enlaçais très fort dans mes bras.

- Oh Grand-mère, je suis tellement contente de te voir !

- Ohohoh, Myriam, doucement ! Moi aussi je suis contente de te voir ma chérie.

Elle me prenait pour ma mère, mais peu importe, c'était toujours mieux qu'une inconnue. Je reculais une seconde, le temps de me débarrasser de ma sacoche et de la poser sur le lit où une veste en cuir et un sac à main trainaient déjà.

- Alors, tu restes combien de temps cette fois-ci ? Tu sais que Nalah grandit bien, tu devrais peut-être rester un peu, pour elle.

Ma grand-mère faisait référence aux multiples voyages professionnels de ma mère. Je me souviens qu'elle avait pour habitude de ne pas rester plus de deux jours avant d'enchaîner pour sa boîte de circuit touristique.

- Tu as raison, je ne reste pas longtemps, mais je devais absolument venir te voir.

- Ah bon ? Pourquoi ça ?

- Je ne sais plus quoi faire, je ne sais plus où est ma place... Soupirai-je.

- Mais là-bas enfin ! Tu es destinée à de grandes choses ! La peur ne doit pas te freiner, mais elle doit te guider à prendre les meilleurs choix pour toi et les villageois.

Je fronçais les sourcils en tentant de comprendre ce que son cerveau malade voulait bien dire.

- Mais grand-mère, de quoi tu parles ?

[Eldarya][Valkyon][Terminée] La ProphétieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant