VIII - L'abri

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VIII

Je suis encore là. Moi et mon petit cœur avons parcouru du chemin aujourd'hui. J'ai vu des fantômes, j'ai vu des esprits, des âmes perdues et pourtant, je suis toujours là avec le cœur rempli d'amour et l'envie débordante d'aimer. Ça sera toujours ça de gagné, mon cœur reste flamboyant même si les fantômes l'affaiblissent par leur passage et que les spectres qui hantent mes nuits ont décidé de s'attaquer à mon cerveau. Je suis toujours là, et je me réfugie dans cet abri fait de mots et de signes. Des lettres, des mots, qui construisent des phrases, des paragraphes, des idées, des sentiments. J'y exprime ce que je veux, l'amour, la haine, la colère, le désespoir, ici c'est moi qui choisit l'écho.

Je me réfugie et tente de soigner mon ami blessé. La guerre n'est pas facile tous les jours et des dommages collatéraux sont vite arrivés. Le brouillard et la pénombre règnent au dehors, mais moi dans mon petit abri, je tente de récupérer des forces, de me reposer car je sais que demain, une autre bataille débutera. Alors j'oublie tout, tout le monde, les S.O.S ne m'affectent plus et je reste seul. J'entends les explosions, le bruit des obus qui fusent dans l'air lourd, j'entends les hurlements des hommes et des femmes au combat, j'entends ces râles, ces cris, ces pleurs, ces indignations, je sens l'odeur de la mort, de la chair brûlée et du sang. Je vois des cœurs qui saignent et des torrents de larme, un ciel rouge et noir, de feu et de ténèbres et la bataille fait toujours rage. Mon petit abri tient le coup malgré les coups qui fusent, je ne sais pas s'il va tenir des années, mais je sais qu'il tiendra aussi longtemps qu'il pourra.

Tous les soirs depuis quelques mois, je m'y réfugie et j'écris ces mots, ceux qui changeront peut-être mon lendemain, ceux qui feront peut-être de mon esprit torturé un esprit apaisé, ici je sens, j'entends, je ressens. Quelque part, construire cet abri guéri et protège mon ami blessé et je me sens un peu mieux. Du baume au cœur, un sparadrap et me voilà bientôt reparti. Cependant, si je construis cet abri, si j'écris ces mots, c'est aussi pour toi, qui les lis, car je sais qu'au fond de toi tu as aussi quelque chose de blessé, tu as sûrement vécu des choses pas drôles, tu as sûrement des complexes et tu es sûrement mal dans ta peau. Peut-être que si mon abri me va comme un gant, tu pourras aussi trouver chaussure à ton pied.

ContrastesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant