Chapitre 36: Résignation

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— Charlotte, qu'est-ce que tu fais ? paniquai-je.

— Je t'empêche d'intervenir, rétorqua-t-elle.

Elle recentra son attention sur le policier, semblant s'être déjà désintéressée de moi. Ses cheveux châtains étaient rassemblés en une queue de cheval haute, un flingue reposait devant elle. Elle affichait un air déterminé. Elle avait d'ailleurs sûrement planifié ce moment minutieusement, se débrouillant pour que sa cible soit seule et éloignée de la ville lorsque la Figeation aurait lieu. Ainsi, elle aurait tout le temps du monde pour se préparer à le tuer.

—Tu n'as pas à faire ça... tentai-je de la dissuader.

—Je n'ai pas besoin que tu me fasses la morale, Samuel.

— Ecoute, je sais que tu le hais. Je le déteste aussi mais...

Son rire m'interrompit. Elle secoua la tête.

—Tu ne peux pas savoir à quel point je le hais. Tu ne sais pas ce qu'il m'a fait.

Je marquai une pause pour me remémorer ma première rencontre avec le policier.

Il ne m'avait presque pas prêté d'attention, uniquement focalisé sur Charlotte. Ils se connaissaient bien avant mon arrivé. Que s'était-il passé entre eux ?

Lorsque j'interrogeais Charlotte, elle se contenta de grincer des dents, le regard rivé au loin. Ses doigts jouaient avec le manche du révolver, impatients d'enfin appuyer sur la gâchette.

De mon côté, j'essayais de bouger mes jambes, mais elles ne m'obéissaient plus, comme coulées dans du béton. Un profond sentiment d'impuissance commença à s'emparer de moi. Cet homme avait beau avoir essayé de me descendre dans une rue déserte, ce n'était pas une raison suffisante pour lui rendre la pareille.

Je ne pouvais pas m'empêcher de penser à ceux qui seraient blessés derrière, tout comme j'avais été dévasté par la mort de mon père. Peut-être que pour certaines personnes il était un monstre qui méritait de mourir, mais nous ne méritions pas cette souffrance qui a détruit ma famille.

—Tu vaux mieux que ça, Charlotte.

Elle se mit debout d'un bond et s'approcha de moi.

— Et comment est-ce que tu pourrais le savoir ? Qu'est-ce que tu connais de moi au final ? De mon passé ?

Je ne répondis pas.

Elle releva ses manches et leva les bras de sortes à ce que ses tatouages soient bien visibles.

—Ces noms, je ne les ai pas écrits pour rien. Derrière chacun d'entre eux se trouve une histoire tragique. Une personne qui mérite d'être vengée.

—Tu penses réellement que ces personnes aimeraient te voir passer tes jours à piéger et tuer des humains ?

—Oui.

Je fermai les yeux et soupirai.

—Tu te rends compte que tu es en train de gâcher ta vie pour des gens morts, ou bien tu es trop aveuglée par ta vengeance pour cela ?

Elle détourna le regard.

—Tu ne comprends pas, lâcha-t-elle.

Elle baissa la tête et admira l'arme qu'elle tenait dans ses mains. Son pouce caressa la crosse, un geste qui me parut presque mélancolique.

—Tu as raison, concédai-je. Je ne te connais pas. On s'est rencontré il y a seulement quelques semaines, et durant cette période, tu m'as renvoyé l'image de quelqu'un d'assez froid et insensible. Mais n'essaie pas de me faire croire que tu n'as aucun problème avec tuer de sang-froid. Tu ne fais pas ça pour le plaisir, tu fais ça parce que tu penses que tu es obligée.

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