Chapitre 6: L'Association

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   La nuit était calme, trop calme. En sortant de l'hôtel abandonné, j'avais découvert une ville fantôme. L'atmosphère était pesante, sombre, morbide... Les grandes rues étaient désertes, de même que les grandes bâtisses. Il n'y avait pas âme qui vive dans les parages. C'était étrange, tout était silencieux, pour une fois. On pouvait seulement entendre que les semelles de nos chaussures claquer sur le sol. Le goudron était craquelé, des arbres et des branches jonchaient le sol, l'herbe avait poussée.

— Où sommes-nous ? demandai-je, étonné.

   Depuis que mon don s'était déclenché, je n'avais jamais ressenti un si grand calme. La lune était immense, ronde, lumineuse, il n'y avait aucun nuage pour la cacher. Sur la route, quelques rayons se reflétaient et les morceaux de verre éparpillés un peu partout brillaient sous le ciel sombre.

— Tu as entendu parler des Grandes Révoltes ? m'interrogea-t-elle

— Celles après la loi sur l'exécution des élémentaires de l'esprit ?

— Oui. (Elle marqua une pause avant de reprendre) Une de ses révoltes a eu lieu ici, il y a eu un grand massacre, c'est pour ça qu'il n'y a plus personne. Les survivants sont tous partis dès qu'ils l'ont pu.

   J'acquiesçai d'un hochement de tête. Le silence dura plusieurs minutes, c'est appréciable, reposant. Je n'avais déjà pas beaucoup dormi la nuit dernière et je venais de manquer une seconde nuit. La fatigue commençait à se faire ressentir, je devais avoir des cernes abominables.

   On quitta finalement la ville fantôme. On monta une petite pente terreuse, la fille s'accrocha à une vieille rambarde et passa par-dessus, je fis de même. Un pont à moitié détruit se dressait devant nous, un énorme tronc d'arbre le coupait en deux. Elle l'enjamba, je l'imitai et la rattrapai.

— Comment tu t'appelles ?

   Elle tourna enfin la tête vers moi, sans arrêter de marcher.

— Je ne peux pas te dire mon prénom avant que tu ne rejoignes l'Association, m'informa-t-elle.

— Ça fait longtemps que tu y es toi ?

— Pourquoi ?

— Tu as l'air assez jeune donc... je me posais juste la question.

   Elle esquissa un faible sourire, presque imperceptible.

— Je suis plus âgée que toi.

— J'ai seize ans.

— Je sais.

   Elle n'ajouta rien. Je détaillai une nouvelle fois son visage alors qu'elle reportait son attention sur le chemin. Quel âge avait-elle ? Dix-huit ans ? Dix-neuf ? Dans tous les cas, elle restait jeune, même si son esprit semblait, pour le coup, bien plus ancien.

— Tu n'as pas non plus le droit de me dire ton âge, c'est ça ?

— Tu comprends vite, répliqua-t-elle avec un rire nerveux.

   Je détournai à mon tour le regard pour observer l'horizon. Je ne voyais même pas ma ville d'ici, pourquoi m'avait-il amené si loin pour m'en dire si peu ?

— Comment voulez-vous que je prenne une décision si je ne sais rien de votre Association ?

— Qu'est-ce que tu veux savoir de plus ?

— On m'a dit que je n'étais pas obligé de tuer, je ferais quoi dans ce cas ?

   Elle haussa nonchalamment les épaules.

— Je ne sais pas, tout dépend de ton élément. Il y a plein de postes différents.

   En entendant cette phrase, je me détendis un peu. Elle n'avait pas l'air de savoir en quoi consistait mon don et je préférais que les choses restent ainsi. Moins de gens étaient au courant, mieux c'était. Je ne voulais pas qu'elle l'apprenne, mais j'avais peu d'espoir que la femme qui m'avait interrogé garde le silence. Je ne pus pas m'empêcher de lui poser une question :

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