Chapitre 9: Enlèvement

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   « Le sage et le lâche ont en commun l'art de la fuite. Bien prétentieux celui qui se permettrait de les juger » (Pierre Bottero)

   Yoann et moi étions debout, derrière une grande haie à l'arrière de la maison. A l'intérieur de celle-ci se trouvait le policier, seul. Charlotte ainsi que l'autre élémentaire n'étaient pas encore entrés, ils attendaient patiemment le bon moment. Mon job était d'empêcher que les ondes dépassent le jardin. L'homme allait sûrement crier et cela alerterait les voisins et les passants. Le poste de police était bien trop près pour qu'on puisse se permettre d'être bruyant.

— Tu as déjà entendu parler de l'isolation acoustique ? me questionna Yoann.

   J'hochai affirmativement la tête. Cette technique permettait d'insonoriser une pièce ou un endroit, de telle sorte à ce que le son ne puisse pas en sortir.

— Eh bien, c'est un peu ce que tu dois faire. Tu dois créer une sorte de sphère acoustique, sauf qu'en plus de retenir le son, elle doit empêcher toutes les autres ondes de passer.

— D'accord... et comment je fais ça ?

— D'habitude tu ne fais que ressentir les vibrations, n'est-ce pas ?

   J'acquiesçai une nouvelle fois.

— Cette fois, tu ne dois pas les laisser te traverser. Tu dois les bloquer.

   Je fronçai les sourcils. Ça ne m'indiquait pas exactement comment je devais m'y prendre, mais je me doutais qu'expliquer ce genre de chose ne devait pas être facile. Moi-même j'avais dû mal.

— Tu vas te mettre quelques mètres devant moi, continua-t-il. Comme ça, si certaines ondes arrivent à passer, je serais là pour les retenir. Ça fera comme une double barrière, si tu veux.

   Ça me rassurait de savoir que, si je ne réussissais pas, je ne ferais pas tout foirer. Yoann recula de quelques pas, me laissant le champ libre. Je relâchai tout l'air que j'avais aspiré et fermai les yeux pour me couper du monde. Le premier bruit que j'entendis fut le cliquetis de la porte. Ils venaient de pénétrer dans la maison. Pendant quelques instants, le silence se fit. J'essayai tant bien que mal de stabiliser les battements de mon cœur, il ne fallait pas que je pense à ce que j'étais réellement en train de faire.

Participer à un kidnapping.

   Non, je devais me concentrer sur les vibrations et uniquement sur elles. Un fracas assourdissant retentit. Je sentis les ondes sonores me traverser à toute vitesse sans que je ne puisse rien y faire. Sans que je m'y attende, elles me passèrent une nouvelle fois à travers, mais de l'autre sens cette fois. Elles se réfléchissaient sur la sphère de Yoann et repartaient dans toutes les directions. Les cris et les bruits se mélangèrent dans ma tête, je n'arrivais plus à les distinguer les uns des autres, tout se reflétait, je perdais le fil et le boucan commençait à devenir insupportable.

   Si je restais concentré sur les vibrations, elles allaient me rendre fous, il fallait que je m'en détache immédiatement. Je rouvris les yeux et reculai précipitamment pour sortir de la sphère. Yoann ne me jeta pas un regard. Je passai ma main sur mon visage et appuyai mes coudes sur mes genoux en respirant bruyamment. Peu à peu, le calme revînt.

   Je restai immobile un moment, puis Yoann s'approcha de moi. J'en déduis que le policier était inconscient.

— Tout va bien ? demanda-t-il.

   Sa réaction me surprit, je m'attendais à ce qu'il me hurle dessus pour avoir abandonné mon poste. La première fois que je l'ai vu, il m'avait vraiment fait peur. J'avais cru, pendant un instant, qu'il allait me tuer sans la moindre pitié. Mais il peut-être n'était-il pas aussi cruel au final.

— Oui, ça va. Désolé d'être parti.

   Il me tapota gentiment l'épaule d'un geste qui se voulait rassurant.

— Ne t'inquiète pas. Ça m'aurait étonné que tu réussisses du premier coup, surtout à ton âge. Tu as quoi, seize ans ? Dix-sept ans ?

— J'ai seize ans.

   Il esquissa un sourire.

— J'en avais vingt-deux la première fois que j'ai réussi à créer une sphère acoustique. Tu as encore de la marge.

   Je me redressai et fixai la maison du policier. Avait-il une famille ? Probablement, vivre seul dans une maison de cette taille serait étrange. Je me demandais comment allait réagir celle-ci en apprenant qu'il avait disparu. Est-ce que l'Association le libérerait une fois qu'elle aura les informations qu'elle cherchait ? Ou alors est-ce qu'elle le tuerait ? Je ne savais pas, mais je penchais plus pour la seconde hypothèse.

— On fait quoi maintenant ? demandai-je à Yoann en me tournant vers lui.

   Il haussa les épaules.

— Tu es libre de faire ce que tu veux. Moi je vais rentrer à la base. Tu peux...

   Un coup de feu retentit, le stoppant net. Nous nous tournèrent en même temps vers l'origine du bruit.

— Qu'est-ce qui se passe ? m'inquiétai-je.

   Je ne connaissais pas le plan exact, mais il ne me semblait pas qu'il y ait une quelconque arme à feu à dedans. Surtout que la sphère n'était plus là, tous les voisins avaient dû entendre la détonation. C'était mauvais. Très mauvais.

— On a des invités surprises, maugréa-t-il à voix basse.

   Deux nouveaux coups de feu se firent entendre, suivi de plusieurs éclats de voix. Sans hésiter, Yoann courut en direction de la maison. Je restai sur place une demi-seconde, puis je lui emboitai le pas en jurant intérieurement. Pourquoi est-ce qu'il fallait qu'il y ait des problèmes le jour de ma toute première mission ?

   J'avançai lentement, en jetant frénétiquement des regards autour, je tentai de ne pas me prendre une balle. La vitre de la baie vitrée éclata juste devant moi. Je sursautai et me levai les bras pour me protéger le visage. Quelques éclats de verre se fichèrent dans ma peau, mais je n'y fis pas attention. Je me collai au mur pour me mettre à l'abri.

— Alice ! Non ! s'égosilla une voix masculine.

Nouvelle détonation.

   De là où j'étais, j'entendis un bruit mat, comme un corps qui heurte le parquet. Effrayé, je jetai un coup d'œil à l'intérieur de la maison. Les trois élémentaires se tenaient au milieu du salon. Celui qui était dans le même lycée que moi pointait encore son flingue en direction de la jeune femme allongée au sol, sa chemise blanche était imbibée de sang, de même que son manteau crème. Ses yeux, toujours ouvert, était vitreux, sa poitrine ne se soulevait pas, elle ne bougeait plus. J'eus le haut-le-cœur en voyant ça.

   Près d'elle, un homme était adossé au mur, inconscient. Charlotte était agenouillée auprès de lui et vérifiait qu'il n'était pas blessé. C'était lui, la cible d'origine.

   Je levai la tête et aperçut Yoann qui tenait fermement les bras d'un autre policier. Celui-là cessa de se débattre et fixa la jeune femme à terre, la douleur se lisait sur son visage. Il avait un hématome sous son œil, le souffle court et du sang coulait sur son visage. Ses jambes cédèrent soudainement, mais Yoann le retint avant qu'il ne touche le sol. Des larmes roulèrent silencieusement le long de ses joues.

   Ce n'est qu'à ce moment-là que je le reconnus.

   C'était le frère d'Eliott.

Merci d'avoir lu !

Je suis désolée de ne pas avoir publié le week-end dernier mais j'étais vraiment débordée. Mais bon, maintenant je suis en vacances :)

Ce chapitre est assez court mais je trouvais ça mieux de le couper ici. Vous aurez la suite demain ou après demain de toute façon donc ce n'est pas trop sadique de ma part ^^

J'espère que ça vous a plu ! Si c'est le cas, n'hésitez pas à me laisser un petit message pour me le dire, ça fait toujours plaisir de voir que vous appréciez l'histoire ;) Un grand merci à tous ceux qui prennent du temps pour le faire <3

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