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Le reste de l'après-midi se passa tranquillement, une fois habillée, elle fuma une cigarette à la fenêtre, ensuite ma mère revint de Carrefour, chargée comme une mule, comme toujours, je lui présentais ma nouvelle amie. Élisa nous regardait ranger les courses, un sourire sur le visage. Nous discutâmes toutes les deux puis en fin d'après-midi, je la raccompagnais à l'arrêt du bus, sur la grande place. Elle m'offrit encore une fois une de ses cigarettes, et cette fois, j'acceptai. La mousse du filtre, entre mes lèvres n'avait aucun goût, elle porta la flamme de son briquet sur le bout de la cigarette, côté tabac en me disant « pompe ».J'aspirai donc la fumée, la recrachant immédiatement, ma bouche se remplit d'un goût acre, désagréable qui me rappelait la fois où j'avais accidentellement respiré la poussière d'un bac de barbecue.


« T'as jamais fumé, me dit Élisa, ça se voit. Regarde, tu tires sur la clope et tu inspires, comme si tu viens de te faire chopper. Han ! V'là maman ! »


Elle venait de dire la dernière phrase en inspirant profondément, pensant naïvement que j'allais m'en sortir comme une pro. Mais une douleur horrible envahit ma gorge et mon torse, ma trachée piquait et je me mis à tousser violemment, la fumée s'échappant comme elle le pouvait par mon nez qui se mit à piquer lui aussi. Un milliard de petites aiguilles me torturaient le système respiratoire, le goût de tabac était affectueux, je commençais aussi à avoir mal à la tête.


« Reprends-en une, ça ira mieux cette fois, promis. »


J'obéis une nouvelle fois, en effet les piqûres furent moins douloureuses, je toussais moins, le goût n'était toujours pas terrible mais je commençais à m'y faire. Elle jeta son mégot sur la route, je regardais où j'en étais, vis une longue cendre grise sur ma cigarette, je la secouai, ce qui fit rire une nouvelle fois ma petite amie. Je tirai encore quelques bouffées difficilement, puis l'envoyai aussi sur le bitume de la chaussée. Elle me prit la main et me tira vers elle, je posai la tête sur son épaule, son bras libre m'entoura la taille, je me sentais bien, le mal de crâne me donnait une sensation d'euphorie, comme ci j'étais dans un rêve, les gens nous regardaient, j'étais dans le fond un peu mal à l'aise mais je ne disais rien, Élisa se foutait du regard des autres, et je commençais à trouver cette philosophie pas mal. Elle regarda sa montre, il était l'heure, le bus n'allait pas tarder à arriver, d'ailleurs nous n'étions plus seule sous le petit arrêt vert foncé, simple abri pour la pluie, dépourvu de banc ou de tout autre accessoire hors mis le tableau des horaires, protégé par une plaque de plexiglas toute gravée. Elle se recula d'un pas, j'eus soudain une boule au ventre, je ne voulais pas qu'elle s'en aille maintenant, elle me regarda fixement quelques secondes puis ses lèvres se posèrent sur les miennes, là devant une demi-douzaine de personnes qui nous regardaient, j'aurai voulu disparaître, au lieu de ça, la langue d'Élisa prit place dans ma bouche et nous échangeâmes un dernier baiser passionné avant qu'elle ne reparte chez elle.


« Tiens, dit-elle en me tendant une cigarette. Tu penseras à moi demain.

-On texte ce soir bébé ? »


Je me sentis rougir une nouvelle fois, pour avoir appelé Élisa ainsi devant tous ces inconnus, mais après tout, n'étions nous pas un couple ? Le bus orange arriva au loin, elle me saisit par la taille.


« T'as plutôt intérêt princesse, sinon gare à toi. Je suis pas jalouse, tu m'appartient pas mais tu es avec moi, et qu'avec moi seulement. »

Lesbienne et Heureuse: Estelle (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant