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Le vendredi soir, j'achetais toujours un bout de shit, ou un peu d'herbe pour passer le week-end, Jess et moi. Ma mère sachant ce qu'on allait faire, « pour ne rien avoir à faire avec la police au cas où » ne nous demandait jamais d'explications. Nous profitions donc de ce temps libre pour traîner dans la cité ou dans le petit parc, un peu plus loin, fumer un joint ou deux, et surtout nous retrouvions quelques instants la complicité qui nous unissait. En pensant à tout cela dans la soirée, j'avais jusqu'à vendredi pour tout organiser. Je voulais faire ça à l'ancienne, mais aussi à la façon bien particulière qu'on avait de nous aimer. J'allais voir mon ami Luc le jeudi dans la soirée, prétextant une course à faire pour ma mère alors que ma petite amie faisait ses devoirs, qui, à contrecœur elle laissa passer une chance de sortie. Je me hâtais chez mon ami, le mettant au courant de mon plan, il fut l'une des deux personnes à savoir ce que je comptait faire, lui et le bijoutier, mi-choqué, mi-amusé, situé non loin de mon laboratoire, où j'avais passé l'heure à laquelle j'étais censée attendre le bus à discuter de bagues et à la façon de les offrir. Le vendredi nous sortîmes, Jessica et moi, ma mère nous lança un « rentrez pas trop tard les filles » depuis sa chambre. Une fois en bas,nous vîmes les étoiles, la nuit était fraîche pour un mois de novembre mais dégagée. Jess me tenait par la main et nous quittâmes la cité. Ma petite amie s'inquiéta du changement de programme, nous nous arrêtâmes juste à la limite de la ville, posa mes mains su sa taille, la regarda droit dans les yeux et l'embrasa le plus langoureusement du monde.

« T'inquiète pas chérie, lui murmurais-je, fais moi confiance.

-Je te fais confiance, répondit-elle, tu le sais »

J'acquiesçais et nous reprîmes la marche vers notre petit parc. Dès l'entrée Jess courrait tout le temps, comme une enfant, vers le banc. Moi j'allumais le joint, tirais quelques taffes dessus et lui donnait. Cette fois-ci je me mis à genoux devant le banc, la bague brillait dans la nuit, autour du gros joint que j'avais rouler au travail, Jess se mit à pleurer lorsqu'elle la vit, secouant la tête de haut en bas alors que je n'avais encore rien dit.

Toute la semaine j'avais pensé à ce moment, dans les détails. L'avis de Luc compta beaucoup, il approuvait totalement l'idée, la trouvant « géniale » alors que sa femme m'avoua qu'elle aurait refuser une demande si... Particulière. Le bijoutier, lui, avait beaucoup de réserves, mais dans le fond, voir ce vieux type qui trouvait super que deux filles « s'aiment et se le prouvent » me fit rire alors qu'il se félicitait à dire à la bourgeoise du comptoir d'à côté qu'il était parfaitement heureux de « la cérémonie de fiançailles de sa fille Rachelle avec le fils du vicomte Dumoine De Breteuil... » Mes oreilles s'arrêtèrent là et je me concentrais sur ce que j'allais dire à Jess. Mille fois je me suis rejouer cette scène dans la semaine, visualisant chaque détails, nous voyant exactement comme nous étions en ce moment.... à part pour les vêtements. Jessica portait un leggins un peu trop grand, je la vis remonter plusieurs fois son pantalon sur le chemin, un T-shirt amples aux motifs tribaux et un gros pull à col roulé. Moi, j'avais un jeans et une épaisse veste de survêtement, vêtements que j'avais choisi depuis lundi. Le jeans était ma façon à moi d'être un peu plus élégante, un espèce d'habit du dimanche, et la veste épaisse me permettait simplement d'être nue nue dessous, malgré le froid de ce début novembre, l'hiver allait être rude cette année. Je nous imaginais donc, me voyant dire le discours pompant que j'avais mille fois répété, corrigé, jusqu'à ce qu'il me semble parfait. Nous nous regardions toujours droit dans les yeux, elle attendait que je dise quelque chose et moi, perdue dans mes pensées, toujours à genoux, le joint éteint dans la main, je restait muette. Le moment dont j'avais tant rêver était en train de partir en couilles, je devais dire quelque chose, et vite. J'ouvris la bouche, je vis ses grands yeux lumineux s'écarquiller, mais devant son visage encore tout brillant de larmes, je m'émerveillais de sa beauté et restait toujours aussi muette.

Lesbienne et Heureuse: Estelle (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant