On dit qu'un vilain n'est qu'une victime dont l'histoire n'a pas encore été racontée. Alors je vais vous conter son récit. Celle de quelqu'un d'imprévisible aux multiples facettes et à la vie pleine de secrets. Rongé par ses pulsions tantôt meurtriè...
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Cela va faire 15 minutes que j'attends mon patient. Mon tout premier patient pour être franche. En effet, tout fraîchement diplômée en psychanalyse, mes supérieurs m'ont assigné une affaire après avoir vu tout mon talent. Ils étaient convaincus que j'étais la personne idéale pour un tel patient, quelqu'un d'instable qui aurait besoin d'être traité avec une attention particulière et une parfaite douceur. C'est à se demander où ils ont bien pu voir de la douceur en moi, parce que franchement, même la terre est d'accord sur le fait que je ne suis pas la personne la plus amicale qu'elle ait portée. Mais peu importe, maintenant que j'ai enfin un job et un salaire, je ne compte laisser personne m'en séparer.
Je tape mes ongles contre la table créant un son presque identique à un tic tac d'horloge. Je soupire. Je me perd dans l'observation éphémère de cette salle sans vie. Les murs n'ont pas été repeints depuis le siècle dernier et cette chose qui sert d'ampoule n'attire que des mouches pour une petite fête de grincements d'ailes insupportable.
Tic tac, tic tac. Ce prisonnier ne semble pas connaître la ponctualité. Je ne suis pas quelqu'un de très impatient, mais il ne faut pas abuser non plus. Une minute de plus et je quitte cette pièce d'entretien lugubre.
Tic tac. Je regarde les aiguilles de ma montre se déplacer si lentement que je ne laisse même pas le temps aux 60 secondes de s'écouler. Je me relève donc et marche vers la porte, déçue que mon premier entretien se termine ainsi. Je suis sur le point de tourner la poignée quand la porte s'ouvre soudainement. Elle aurait pu m'applatir le nez si je n'avais pas eu le réflexe de me reculer à temps.
Un garde pénitencier fait avancer un gars en tenue orange, sans doute ... non c'est évident, c'est mon client pas très ponctuel.
- Vous alliez quelque part? Me demande le garde un sourcil arqué.
- Qu'est-ce-qui vous a pris si longtemps? Vous savez que l'entretien aurait dû commencer il y a 15 minutes déjà? On ne fait pas attendre une lady vous voyez, plaisantais-je.
Au moment où le garde s'apprêtait à s'excuser mon patient relève enfin la tête et il se met à rire, des rires enfantins qui remplissent la salle. J'ai presque l'impression qu'il pleure de rire. C'est ma remarque qui le met dans cet état ? Ma première impression de lui est assez spéciale. Il essaye de sécher ses larmes avec ses mains jointes par des menottes. Il n'y arrive pas et demande à ce qu'on le libère pour qu'il puisse frotter ses yeux. En voilà un rigolo.
Et alors que je le trouve assez jovial, le garde n'est pas du même avis. On dirait qu'il en a ras la casquette des remarques du prisonnier, comme par habitude. Il se met donc en colère, l'attrape sèchement et le fait asseoir sur la chaise. Il me regarde avec pitié et me souhaite bonne chance avant de s'en aller au plus vite pour souffler.
Je fixe le prisonnier quelques secondes puis vient m'asseoir en face de lui. Il me fixe, m'examine, me décèle. Je fais pareil de mon côté.
Il a des cheveux foncés ébouriffés et des yeux perçants comme ceux d'un fauve, ceux d'un carnivore. Je me sens tout à coup mal à l'aise. Je me demande bien ce qu'il peut penser pour tirer une telle gueule. Bref,je décide de sortir son dossier dont je connais déjà tout les détails. Je laisse les feuilles glisser sur la table et décide d'entamer la discussion. Je souris et pose mes mains l'une sur l'autre.
