Chapitre 8

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Le lundi matin qui suit le meeting, je peine à me lever. J'ai passé mon dimanche à ruminer sous ma couette. Ce n'est pourtant pas dans mes habitudes d'être inactive. Je n'ai pas répondu aux appels de Patrick. Je m'attends par conséquent à des reproches en arrivant au bureau. Je suis surprise de le trouver déjà sur place, en général je fais partie des premiers arrivés. En fait, il s'avère que toute l'équipe est déjà réunie.

-Qu'est-ce qui se passe ici ?, demandai-je en m'approchant de la table où tous sont rassemblés.

-Réunion de crise, me glisse Adrien.

-C'est à cette heure-ci que tu arrives ?, m'interpelle Patrick. J'ai essayé de te joindre à plusieurs reprises dans la journée d'hier. Tu étais où ?

Je n'ai pas envie d'avoir cette conversation devant l'ensemble des collègues.

-Je n'avais plus de batterie et pas de chargeur sur moi. Quand j'ai vu les appels je n'ai pas pensé que c'était une urgence.

C'est la seule excuse bidon qui m'est venue à l'esprit. Il me lance un regard sévère, empli de suspicion. Pourtant, c'est à moitié vrai. Je pensais qu'il m'appelait pour me demander pourquoi je n'étais pas passé chez lui. D'habitude je passe le week-end à son appartement mais je n'avais eu aucune envie de le voir. De plus, notre relation n'est pas au beau fixe, c'est le moins qu'on puisse dire. Il ne pousse pas l'interrogatoire plus loin. Je crois qu'il n'a pas non plus envie de laver son linge sale en public. Et visiblement ce n'est pas le moment, vu la tension qui règne.

-Christian, mets-la au courant.

Il s'avère qu'il n'y a pas un mais deux problèmes. Le premier concerne la réservation d'une salle pour un futur meeting. Un autre candidat nous a devancés. La date dont il est question tombe le week-end précédant le premier tour de la Primaire. C'est l'occasion de marquer le coup une dernière fois dans la région parisienne. Je propose de me charger de trouver un autre lieu. Peut-être pourrions-nous déplacer la date d'un jour ou deux, quoi qu'il en soit ce n'est pas la fin du monde. Le deuxième point est plus sensible puisqu'il vise Patrick personnellement. Celui-ci a donné une interview à un quotidien la semaine dernière. L'article, sorti ce matin, ne correspond pas du tout à ses attentes.

-Ils ont déformé mes propos.

Après lecture, je retrouve pourtant un discours qu'aurait pu tenir Patrick.

-Tu es sûr que les phrases entre guillemets ne sont pas de toi ?

J'essaie de garder un ton calme, de façon à détendre l'atmosphère.

-Si, mais ce n'est pas du tout le message que je cherchais à faire passer.

-C'est l'agencement de l'article qui ne va pas. Les paroles sont sorties de leur contexte. Il y a des bouts de phrases insérés par ci par là entre les paragraphes, ça n'a aucun sens.

-Et c'est justement ce que les gens vont lire en premier.

-Vous avez déjà contacté le journal ?, demandai-je, m'adressant à toute l'équipe.

-Oui, ils refusent de retirer les journaux des kiosques, me répond Adrien.

On pouvait s'attendre à cette réponse.

-Ok, on n'a plus qu'à faire un communiqué exprimant les raisons de notre mécontentement.

-Je m'en charge, propose Christian, le bras droit de Patrick.

-On doit aussi avoir des justifications prêtes au cas où un autre journaliste reviendrait sur certains points de l'article, dis-je.

-Tu peux être sure que ça arrivera, me lance Patrick.

-Alors autant anticiper.

Sur ce, tout le monde se disperse. 

La journée s'avère être exténuante et mardi n'apporte guère d'améliorations. Quand un problème se résout, un autre ne tarde pas à faire son apparition.

Mercredi matin un SMS vient bouleverser ce cercle sans fin.

« Bonjour, j'ai été surpris de te voir lors de mon dernier meeting, j'aimerais mettre au clair certaines choses, accepterais-tu qu'on se voit pour en parler ? »

Je ne réfléchis pas longtemps avant de lui répondre. Il me tend une perche, à moi de la saisir.

« Où et quand ? »

On ne peut pas faire plus direct. Je suis bien consciente qu'il attend des explications de ma part, seulement je ne suis pas certaine de pouvoir lui fournir toutes les réponses. 

Une deuxième chanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant