L'amour.
Un mec qui dit qu'il a besoin d'amour, il est traité de tous les noms. Il est ridiculisé. C'est comme si on lui coupait les couilles, qu'on les pendait à un arbre tout ça pour servir de leçon aux prochains. Non, l'homme il tape sur son torse des deux poings et il grogne comme une bête sauvage : l'amour, c'est pour les bonnes femmes.
J'avoue que j'ai pas spécialement échappé à la règle. J'ai jamais prononcé les trois petits mots magiques des films de comédie romantique. Pourtant, je baignais dans l'amour sans m'en rendre compte. A force de repousser tout ça, j'ai jamais pris le temps de comprendre qu'il n'y a pas de honte à poser des mots sur ce qu'on ressent, ou tout simplement sur ce qui nous entoure. Et l'amour m'a entouré.
Je n'ai plus envie de parler de choses qui sont fausses maintenant, je ne veux dire que ce qui est vrai. A mon sens, la chose la plus vraie, c'est l'amour.
Quand j'étais encore en vie, je songeais souvent à ma condition. Au pourquoi. Au comment. Qui es-tu, toi, humain ? Qui es-tu, toi, David ? Je répondais souvent : personne. Mais personne, c'est déjà quelque chose.
J'étais fasciné par la notion d'univers, par cette entité qui n'avait pas de limite, pas de représentation concrète, pas de réponse, pas plus de sens d'ailleurs que mon existence. L'univers, je l'imagine noir. Je l'imagine noir comme la nuit. Alors, est-ce qu'il fait toujours noir dans l'univers ? Et à quoi ça ressemble, au juste, la fin de l'univers ? On peut imaginer ça comme une sorte de péage ? « Non, désolé, par ici c'est fermé » nous dirait le gardien. En fait, peut-être que c'est le néant, la limite de l'univers. J'y connais rien après tout. Mais qu'est-ce que c'est que le néant ? Le néant aussi, je l'imagine noir. Mais c'est juste parce qu'on connaît pas assez de choses qu'on y plaque une couleur, parce que ça dépasse notre entendement. Comme la mort, en réalité.
Et c'est là que je me demandais sérieusement à quoi je pouvais bien servir là-dedans, moi, David, dix-neuf ans, français et pas intéressé par ses études. Perdu dans un univers qui n'a pas de limites connues, baignant de planètes, comètes, étoiles en tout genre, sur une terre où les gens naissent en même temps que des gens meurent, dans une ville dans laquelle je ne connais même pas tous les habitants : à quoi je sers ? On se sent petit. On se sent insignifiant dans ces moments-là. C'est facile d'avoir le vertige face à la folie des grandeurs.
Maintenant, je crois avoir compris quelque chose. Je crois avoir saisi un élément que je n'ai pas pu appréhender durant toute ma vie. L'humain est fait pour les histoires d'amour, il est fait pour ça tout aussi bien que l'abeille se doit de polliniser, le castor de monter des barrages pour couper les courants, le dauphin de danser à la surface de l'eau, le lion de rugir dans les chaudes plaines et le blaireau de... de faire ses trucs de blaireau. L'humain vit pour aimer. L'humain n'existe pas sans un pluriel. Il ne peut se former, se réaliser, être sans ses pairs.
David n'existe pas sans les gens qu'il a aimé.
C'est clair, non ? Je crois. Rien au monde ne me semble plus logique maintenant.
J'aurais aimé remplir ma tâche avec plus de dévotion. Mais bon, même chez les abeilles, je suis sûr qu'il y a toujours un vilain petit canard.
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Où est David ?
Ficção Geral"Venez, on se tire loin. Loin de tout. " Il est parti. David les a quittés. Il les a laissés derrière, tous les cinq, lui il a pris de l'avance. Il a toujours été en avance sur tout David, et en particulier toujours sur eux. D'abord il y a...