Chapitre 19

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Lundi 25 décembre, 8h52.

C'est la première chose que je vois en ouvrant les yeux, et je souris en m'étirant paresseusement. Cela faisait longtemps que je n'avais pas passé la nuit chez mes parents, mine de rien et si ça fait du bien de retrouver mes anciennes habitudes, je suis aussi bien content de ne plus vivre ici en permanence. Léna est partie fêter Noël avec sa famille également et j'ai hâte de la retrouver dans quelques jours. Nous allons passer le Nouvel An ensemble, sûrement à faire la fête avec des amis – et se retrouver dans une des innombrables soirées d'Eva, n'est-ce pas ?

Je déverrouille mon téléphone et souris en voyant que j'ai plusieurs messages. Quelques personnes qui me souhaitent un joyeux Noël et parmi elles... Devinez ? Oui, vous avez gagné, c'est bien Timothée. Nous avons discuté un peu hier dans la journée, mais évidemment nos portables ont été délaissés pendant la soirée : ses parents sont un peu comme les miens, ils n'aiment pas qu'on garde nos yeux vissés sur ces merveilles de la technologie quand nous sommes en famille. En ouvrant l'une des images qu'il m'a envoyées, j'écarquille les yeux. Il tient dans ses bras un chiot de quelques mois, un petit labrador beige qui a une bouille adorable. Ce n'est peut-être pas une façon de parler d'un chiot, mais il est tellement mignon ! Comment ne pas craquer devant ses petits yeux et son évidente vivacité ?

Je sais que je devrais me lever et aller rejoindre mes parents, ma sœur et Adrian pour le petit-déjeuner, mais je n'arrive pas à résister et clique sur « appeler ». Il décroche après la troisième sonnerie et je souris.

« Allô ?- Joyeux Noël.- Merci, toi aussi !- Alors comme ça, tu as eu un chiot ? Il a l'air tellement mignon sur les photos ! »

Et il n'y a pas que le chiot, mais ça, je ne le dirai pas.

« Oui, mes parents ont enfin cédé et on est allés chercher cette petite puce ce matin...- Oh, c'est une femelle ?- Oui, et elle est adorable. Je l'ai appelé Emy. Tu sais... Pour Emilie. »

Je hoche la tête et j'ai l'impression de l'entendre sourire.

« Il fallait un nom assez court pour qu'elle se l'approprie bien, et c'est l'année des E alors... C'était parfait.- C'est beau, Tim. J'suis sûr qu'elle aurait aimé ça.- J'en sais rien, j'ai hésité un moment, mais le chiot a l'air de bien l'aimer, en tout cas. »

J'entends la petite créature aboyer doucement à l'entente de son prénom et je l'imagine sauter joyeusement autour de Timothée en remuant la queue pour lui montrer qu'elle veut jouer. Ça doit être génial, mais fatiguant. Cela dit, sachant qu'il voulait un chien depuis longtemps, je pense qu'il est content. Je finis par raccrocher en entendant du bruit dans les chambres d'à-côté, signe que le reste de ma famille est réveillé.

Je me souviens de la fois où Tim m'a parlé d'Emilie. On était au McDo en train de se régaler avec un bon hamburger après être allés voir « La montagne entre nous » au cinéma et je ne sais pas ce qui l'a poussé à se confier justement ce soir-là, mais il l'a fait. Il faut dire qu'il n'y avait pas trop de monde et qu'on était assis dans un coin tranquille du fast-food. Il m'a parlé de cette fille qu'il a aimée pendant près de quatre ans : ils s'étaient rencontrés au lycée et s'ils sont d'abord devenus amis, ils ont rapidement fini par sortir ensemble et le sont restés pendant presque quatre années. Leur couple a tenu le choc de l'adolescence et il aurait duré bien plus longtemps si Emilie n'était pas sortie un certain mardi. Je ne me souviens plus de la date exacte parce que j'étais sous le choc de son annonce, mais j'ai retenu que c'était un mardi. Elle était sortie pour une raison que même lui ignore, simplement pour aller faire quelques courses ou bien aller se promener, qui sait ? Toujours est-il qu'un mec avait pris le volant malgré le taux élevé d'alcool qui coulait dans ses veines et qu'il l'a percutée. Le pire, je crois, c'est qu'elle n'est même pas décédée sur le coup : elle a passé plusieurs jours dans le coma à l'hôpital, où Timothée a passé les pires moments de sa vie. Et finalement, une nuit, elle a cessé de respirer sans que les médecins puissent la ranimer. Parler d'elle a été vraiment douloureux, autant pour lui que pour moi. Il a laissé ses larmes couler et les miennes ont manqué de déborder à leur tour, mais je savais que c'était important pour lui et que c'était à moi de le consoler, pas l'inverse. Pas cette fois.

Life is a rough draft. [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant