Jour 19 : Mardi 19 décembre 2006

241 32 1
                                    

Ce matin, étrangement, Jessica et moi avions échangé un bref sourire. Mais rapidement, les hostilités reprendraient leurs cours. Elle n'avait aucune raison d'arrêter de s'acharner sur moi si elle tenait à sa place. En rejoignant mon bureau, je répondis rapidement aux messages de Paris. Je lui avais à peine répondu la veille et elle avait craint le pire. Comme toujours, il fallait que je lui assure que je sois en vie, mais ça ne changerait rien. C'était inévitable.

En franchissant le seuil de mon bureau, je levai ma tête de mon portable et croisai le regard de Suna, deux cafés en main. Malgré son sourire, je pouvais y apercevoir un brin de tristesse. Et c'était suffisant pour que j'en aie les larmes aux yeux. Je repris rapidement le dessus de mes émotions et m'approchai d'elle. Elle me tendit immédiatement un gobelet.

— Tu aimes bien le café ? me demanda-t-elle alors que je m'emparai du gobelet.

— Seulement quand c'est toi qui me l'offres.

Je pris une gorgée tandis qu'elle baissa son regard, assez gênée. Je posai alors mon café et posai délicatement ma main sur sa joue. Elle releva son regard et je la fixai longuement, incapable de dire le moindre mot. Je ne savais plus quoi penser de la situation...

J'ignorais ce que je ressentais pour elle. Elle ne me laissait pas indifférent, certes, mais rares étaient les femmes qui me laissaient indifférent. Cependant, la plupart du temps, c'était pour du sexe. Là, je m'en fichais...

Et puis, je repensais à mes plans. Plus le temps passait et moins les choses étaient aussi claires, comme si l'envie de mourir se calmait. Peut-être que je n'y avais songé que sur un coup de tête et que j'avais voulu m'y tenir.

Tout était bien trop flou et Suna semblait le percevoir à mon regard. Elle rapprocha lentement ses lèvres des miennes.

— Je veux t'embrasser, souffla-t-elle tendrement.

Sa remarque m'attendrit un instant et je déposai un doux baiser sur ses lèvres. Malheureusement, celui-ci fut interrompu par un raclement de gorge. Rapidement, je pus constater qu'il s'agissait de Jessica, un air malin sur les lèvres.

— Weston m'a demandé de te ramener un dossier Triaghan, annonça-t-elle.

— J'aurais pu le chercher de moi-même, rétorquai-je immédiatement.

— J'en doute vu que tu as encore oublié que ce n'était pas une maison close Triaghan.

Et avec un sourire fier, elle partit. Comme toujours, Suna ne voyait pas ça d'un bon œil, mais je lui assurai que je gérais la situation. Enfin, en partie.

*

— Alors, tu continues de prétendre que ce n'est pas ta copine ? me lança Jessica alors que je m'approchai de la machine à café.

— D'où ça t'intéresse ? répliquai-je en sélectionnant mon café.

— Je n'ai pas oublié ce qu'il s'est passé hier.

— Tant mieux pour toi. Fais-en ce que tu veux, lâchai-je, indifférent. Mais je suppose qu'on va faire comme si de rien n'était...

— Je te l'ai pas dit hier parce que tu étais bourré, mais je vois bien que ça ne va pas de ton côté, me fit-elle remarquer.

Je récupérai mon café et la fixai longuement. Avait-elle vraiment compris quelque chose ? Ou ne faisait-elle ça que pour me provoquer ?

— Je tiens à ma place, mais je ne suis pas une salope. Prends soin de toi avant tout.

Elle m'adressa un bref sourire et quitta la pièce, me laissant perplexe. Ces derniers jours, elle n'avait plus rien à voir avec l'image que je m'étais fait d'elle. Je n'avais jamais douté de son intelligence au contraire de son empathie...

*

En quittant mon travail, j'aperçus Suna aux côtés de ma voiture et je ne m'attendais certainement pas à la voir. Immédiatement, je m'approchai d'elle et sans dire un mot, elle me prit dans ses bras. J'ignorais comment qualifier notre relation et c'était peut-être mieux ainsi, quand j'étais incapable de la définir.

— Qu'est-ce que tu fais ici ? lui demandai-je.

— Je me suis dit que ça pourrait être une bonne idée... Même si ce n'est que pour se croiser.

— Tu veux manger chez moi ? Ou sinon, je peux oser t'inviter manger quelque part...

— Tu ferais ça ? s'étonna-t-elle.

— Bien sûr. Alors, une préférence ? Le restaurant étoilé ou un fast-food ? Ou quelque chose entre les deux ?

Elle plissa son regard un instant, semblant y réfléchir.

— Quelque chose de simple, finit-elle par dire.

— Je crois que je sais où on peut aller...

Souriante, elle monta dans ma voiture et j'en fis de même. Je lui rendis son sourire, mais j'avais comme l'impression que quelque chose y sonnait faux... J'espérais que ce n'était qu'un sentiment passager. J'avais envie d'être tranquille, au moins pour cette soirée...

La Nitescence des PerdrixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant