Une partie de moi

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Le monde est fade. Vide et ennuyeux. Il ne recouvre rien si ce n'est de la méchanceté et de la cruauté de la part d'autrui. 

Qu'en a-t'il été de cette année? A-t'elle prouvé le contraire? Non. Elle n'a fait qu'aggraver et blesser. Elle a été comme le couteau remuant dans la plaie. Elle a été pareille à celles et ceux qui enjambent les pauvres misérables dans la rue. Elle n'a été que traîtresse et pécheresse.

J'ai fumé au nouvel an, deux misérables taffes, rien d'extraordinaire mais le geste est là. 

J'ai mentis et blâmé. J'ai insulté et accusé, injustement ou pas je l'ai fait. J'ai prié en un Dieu auquel je ne crois plus. 

J'ai violé toutes sortes de règles, j'ai idolâtré et j'ai aimé. 

J'ai aimé faire le mal tout comme je m'en suis voulu. J'ai tenté de tout rattraper par moi-même. Mais je l'ai dit : le monde est cruel. Cette phrase bateau, vue et revue, je l'ai vécue. J'ai nourris le mal, je l'ai engraissé et je le l'engraisse encore. A l'instant même, je reçois un message bienveillant de la part de mon père, me disant de bien travailler et d'être gardée de tout mal, d'être gardée par Dieu.

J'en sais rien, est-ce un signe ou non? J'en sais rien. Mais au final, que sais-je vraiment? 

Cela va bientôt faire deux ans que je suis mal. Ce mot répétitif et amer, ce mot, cet acte, cette parole, ce geste. 

Je vis mal, je dors mal, je mange mal, je pense mal et je respire mal. Quand je dis que je ne suis pas seule je ne fais pas référence à celui en quel je crois mais à elle. 

Ce matin, j'ai réveillé ma sœur, suite à une énième nuit blanche. Je l'ai dorloté et l'ai câliné. Je me suis sentie apaisée, bien là où j'étais. A ma place. 

Et je me suis rendu compte que je l'aimais telle une mère et non telle une sœur. Ce n'est pas la première fois que je le constate, le jour où j'ai été reniée de ma mère, j'ai hurlé que c'était moi qui l'avait éduquée et que c'était moi, sa mère. Qu'est-ce qui a pu se passer dans sa tête à ce moment-là? 

Dans sa petite tête blonde bien trop instruite pour son âge. Elle a dû avoir peur, elle a dû se dire que j'étais folle. Et je le suis. Parce qu'elle est là. Parce qu'elle me parle et me conseille. 

Ses conseils sont douteux mais tellement libérateurs. Si vous saviez comme cela me coûte de la refouler, de ne pas pouvoir m'adresser à elle tranquillement, à haute voix. Je détruis cette partie de moi, celle qui est encore saine en voulant me faire passer pour saine. Quelle ironie!

Ne pas trembler, ne pas parler, ne pas hurler, ne pas frapper, ne pas pleurer, ne pas ne pas ne pas... Quelle jolie mélodie que voilà! 

Je me rend compte que même en écrivant elle est là, tout le temps, sans jamais s'arrêter, sans aucun répit. J'endure sans rien dire et le soir, quand tout le monde dort, je lui parle. A ce moment-là je me sens mieux. C'est comme être libérée d'un lourd fardeau, d'être ranimé d'un long coma. Mais Dieu seul sait à quel point j'ai souhaité dormir, à quel point j'ai souhaité, pendant seulement deux semaines, être dans le coma. 

Et me réveiller, un matin, un soir ou que sais-je, la bouche pâteuse,  les idées embrouillées dans un lit d'hôpital.  Avec bien évidemment tout le monde à mes côtés, en train de m'attendre patiemment derrière la porte de ma chambre. Et s'extasier devant mon réveil miraculé. Evidemment qu'ils seraient tristes, malheureux et qu'ils se remettraient en cause un petit peu. 

Mais ne le méritent-ils pas? Juste un peu? Ce n'est pas une demande de vengeance, c'est un simple retour des choses et juste en plus.

Juste. 

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