Marcus

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La mort a frappé d'une manière encore plus violente que les fois dernières. Il a raflé encore une fois. Il a -comme d'habitude- exécuté sa mission avec perfection : semer le désespoir en nous prenant ces êtres pour lesquels on nous aurait tout donné, jusqu'à notre vie. J'ai toujours pensé ne jamais ressentir ces sentiments à nouveau. Regarder la personne s'éteindre de manière impuissante face à cela. Constater avec dépit que le temps que vous avez passé ensemble n'était tout simplement pas suffisamment. Observer avec regret que le temps restant est celui d'un battement de cils. Puis viens enfin, le moment où notre esprit et notre corps réalisent l'absence définitif de cet être.

Elle ne reviendra plus.

Notre monde prend alors de nouvelles teintes. On apprend à nouveau. On échoue et on essaye encore se relevant avec difficulté. On tourne d'abord en rond. On refuse les mains tendues. On construit un mur. On le solidifie grâce à nos peurs, notre peine, notre colère. Une colère que l'on ressent envers nous-même car malgré que nous savons la plupart du temps que ce n'est pas de notre faute si la personne a quitté notre vie, nous ne nous pouvons nous empêcher de culpabiliser. On culpabilise pour les non-dits, ce temps gâché pour des futilités, ces moments à nous blesser, des petites choses que nous ne remarquions pas avant que la personne disparaisse et ne revienne plus.

Je pense et passe par ces étapes que je viens de lister dans ma tête sauf qu'à la différence de plus de la moitié de la population, je suis celui qui a causé la mort de cet être. Je suis celui qui a fait sonner son heure. Je suis la personne qui d'un geste, un mouvement, une émotion trop forte, une pulsion, à signer la fin de vie d'une personne. Une personne qui était la seule, le centre de mon univers.

Aujourd'hui alors que je marche encore sur la même chaussée qu'hier et les trois jours qui l'on précédaient, je repense encore à ce moment. Je repense à cette personne qui fait de ma vie -moi, Lucifer- un enfer. J'essaye d'imaginer différents scénarios. J'essaye de me raisonner. J'essaye de ne pas sombrer dans la folie. J'essaye de passer au-dessus de cela. Je tente en vain de me reprendre. Reprendre à ces activités qui font la fierté du Diable. Ces activités qui font courir les gens faibles et lâches tout droit vers la débauche, mais surtout tout droit vers les bouches des Enfers.

Mes Enfers.

Mais je suis tout comme anesthésié. Il me suffit de pénétrer dans une discothèque puis de voir ces âmes égarées -ces hommes et ces femmes- se tortillaient sur des musiques qui résonnent de façon assourdissante, et qui grâce à leurs paroles des plus vulgaires, incitent ces mêmes faibles à se dépraver encore plus qu'ils ne le sont déjà ; pour que je prenne la tangente. Je ne suis plus aussi excité de pouvoir chasser de nouveaux gibiers dans ces milieux. Chercher les nouveaux locataires de mon lit, de mon royaume, m'apparaît maintenant comme une activité fade. Donc je repars et refais le trajet mais dans le sens inverse observant avec pareille attention que les fois précédente le même point : la lune.

A mon retour sur terre, mon attention était portée sur les êtres qui m'entouraient, qui gravitaient autour de moi. J'examinais avec minutie leur fonctionnement comme ma première fois sur terre. C'est comme si je redécouvrais les lieux, mais cette fois-ci avec de douloureux souvenirs. Des souvenirs qui me narguent, me torturent et m'ont poussé à m'avouer une terrible vérité. Je suis malade. Tout simplement. Une maladie courante chez des êtres qui possèdent un cœur, une âme. Je suis frappé par cette maladie qui autant elle nous fait souffrir autant elle nous fait du bien. Elle colore, prend les commandes de nos vies. Et oui, comme vous l'aurez, j'espère, compris je suis amoureux. Amoureux, d'une ordure. Amoureux, parce que le Diable peut aimer, me diriez-vous ? Oui je le peux. J'ai aimé le Miséricordieux autrefois. J'ai aimé Djibril. Alors vous me signalerez aussi que ce n'est pas le même amour. Cependant je vous répondrai que c'est de l'amour quand même.

Dure réalité, n'est-ce pas ? J'ai aussi eu du mal à m'en remettre. J'ai tourné la situation sous tous les angles. J'ai cherché une faille qui m'indiquerait que je me trompe surement...

J'ai fini par la trouver cette putain de faille après avoir passé des jours à sillonner toute la ville. Je l'ai trouvé au détour d'une ruelle. Elle était repliée sur elle-même au fin fond d'une ruelle lâchant des geignements de douleur à cause des coups qu'elle recevait. Je me suis alors dirigé droit vers « ma faille » et tout comme un héros d'animé, je me suis débarrassé des méchants qui lui faisaient du mal. Cela fait, je me suis tourné vers elle. Elle était comme un animal apeuré et traumatisé alors doucement je me suis accroupi devant elle et lui ai caressé ses boucles. Ses yeux se sont instantanément accrochés aux miens et j'en fus bouleversé. Un bleu dans lequel une vie, une histoire se retranscrit à la perfection. Je me noyais dans le flot d'émotions qui se chamaillent dans ses océans avant de lui tendre ma main.

Il était venu me sauver de la folie dans laquelle Dylan m'avait plongé.

Vie de débauches: Satan n'est qu'un hommeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant