Chap. 9

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Des cris, ils résonnent sans jamais s'arrêter. J'ai comme l'impression de devenir fou. J'entends sans les voir, mais à travers leurs hurlements, leurs plaintes, c'est comme si je voyais ce qu'ils vivent. Je ne sais pas si j'ai de la chance de ne pas faire partie de ceux que l'on torture, de ceux que l'on brûle, de ceux qu'on dépouille de leur peau ou encore de certains de leurs membres. Dit comme cela je peux dire que je suis chanceux. Je connais Marcus, je connais ses techniques de torture. Je sais que ce n'est pas lui qui s'occupe personnellement de toutes ses âmes, mais c'est son royaume donc forcément c'est lui qui à initier les bourreaux à cette besogne. Des bourreaux que j'entends rire, ordonner, menacer. Je les sais heureux de pouvoir infliger cette souffrance. Ils se nourrissent de cette douleur. Ils se repaissent de tout ce désespoir, ce sang, cette odeur de peau brûlée, ces hurlements de douleur et de ces supplications.

Les Enfers... C'est après voir perdu la notion de temps que je me suis rendu compte de là où je me trouvais actuellement. Pour ne pas sombrer dans la folie, je me raccroche qu'à une chose, mes souvenirs, même les plus désagréables. J'ai passé ma vie au peigne fin, enfin de ce que je me souviens.

J'ai même fini par voir réapparaître mes cicatrices. Celles qui avaient disparu après que je sois revenu de l'entrepôt, après avoir sceller le pacte avec Marcus. Effectivement mes cicatrices avaient toutes disparus. C'est comme si je venais de renaître mais directement dans une peau d'adulte. Finalement les coups de couteaux que j'avais reçu du frère de l'autre psychopathe a fini par réapparaître mais sous la forme d'une cicatrice. Une énorme cicatrice qui s'allonge le long de mon abdomen. Aucune n'est apparue d'un seul coup et de manière douce. Cela n'aurait pas été drôle autrement. Lors de leur apparition, je me suis demandé ce qui se passait. La sensation était comme si quelque chose poussait depuis l'intérieur de mon corps pour sortir. Bah en fait c'était cela, elles poussaient pour sortir. Comme des montagnes qui sortaient de sous terre. Je me suis tordu et ai hurlé de douleur pendant ce qui me semblait être une éternité. Il n'y avait pas de pause. Le calvaire ne me laissait aucun répit. Cela était pire pour celles qui se chevauchent. Je crois qu'à certaines périodes, je perdais connaissance tellement la souffrance était insupportable.

Je n'ai pas eu besoin de subir toutes les autres formes de supplices qu'endurent les autres détenus pour que je me rende compte du lieu dans lequel je me trouvais. Je n'ai pas eu comme certaines personnes cette phase de déni lorsqu'une situation nous dépasse. Non, j'ai très vite compris où j'étais, à partir du moment où j'ai su qu'il n'y avait aucun endroit pour assouvir mes besoins. Comme vous l'aurez compris ma cellule est aussi mes toilettes. C'est très ironique puisque nous ne mangeons pas, enfin on n'en ressent pas le besoin mais notre corps relâche quand même des excréments. Une autre forme de punition. Après cette humiliation constante qui détruit peu à peu le mental, s'ensuit le supplice des cicatrices qui malgré qu'il ait été temporaire m'a terrassé. J'attends de voir la suite pour sombrer une bonne fois pour toute dans la démence. Qu'est-ce que j'aurais donné pour avoir ne serait-ce qu'un verre de whisky pour réconforter dans mon malheur.

L'odeur de mes sécrétions et les hurlements m'emmènent doucement, silencieusement au bord du précipice. J'ai de plus en plus souvent du mal à faire la part entre la réalité et l'imaginaire. Mais alors que je me sens partir vers la folie, une image de Marcus revient me frapper. Cela me réveille instantanément. Des questions commencent à se manifester. Je me demande souvent ce qu'il fait, où il est. Est-il ici ou là-bas ? M'a-t-il remplacé ? Je parle souvent comme si je l'aimais. Je parle souvent comme s'il m'appartenait ou qu'il m'avait appartenu.

J'ai envie de dire qu'il m'a appartenu à un moment mais je l'ai poussé à partir. J'ai envie de croire que j'étais important pour lui. J'ai envie de me raccrocher au fait que j'ai compté pour lui. J'ai envie de croire que j'avais pendant un court instant ce cœur sombre aux creux de mes mains. Ces perspectives me suffisent à me donner le sourire. Seul dans cette sphère, noyé par la senteur de l'urine et de merdes, l'image des moments que l'on a passée ensemble et la manière dont il m'a retiré mes chaînes pour me faire goûter à la vie me reviennent.

Marcus, mon beau diable... J'ai toujours pensé que leDiable se nommait Lucifer ou Satan, mais j'aime bien Marcus. Il résume qui tues. Il t'enlève cette image stéréotypée que les ignorants possèdent du diable. Ce nomt'humanise plus, te rend encore plus vrai. J'ai envie de te vouloir pour tedire que je désire mourir pour de bon. Si je cris, viendras-tu ?M'écouteras-tu ?     

Vie de débauches: Satan n'est qu'un hommeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant