Consultation sans rendez-vous - 2 : Saturday night fever

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Le lendemain, Harlock se serait levé d'assez méchante humeur si seulement il avait eu la force de se lever. À vrai dire, lorsque le docteur Zero entra dans sa chambre avec un jovial « alors, comment allons-nous ? », trois options s'offraient à lui : râler à propos de cette intrusion non autorisée dans son espace vital, se plaindre de l'inefficacité des médicaments qu'on lui avait fourgués la veille, ou mentionner le fait qu'il avait passé la majeure partie de la nuit penché au-dessus de la cuvette des toilettes, à recracher consciencieusement la totalité du contenu de son estomac.

Après avoir étudié la question, il fit « beuh », puis tenta de s'enfuir sous les couvertures.

— Vous n'avez pas bonne mine, répondit le doc tandis qu'Harlock tâtonnait pour retrouver son oreiller et se cacher dessous. Vous êtes resté toute la journée au lit ?

La journée d'hier, oui. En grande partie. Une fois revenu de l'infirmerie, il s'était empressé d'oublier les recommandations du doc (à savoir « prenez du repos » et « respectez la posologie »), il avait avalé une double dose de cachets et avait entamé quelques tâches élémentaires à son bureau, comme lire les derniers rapports de maintenance ou valider les routes de navigation pour les prochaines quarante-huit heures. La manœuvre s'était toutefois révélée on ne peut plus contre-productive : quand Masu était arrivée avec le déjeuner, il était encore en train de se concentrer pour comprendre le premier paragraphe du premier rapport, et il s'était alors dit qu'il était peut-être inutile de s'acharner. L'après-midi, son estomac rempli et les médicaments du doc l'avaient mis suffisamment en confiance pour qu'il aille faire un petit coucou aux gens en passerelle, mais il ne s'y était pas attardé plus de quelques minutes dès lors qu'il s'était aperçu avoir tendance à s'endormir dans son fauteuil.

Il se souvenait vaguement être rentré chez lui et s'être effondré sur son lit, puis s'être réveillé complètement désorienté au beau milieu de la nuit pour aller vomir. Plusieurs fois.

— Le premier service du soir est terminé, poursuivait Zero, et comme personne ne vous a vu aujourd'hui...

Attends... Quoi ? Harlock grogna lorsque son cerveau paniqué fit les connexions nécessaires et le força à se mettre debout. Je suis resté couché toute la journée ? Il avait planifié de se reposer durant la matinée pour être opérationnel avant le déjeuner ! Et pourquoi personne ne l'avait-il appelé ? Ils n'avaient pas une nav' prévue dans le champ d'astéroïdes de Miwam, cet après-midi ?

— Vous ne répondiez pas aux appels com', donc j'ai préféré venir vous voir, ajouta le médecin avec une note d'inquiétude dans la voix.

Pendant qu'il ne vomissait pas il ne pouvait pas dormir aussi profondément, si ? Il n'était tout de même pas aussi mal en point ! Harlock adressa au doc un regard un peu perdu tandis que ses jambes cédaient sous lui et qu'il s'affaissait en tas sur le sol.

— ... et j'ai bien fait, je crois, termina Zero.

Il était probablement temps de protester, mais son estomac ne semblait pas du même avis. Oh, merde. Ayant confusément admis qu'il n'était pas très solide sur ses jambes, Harlock s'échappa des mains secourables du médecin par un mouvement de reptation ridicule et courut – rampa ?... Enfin bref, moitié à quatre pattes, moitié plié en deux, il atteignit la salle d'eau. Puis il vomit. Il essaya, tout du moins. Il y avait belle lurette que son estomac était vide. Aïe.

Derrière lui, le doc fit « hum ».

— Putain, doc, vous ne me ferez pas croire que c'est « juste un rhume » cette fois-ci, croassa Harlock entre deux spasmes douloureux.
— Hum, répéta Zero. Ne bougez pas.

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