Quand lama fâché - 2

39 9 0
                                    


À l'extérieur de l'Arcadia, les préparatifs de l'expédition progressaient bien. Chaque lama avait été harnaché et chargé de deux caisses ; Luis et Pepe s'occupaient à vérifier chaque sangle avec un soin méticuleux. Plus loin, Carmen discutait avec un nouveau venu, un adolescent aux cheveux mi-longs noirs et raides, vêtu d'un blouson de toile délavé trop large pour lui et de jeans qui avaient connu des jours meilleurs. Il s'appelait Zorrino, avait-il dit. A priori, il s'agissait de leur guide.

Harlock avait accepté la nouvelle avec stoïcisme.

— La position du camp change tous les quatre à cinq jours environ, lui avait expliqué Carmen.

Une mesure de sécurité. Et un indice de plus qui confirmait que ces montagnes étaient beaucoup plus dangereuses qu'elles n'y paraissaient au premier abord. Harlock fronça les sourcils et rejoignit Tochiro tout se repassant mentalement le contenu de son sac à dos. Bon... Chargeurs, couteaux, grenades, explosifs... Non, il n'oubliait rien.

Son ami piaffait d'impatience à côté d'un lama, son sac posé à ses pieds. Lequel était, à première vue, beaucoup trop grand et lourd pour lui.

— Tochiro, on part pour huit jours, pas pour huit mois, le taquina Harlock.
— Oh, tu viens aussi finalement ? se réjouit l'ingénieur.
— Je ne tiens pas à ce que tu fasses des bêtises, grommela le capitaine pirate. ... Tu devrais alléger ton sac. Vraiment.

Son ami ne l'écoutait pas, trop occupé à lui détailler les merveilles de leur voyage à venir. Les yeux de Tochiro pétillaient. Il ressemblait à un enfant excité par l'approche de Noël. Comment ne pas être touché par un tel enfièvrement euphorique ? songea Harlock. ... Ah, oui. Il suffisait de se rappeler les mots essentiels : à pied. En pleine nature. Et dire que certains y consacraient tous leurs loisirs. Quelle horreur.

Le capitaine frissonna. Allons, huit jours, ce n'était pas la mer à boire. Il avait traversé bien pire, se répéta-t-il. Il avait traversé bien pire.

Il ignorait encore à quel point il se trompait.

                                                   —————

La marche en zone tropicale montagneuse humide se révéla telle qu'Harlock s'en souvenait : pénible.

... Bon, d'accord, il n'était pas tout à fait honnête avec lui-même : il connaissait le climat tropical humide et avait eu l'occasion de se trouver plus d'une journée d'affilée en région montagneuse (humide également), mais c'était la première fois qu'il avait le droit à un super-combo. L'atmosphère, chaude et étouffante, s'additionnait à une végétation dense, voire inextricable par endroits, le tout sur des reliefs accidentés composés de pics déchiquetés et de vallons abrupts. Bien sûr, il pleuvait. Harlock ne parvenait pas à se défaire de l'impression que les éléments s'étaient ligués contre lui.

Il détestait ça.

— Regarde ces plantes ! admirait Tochiro. Et la taille de ces feuilles, c'est incroyable !

Oui alors la forêt luxuriante c'était bien gentil, mais personnellement il trouvait cela beaucoup plus joli vu d'en haut.

Harlock grogna tandis qu'il écartait une fougère d'une main et repoussait une mèche de cheveux trempée de pluie et de sueur de l'autre. À vrai dire, le capitaine de l'Arcadia était bien moins impressionné par la végétation que par l'enthousiasme intact de Tochiro.

— Encore une cascade, Harlock ! C'est magnifique, tu ne trouves pas ?

Putain, mais ils en croisaient tous les cent mètres, des cascades ! Les parois rocheuses dégoulinaient de cascades ! Ils avaient même dû en traverser une, avec de l'eau glaciale jusqu'à la taille, il y avait moins d'une demi-heure ! Combien de temps Tochiro allait-il continuer à tomber en pâmoison devant –chaquefoutuecascade ?

Anecdotes interstellairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant