Snowflakes at war (Part 2)

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Deux hommes se regardaient, le corps incertain et l'âme floue. Le nom d'un certain chevalier de Ren résonnant encore dans leurs oreilles, comme un écho qui leur avait été renvoyé. Pourtant ils gardèrent le silence, un de ces silences qui remplissaient l'espace au lieu de le vider. Le sol était recouvert de son drap blanc, les flocons réalisaient un ballet gracieux dans les airs et le silence tombait avec eux. Et tout cela n'était pas qu'une illusion. Bien que scientifiquement parlant, la neige avait sa part de responsabilité dans l'absorption du moindre bruit, le rouquin et le ténébreux avaient inhalé bien plus de râles. Ils avaient cessé de respirer, couper dans l'instant. Mais on ne peut retenir son souffle que pendant un certain temps, après tout. Tôt ou tard, il vient un moment où l'on doit se remettre à respirer, même si l'air est pollué, même si on sait qu'il finira par vous tuer. 


«  Mon nom est Ben Solo.  »

Il n'aurait pu dire quelle force l'avait poussé à prononcer ses mots interdits qui lui avaient pendant des années brûlé la poitrine et les lèvres. Était-ce le corps inerte de la femme qui l'avait porté, reposant sagement au creux de la poudreuse ? Ou bien l'éclat de lumière qui continuait de se battre sans relâche quelques mètres plus loin  ?

Qu'importe. Il n'avait pas dit cela pour Hux mais pour lui, pour se rappeler qui il était à l'origine. Il portait son nom de naissance comme un ancrage, une ficelle sur laquelle il pouvait tirer lorsqu'il se perdait trop longtemps dans l'obscurité.

«  Tu ne mérites aucune appellation, si ce n'est celui de traître.  »

En disant cela, le rouquin rassembla l'hémoglobine qui coulait entre ses dents pour le cracher sur la neige blanche. Chaque mouvement réalisé contenait tant de haine et de colère qu'on pouvait s'interroger sur la quantité qu'un homme pouvait supporter. Mais Hux n'était plus un homme, seulement l'ombre de lui-même, le vestige de ce qu'il avait pu être. Il renifla fortement, le faisant tanguer dangereusement. La douleur physique n'était rien comparé à celle de l'âme. Il regardait son empire tomber de toute part, il voyait la Résistance, ce groupe utopiste, réduire en cendres tout ce qui constituait ses repères. Puis sans s'en rendre compte, il délia les mots qui s'étaient trouvés bloqués depuis des années à la commissure de ses lèvres  :

«  Snoke a été imbécile de croire en toi, il aurait dû te tuer, toi et la fille tant qu'il en avait la possibilité. Et moi, j'aurai dû être à la tête du Premier Ordre depuis bien longtemps. Ce poste me revenait de droit, de droit tu m'entends  ! C'était mon destin de gouverner, j'étais fait pour ça  ! J'ai tout donné, tout abandonné pour l'ordre. Tu as tout gâché Ren. Toi, l'adolescent capricieux et instable qui, parce que son taux de midi-chloriens est plus élevé que le mien, mérite toute l'attention de la galaxie. Et crois-tu vraiment que cette gamine t'aime  ? Elle t'utilise pour sauver ses amis. Tu n'es qu'un idiot aveugle, qu'une bête ravageuse, personne ne peut vraiment te porter attention.  »

Il dut marquer une pause, l'effort demandé par ce débit de paroles courroucées l'ayant affaiblie. Il reprit un air plus hautain, l'air qu'il aimait arborer fièrement.

«  Quoique, ta mère peut-être, mais rappelle-moi... Elle aussi est morte par ta faute, n'est-ce pas  ?  »

Armitage avait enfin craché sa sentence au visage de celui qu'il détestait par-dessus tout. Il avait tant ruminé ses dires, cent fois en pensées, jamais à voix haute. Il était bien trop lâche pour avoir assez de courage afin de faire affront à un homme aussi puissant que Ren. 
La parole est dangereuse et les mots sont traîtres. Quand un homme se sent traqué, le moindre des mots est un piège tendu qui le rapproche un peu plus de sa perte. Et il ne s'était jamais senti autant au bord du gouffre. Il savait pertinemment qu'en s'attaquant aux cordes sensibles de Ben, il trouverait le moyen de le blesser en profondeur. Et Dieu qu'il appréciait provoquer cela. Voilà tout ce qu'il restait aux hommes de l'obscurité  : la vengeance morale, la douleur psychique, la haine viscérale. Qu'était le mal physique quand le cœur était déjà noirci et tombant en lambeau  ? Un moyen de faire taire...

The BalanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant