La tête baissée laisse le cœur sur l'estomac,

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Par je ne sais quel miracle, je réussis à faire cesser le flot de larmes intempestives qui déferlaient sur mon visage. Je trimballais alors, les restes de ma carcasse jusqu'à mon appartement. Chantal sur mes talons. Le doliprane ingurgité quelques heures plus tôt eu un effet quasi nul, me propulsant directement dans mon canapé où j'allais élire domicile pour le restant de la journée. Je n'étais pas du genre à me morfondre des heures devant la télé, mais je devais bien admettre qu'il ne m'était pas envisageable de foutre un autre pied dehors ce jour-là. Je détestais par dessus tout quand je me laissais foudroyer par la vulnérabilité si bien qu'il m'était impossible de la cacher plus longtemps. Foutu dimanche !

J'évitais avec soin de visionner un nanar romantique de peur de gerber de frustration. De même que dans un moment d'abattement comme celui-ci, je m'abstenais de tout contact avec des hymnes sentimentaux vociférant après le manque et la pénitence infligée par l'Amour. Je préférais par delà toute cohérence, écouter du vielle égo-trip de rappeurs mal lunés. Je me demandais sans cesse si cette situation ne me rendait pas pathétique. Et j'eus la réponse bien vite. Une pauvre fille enroulée dans son plaid, à moitié apathique, les yeux injectés de sang et le visage aussi vif qu'un lavabo de brasserie... si, c'était éloquent !

Heureusement pour moi, le seul témoin de mon désastre, ne prêtait guère attention à mon accoutrement, puisque Chantal ronflait plus fort que les rimes d'Oxmo.

Aussi, fus-je transcendée par la musicalité de ce morceau que je ne connais que trop bien pour ne pas me laisser aller à beugler ces quelques mots :

« Ne pas croire au mal ne vous en protège pas, les gens légers sont pleins de florilèges pâles, inconscients de leur potentiel maléfique, leur mauvaise foi est un spectacle magnifique, même de moyenne humeur je garde l'aubaine, pour les fautes pas faites j'exige un prix Nobel, tu peux filer droit les gens te mettent dedans, tu paieras le mal que tu n'as pas fait même en guettant... » (1)

Peu après 19h, ayant passé en revue l'intégralité des classiques du rap français, je fus interrompu dans mon concert privé, par la sonnette qui retentie. Putain, mais c'est qui ? Criais-je par dessus les hurlements de Joey Star.

Je passais alors la tête par le judas, pour découvrir Zoé derrière la porte. Ma politesse me força donc à lui ouvrir pour la laisser entrer. Elle me gratifias d'une splendide risette avant de s'introduire dans le no man's land qui me servait de domicile. Déprime oblige, j'avais omis de ménager l'endroit.

- Si j'avais su que tu venais, j'aurais au moins allumer une bougie. Lui dis-je embarrassée.

- T'as une mine affreuse poussin. Tiens ! Me fit-elle en me tendant une bouteille de vin.

-  Oh, du bourgogne ! Tu tombes à pic toi... m'exclamais-je à l'attention du Jéroboam qui n'en était en fait pas un. Comme une hôte distinguée, je filais alors à la cuisine, dégoter le sésame des alcooliques de mon espère : un ouvre bouteille !

Zoé pris place sur mon canapé et je la rejoignis très vite, armée de cochonneries faisant office d'apéritifs. Je me laissais tombée de tout mon poids à ses côtés, scrutant l'instant où elle allait prendre la parole pour me questionner sur l'activité de mon week-end. Ce qu'elle fit dès l'instant où je nous servis de quoi fluidifier notre gosier respectif.

- Tu as fait quoi hier soir ?  Me demanda t-elle doucement.

C'est ce que j'aimais par dessus tout chez Zoé. Sa douceur extrême, son empathie naturelle à tout et tout le monde.

- Je vais te faire un rapide résumé de cette soirée et après nous passerons à ce que toi tu as fait ces derniers jours parce que crois-moi cela ne nécessite en aucun cas qu'on polémique sur mon samedi soir. Prévenais-je. Elle acquiesça poliment et m'invita à reprendre ma tirade.

20 ans et quelques | Terminée |Où les histoires vivent. Découvrez maintenant