Vingt-six,

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Le Bon Jovi rassemblait ce soir-là, toutes les personnes qui de près ou de loin, avait compté un tant soi peu à mes yeux, dans cette furieuse année. Assise sur la terrasse, j'observais mon microcosme se mouvoir, un verre en main. L'alcool faisait son effet. Mais quand d'autres voyaient leur tristesse rejaillir, moi, je me laissais aller à la vie, le sourire aux lèvres. C'était foutrement réconfortant.

Axelle virevoltait à son bon vouloir entre les gens, se moquant des bonnes manières et du savoir-être, elle brillait parmi la petite foule. Son aisance était manifeste. Quand mon regard croisa le sien, elle s'inclina en une révérence gracieuse dont elle seule pouvait en avoir le secret. Qu'elle était belle ! Sa blondeur candide tournoyait dans la pièce et peu de personnes pouvaient se vanter de ne pas ressentir d'effet.

Je venais de lui demander d'habiter avec moi. Mon petit appartement était assez grand pour nous deux. Et je savais que je venais de la sortir d'une belle galère. En prime, je m'assurais que mon loyer soit divisé par deux, dans l'attente un jour, peut-être, d'un job plus stable. Je savais aussi que deux mamans à Chantal, ne serait pas de trop quand mes heures à servir des verres de vin au Bon Jovi allaient s'éterniser.

Je levais mon verre en direction de ma colocataire. Combien de soirées encore, allions nous passer toutes les deux ? Je ne le savais pas. Mais l'avenir avait tout le temps de me donner des réponses.

Je cherchais Milo du regard, et m'aperçut que lui et Zoé ne s'étaient pas quittés d'une semelle. Ils dansaient collés l'un à l'autre pour former une entité indivisible. Comment ils en étaient arrivés à se rabibocher de la sorte ? Je n'en savais rien. Mais peu m'importait, ce que je voyais me suffisait à remplir mon cœur d'une joie fugace. Je prenais la pleine mesure du bonheur palpable de Zoé dans les bras de Milo. Si je comprenais ? Non. Mais j'avais assez d'amour pour elle pour lui souhaiter la malédiction d'aimer démesurément quelqu'un comme Milo. Et c'était suffisant à me faire apprécier le moment.

Quant à Milo, rien n'était moins sur. Je n'avais jamais compris quel était son objectif dans la vie, ni même ce après quoi il courait désespérément. Mais il avait besoin du soutien de Zoé, comme d'une bouée de secours. Ce qu'il traversait à ce moment précis ne pouvait s'adoucir que parce qu'elle était à ses côtés, prête à porter ses peines à la seule force de son éternel loyauté.

J'avais cherché à savoir l'issue de la relation entre Milo et Inès. Et Zoé m'avait servi de messager.

Alors, non Milo et Inès ça n'avait pas duré. Ça n'aurait pas pu fonctionner. Milo était inconstant, différent, meurtri et sociopathe sur les bords. Bien-sûr qu'il avait tout foutu en l'air. Ça ne pouvait en être autrement. Avoir un bébé, sonnait comme la plus stupide des actions à mener. La plus délicate décision semblait cependant être celle de le garder ou non. Un choix difficile qui s'était imposé comme une évidence. Bien-sûr, que j'étais triste pour eux. Pour Milo surtout. Dieu seul savait quand cette opportunité se représenterait un jour.

Zoé m'avait glissé dans l'oreille ces quelques mots : «  Il a fait ce qu'il faut faire quand on est adulte : renoncer ».

Oui, c'était adulte. Il n'y avait que les enfants pour s'entêter bêtement. Pourtant, au fond, j'avais encore envie de croire que parfois l'obstination se révélait être la meilleure des armes face à un monde fané et aliéné. Mais qui étais-je pour le savoir ?

Zoé, elle, savourait ce moment, sans pour autant s'en réjouir ostensiblement. Milo lui faisait du mal, mais c'était pire quand il s'absentait de sa vie. Ce n'était plus qu'une question de temps avant qu'elle ne trouve chaussure à son pied et détourne son attention ailleurs. Vers celui qui saura lui apporter ce que Milo n'était pas capable de lui offrir.

20 ans et quelques | Terminée |Où les histoires vivent. Découvrez maintenant