Lettre de pré-adieu (ou peut-être est-ce juste un appel à l'aide)

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Ça faisait longtemps que je ne m'étais pas senti comme ça. En réalité, non, pas tellement, un mois ou peut-être deux, pas plus. Quelques mois de bonheur qui m'ont semblé durer des années, et des années de tristesses qui semblent durer des millénaires.

Quelle est la raison exacte de cette tristesse, je saurais pas vraiment l'expliquer. Elle est simplement là, omniprésente, prête à me ronger jusqu'aux os, et à me réduire en bouillie mentale. Elle pèse au dessus de ma tête, comme un monstre gigantesque qui ne désire qu'engloutir mes restes de bonne humeur, transformant peu à peu mon cœur en un gouffre béant, et mes sentiments en une lassitude extrême.
Ce monstre-emotions porte aussi de nombreux autres noms plus connus: anxiété, accablement, abaissement, apathie, blues, idiotie, dépression.

"Dépression". C'est un terme compliqué, presque élitiste. Parfois, j'ai pensé à appeller mon monstre ainsi, mais quelque chose gêne. C'est un terme qui est souvent utilisé de nos jours, à tort et à travers ("ouais, je déprime parce que j'ai raté mon contrôle de math" ou "j'vais rentrer en dépression parce que Bidule veut pas m'accompagner au bal de promo"). Pour moi, le terme de "Dépressif" est quasiment sacré. Sans doute parce que ça rend tes émotions légitimes. Tu souffre d'une "maladie mentale", tu as été diagnostiqué, donc c'est normal d'être comme ça, tu en as le droit. Mais d'un autre côté, je doute qu'être considéré comme malade soit agréable. Quoiqu'il en soit, je n'ai jamais vu de spécialiste, je ne peut donc pas m'affirmer dépressif. Et le fait d'être "seulement triste", rétrograde mon sentiment de vide profond à une simple phase passagère, quelque chose d'insignifiant, une goutte d'eau de "pseudo-douleur" dans l'océan de malheur du monde. Après tout, certains ne peuvent pas se nourir, et d'autres sont tués, persécutés sans raisons valables. En quoi ai-je le droit de me plaindre de mon sort ? Même ma tristesse est inférieure.

Une des caractéristiques de cette "tristesse", c'est l'infériorité. Je vaut moins que les autres. Chaque jour, je me regarde dans le miroir, et je suis inférieur sur un nouveau point: le physique, le mental, la maturité...
C'est quelque chose contre lequel on ne peut pas lutter, et qui est de plus en plus comme une évidence: ce que je dit, fait ou pense n'intéresse pas les autres, parce que je suis inférieur. Ces mêmes autres ne me regarde pas, parce que mon corps et mon visage sont laids. Je suis stupide, et je dis des choses avant de réfléchir. Ce sont les autres qui ont raison, je dois simplement écouter et me taire. Me tenir à l'écart, ne pas me faire remarquer parce que j'ai déjà énormément de chance qu'ils m'acceptent parmi eux.
C'est un cercle vicieux: on a pas confiance en soi, donc on perd confiance en soi. Résulat: on s'isole, on coupe les liens, on se met à l'écart. Et on a coupé un des fils qui nous tenaient à la vie.

Aussi, cette "tristesse" rend apathique.
Tout ce qui nous plaisait, paraît sans intérêt, morne, inutile. On abandonne nos passions qui paraissent inutiles et sans intérêt, et ça créé un grand vide. On fini par n'avoir plus envie de rien. Le matin, se lever du lit devient un défi de plus en plus dur. En cours, se concentrer est impossible. Le contact social est insupportable. Les week-ends et pendant les vacances, on reste cloué au lit à regarder le plafond. Quand quelqu'un rentre, on prétend dormir, mais le sommeil vient jamais, l'esprit étant trop encombré. Avec ce vide dans le cœur, on vit au ralenti, et même les tâches les plus simples deviennent insurmontables. Ranger, se laver, se brosser les dents, s'habiller. On arrête de manger, parce qu'on oublie de s'alimenter, parce qu'on le mérite pas. On se laisse mourir à petit feu.

Le plus dûr, quand on se sent mal, c'est justement d'aller mal. Le monde nous fait bouffer à la pelle des citations de bonheur débiles "le bonheur n'est pas un but à atteindre, c'est un mode de vie". Ce genre de citations font du bien la première fois qu'on les entend. Et puis tu te reprends la vérité en pleine poire deux minutes après. La vérité, c'est que ces citations dégoulinantes de bonheur niais me font me sentir coupable. Je suis coupable de ne pas être capable d'être heureux, alors que tout le monde me dit comment l'être, alors que ça a l'air si simple. Je suis coupable de voir toujours la coupe à moitié vide, et jamais à moitié pleine. Je suis coupable de mes émotions, coupable de ma vie, de ce que je ressent, je suis coupable à cause de qui je suis. Coupable ne pas pouvoir guérir. Coupable de ne pas vraiment le chercher.

Quand on va mal comme ça, qu'on est vide, qu'on se sent coupable, qu'on ne trouve intérêt à rien, qu'on est inférieur aux autres et qu'on n'a juste plus goût à la vie et que celle si ne paraît plus nous aimer non plus, une solution apparaît, comme une évidence, c'est LA solution à tous nos problèmes, la seule, l'unique, le remède miracle. Mourir.
Mais mourir n'est pas chose aisée.
Autant à cause des autres que de soi-même.
J'ai peur de mourir. Autant, si ce n'est plus que j'ai peur de vivre. Ce n'est pas que je veux mourir, c'est que je dois mourir, parce que tout ira mieux. Parce que tout s'arrêtera là.

mes MOTS sont TERNESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant