15. Nestor et la sociabilité en soirée

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15. Nestor et la sociabilité en soirée

Comme l'ironie du sort avait un sens de l'humour presque aussi drôle que celui d'Aglaé, Nestor se retrouvait à la porte d'entrée pour accueillir les gens. La plupart venait en couple, d'autres bras dessus, bras dessous entre "amis" car s'il y avait une fille dans le groupe, l'un des mecs espérait finir la soirée en lui roulant un patin. Dommage, la Saint-Valentin, c'était mercredi.
Le lycée avait accepté cette fête de la Saint-Valentin mais comme le quatorze février tombait en milieu de semaine, la direction avait exigé qu'Alya la fasse le vendredi soir. Raison simple : éviter les dormeurs en cours le jeudi matin et ceux qui décuvaient parce que personne n'était dupe, pas même la direction, certains ne resteraient pas sobres longtemps voire ne le seraient pas en début de soirée.

Bref, pendant qu'Alya organisait les festivités à l'intérieur, Nestor se les gelait dehors, tout seul avec son bras plâtré. Il regarda les dessins et les petits mots gribouillés par ses proches dessus à la lueur tremblante des lampes incrustées dans le mur. Le temps passa et la neige commença à tomber faiblement. Ne voyant plus personne à l'horizon, Nestor rentra pour s'abriter.

"Je te cherchais partout, l'aborda Aglaé.

-Si tu avais suivi un minimum les réunions, tu aurais su que j'étais assigné au rôle du videur.

-Pas faux, concéda Aglaé. Bref, viens !"

Elle le tira par le bras comme à son habitude. Ils ne se connaissaient pas depuis des années mais Nestor commençait à bien connaître les manies de son amie.

"Qu'est-ce qu'il y a ?

-Viens je te dis.

-Ok, abandonna-t-il. Tu es pénible quand tu fais ça, tu le sais.

-Je sais. Si tu n'es pas content, tant pis pour ta pomme."

Aglaé le traina jusqu'à une table où se trouvait des petits fours.

"Tu dois goûter ça, lui dit-elle en lui fourrant un mini cake dans la bouche. C'est trop bon, hein ?

-Tu me cherchais pour me faire manger un morceau de cake ?

-Oui et ?

-Tu devrais revoir l'ordre de tes priorités.

-Fait pas des références quand tu me critiques. Alors tu en penses quoi ?

-Tu as de la chance que ce soit bon."

Aglaé poussa un cri de victoire puis elle partit danser en entendant sa chanson préférée, laissant Nestor planté au milieu d'une soirée avec son niveau de sociabilité nul. Malgré les croyances de sa jumelle à ce sujet, comme quoi il s'était amélioré (enfin, il ne trouvait pas vraiment où elle avait vu ça), Nestor restait persuadé que sa place se trouvait près de la porte de sortie.

"Hey, l'interpella une voix inconnue. Hey."

Nestor se retourna et découvrit un mec déjà bourré qui s'approchait de lui.

"S'cuse ! T'sais où sont les chiottes ? lui demanda-t-il avec le regard vitreux.

-Au fond du couloir, répondit Nestor en s'éloignant pour éviter de sentir son haleine aux effleuves d'alcool et de tabac.

-Cimer."

Nestor eut pitié de lui. Il ne comprenait pas pourquoi les gens de son âge ne pouvaient s'amuser qu'en étant bourrés ou drogués, voire les deux. Bien entendu, il savait que ce n'était pas la majorité, que certains buvaient raisonnablement, que d'autres n'aimaient pas l'alcool ni la clope. Pourtant, c'étaient ceux qui se faisaient remarquer en créant des histoires qui emportaient l'opinion des adultes et des médias : la minorité, les ados stupides qui avaient décidés que devenir dépendants de la cigarette à treize ans était stylé. Nestor avait vraiment pitié pour eux.

L'amour est un pissenlitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant