11. Nestor et le garçon aux yeux vairons.

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11. Nestor et le garçon aux yeux vairons

Depuis l'incident de l'arrivée impromptue de la petite amie d'Urbain, Nestor n'avait pas revu ce dernier. À vrai dire, il craignait de s'être imaginé des choses : peut-être qu'il était dans la nature d'Urbain de prendre la main d'un ami ou de lui sourire. Il était loin d'être expert sur le sujet.
Nestor s'était toujours imaginé que les garçons auxquels il s'intéressait le faisaient en retour. Jamais il n'avait eu de petit copain : sa vie amoureuse était un désert, alors que celle sentimentale était un océan. Les deux ne s'étaient jamais mêlées donc le désert restait sec et l'océan se déchaînait. Son cœur ressemblait à un champ de bataille, ravagé par les dégâts de ses émotions amoureuses.

Et le voilà à nouveau confronté à ce dilemme concernant un garçon qu'il connaissait à peine.

Le téléphone de Nestor sonna, c'était la dixième fois de la journée. Il ne répondit pas et continua de lancer des boulettes en papier depuis son lit dans sa corbeille pour résister et se donner bonne conscience. Ce fut dans un ultime effort qu'il tourna la tête pour voir le nom de la personne qui cherchait à le joindre. Urbain. Il laissa le répondeur prendre le relais plutôt que de faire face à ses soucis sentimentaux.

Salut Nestor ! Ça doit être la dixième fois que je t'appelle aujourd'hui.

- J'ai remarqué, grommela Nestor.

Je commence à me demander si tu n'as plus de batterie ou alors si tu essaies seulement de m'ignorer.

- Pas si dupe que ça apparemment.

Si c'est le cas, prouve-moi que tu as une certaine dignité et explique-moi. Je suis peut-être handicapé d'une jambe, mais mon cerveau fonctionne. Tu ne me tromperas pas Nestor.

- J'aurais bien voulu.

Tu peux faire croire à tout le monde que tu vas bien, mais j'ai vu ton regard quand tu m'as aperçu en train d'embrasser Julie.

- N'importe quoi, soupira Nestor.

Ne le nie pas, je sais reconnaître la peine quand je la vois.
Bref, rappelle-moi si tu as un minimum de confiance. Je suis sûr que c'est le cas.

Le message s'arrêta là. Nestor hésita. Était-ce vraiment une bonne idée ?

Au final, il ne résista pas longtemps : au pire, il aurait encore le cœur brisé, mais au moins, cette fois, il aurait une amie pour le soutenir. Il rappela Urbain pour lui parler de vive voix.

- Allo ?

- Oui, j'ai eu ton message.

- Tu te décides enfin à me parler pour te prouver quelque chose ou ?

- Il faut qu'on se voit, je te dois des explications.

- Oh que oui ! Tu m'en dois !

- Dans une heure, chez toi ?

- Tu sais bien que ma porte est toujours ouverte pour toi.

Nestor raccrocha avec un énorme doute coincé dans la poitrine : qu'allait-il dire à Urbain ? Il ne pouvait décemment lui dire qu'il était amoureux de lui, d'autant que ce n'était pas le cas. On ne tombe pas amoureux en quelques jours de quelqu'un que l'on ne connaît pas. Non, il n'était pas intéressé par Urbain.

L'amour est un pissenlitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant