Chapitre 12 : En chemin

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En média : carte de Palamède

Le vent soulève mes cheveux et le soleil aveugle mes yeux.
Perchée sur cette falaise, je surplombe la vallée, mon foyer.
Les minutes passent, mes pas s'accumulent et me portent vers vous.
Papa, maman, frères, maison ! Me voilà ...

***

Après une rapide inspection quant à la santé de Bahlit qui est très bonne en dépit d'un ongle cassé et de la mienne qui n'a rien d'alarmant si ce n'est quelques égratignures et brûlures, après avoir mangé et tout rangé, après avoir installé Euphron sur une civière de fortune et hissé nos sacs sur nos épaules, nous partons. Enfin !
Intérieurement je jubile, heureuse de retrouver les miens, puis je me rappelle dans quelles circonstances nous y allons et cela me refroidis immédiatement. Je scrute le visage de Caïssa qui marche à mes côtés, ne pouvant observer ni William et Sissa qui portent la civière de Euphron, ni Bahlit qui marche derrière nous.

Cela fait quelques temps que je ne l'ai pas vraiment dévisagée, il me semble même que cela remonte à un autre siècle, et je ne me souvenais plus qu'elle était- et est toujours !-si belle. Tout dans son être n'est que grâce, que ce soit dans le retombé de ses cheveux ou dans la commissure de ses lèvres et, rien que l'espace d'un instant, je l'envie : physiquement, je suis son exacte opposée. Ce n'est pas que je me trouve laide, mais j'ai plutôt l'impression qu'elle est l'incarnation de la beauté et que je ne me plie pas à ces critères. Ses cheveux sont bruns, presque noirs tandis que les miens sont blonds cendrés, sa peau très pâle alors que la mienne est plutôt hâlée, ses lèvres extrêmement rouges tandis que les miennes sont rosées et ses yeux noirs, contrastant avec le gris des miens ; seule notre taille assez basique est semblable. Même si ces caractéristiques qui pourraient rendre son visage dur, tout dans son être n'est que douceur et, même si elle ne possédait pas tous ces atouts, son sourire la rendrait tout de même jolie. Pourtant je n'ai jamais vraiment prêté attention à mon apparence, ni à celle des autres d'ailleurs, je ne me suis jamais trouvé spécialement belle ou repoussante ... Et cela ne dois pas changer, me réprimandais-je. Je n'ai pas le temps de m'occuper de tout cela, et qu'est-ce que ça va m'apporter ? Rien.
Je me reconcentre sur mon amie et prête plus d'intérêt à son expression, cette fois. À mon grand désarroi, son ravissant sourire ne trône plus sur son visage et ses yeux sont éteints. Je repense alors à sa récente confession et, profitant de ce moment d'intimité, tente de lui en reparler :

" Caïssa, tu sembles bien triste ... Est-ce à cause de ce que m'as dit tout à l'heure ?

- Oui, je ... Je n'arrive pas à me persuader d'être utile ... Je suppose que cela viendra.

Elle tourne la tête, coupant ainsi court à la conversation, se murant dans le silence. Je n'en tirerai rien, elle viendra me parler quand elle se sentira prête. Alors, je tourne la tête moi aussi en espérant profiter du paysage. En vain ...
Cette marche aurait pu être agréable si l'herbe n'était pas sèche, si les arbres n'étaient pas nu en plein été, si les fleurs n'étaient pas mortes et piétinées et si les torrents n'étaient pas bruns, quand ils ne sont pas à sec. Même le soleil semble avoir perdu son éclat et le ciel reste morne et gris. Sans compter l'inquiétude au sujet de Euphron qui me ronge. Je crains qu'il ne perde trop de sang, que sa blessure s'infecte et, même si le danger de mort est presque tout à fait écarté, sa jambe n'est pas encore sauvée.
Nous nous arrêtons après deux heures de marche et j'en profite pour nettoyer la plaie qui n'est pas alarmante. J'ai également retrouvé au fin fond de mon sac quelques racines que je fais avaler au blessé afin de le soulager, puis nous repartons et Caïssa et Bahlit prennent le relais en empoignant les manches de la civière.
Je marche avec William et Sissa, qui tente de nous distraire sans grand succès. Nous affichons des airs maussades, chacun est perdu dans ses pensées. Pourtant la conversation reprend lorsque William me demande :

Palamède. I : Le RéveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant