Chapitre 15 : La source

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" Il ne suffit pas de connaître la vérité, il faut encore la proclamer. "

Louis Pasteur

                                             

***

" Est-ce vrai Sissa ?

L'intéressé acquiesce en silence, lui qui est d'habitude si expansif. Il n'a pas l'air très fier de ses cachotteries, même si la question de Caïssa était parfaitement dépourvue de reproches. Bahlit, en revanche, ne l'entend pas de cette oreille ...

- Et qu'attendiez-vous pour nous en parler ? Qui nous dit que vous ne cachez pas autre chose, hein ? Pourquoi devrions-nous vous croire ?

- Bahlit, William a dit la vérité à Aliénor ! De ce fait, tu peux lui faire confiance et à moi aussi. D'ailleurs, n'ai-je pas prouver ma solidarité en laissant William se décider par lui-même sans vous en parler ? Je savais qu'il ferait le bon choix ! Et de toute façon, ce n'était pas à moi de décider ! se défend Sissa.

- Parce que tu  penses vraiment qu'il t'a tout dit ? Ce que tu peux être crédule ! Tu aurais au moins pu nous en parler ! crache Bahlit.

Il aurait sûrement continué ainsi si William n'avait pas abattu son poing sur la table autour de laquelle nous déjeunions. Autour de nous, j'aperçois quelques guérisseurs qui se retournent, choqués par le comportement colérique de ces étrangers. Il faut dire que ici, bagarre n'est pas un mot fréquemment utilisé. Toujours est-il que William, hors de lui, ne compte pas en  rester là :

- Et si tu cessais de nous interrompre ? Et si tu nous faisais confiance ? Car il ne s'agit pas que de moi, mais de tout le groupe ! Tu es continuellement méfiant, avec tout le monde ! Si j'étais un Rebelle, je t'aurais déjà éliminé dans ton sommeil ! Crois-tu vraiment que, si j'étais un des leurs, je t'aurais aidé avec tes cauchemars ? D'ailleurs, toi non plus tu ne nous as pas parlé de tes mauvais rêves !

Il se tait et le regarde, droit dans les yeux. Bahlit, lui, se lève brusquement envoyant valser fruits, jus, et pains de toutes sortes de parts et d'autres. Un juron m'échappe, car je ne peux retenir ma colère : des guérisseurs ont passé du temps à préparer tous ces mets et se sont privés pour nous offrir ce déjeuner. La fureur doit se lire sur mon visage car William, d'un air contrit, s'excuse puis disparaît à son tour. Je me retrouve avec Caïssa et Sissa qui, après m'avoir aidé à ranger et m'avoir accordé quelques paroles de réconfort, partent aussi, me laissant seule.                                 C'est étrange, il y a quelques jours, je rêvais de de solitude et  maintenant, un grand vide m'envahit. Il y en a un autre qui doit se sentir bien seul : je n'ai pas encore été voir Euphron.   J'ai honte  quand j'y pense : il est en compagnie de parfaits étrangers depuis hier soir et nous, ses alliés, n'avons pas même pris de ses nouvelles. Alors, sans réfléchir, je me rends à l'entrée du  village, où se trouve les pensionnaires en état critique.

- Bonjour Ludivine !

- Oh, Aliénor ! Je dois avouer que je n'ai jamais été aussi heureuse de te voir ! Mais je suppose que tu n'es pas venu ici pour bavarder, ajoute-t-elle avec un clin d'oeil. Ton ami est dans cette chambre.

Je m'empresse de remercier mon camarade de longue date, puis me dirige vers la  chambre indiquée, au bout du couloir. J'entre dedans, appréciant la lumière du soleil filtrée par de simples rideaux, les bouquets disposés et les couleurs apaisantes des murs. Allongé sur un lit moelleux, la jambe droite surélevée, Euphron me sourit, l'air fatigué.

Palamède. I : Le RéveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant