J'ai veillé sur toi

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- « Ah... ma tête...
- Tu es réveillée Princesse...
- J'ai mal...
- Attends... Tiens... Prends ce médicament...
- Qu'est-ce que c'est ?
- Juste du paracétamol, ne t'inquiète pas... »

Anna avale le liquide effervescent. Beurk... ce goût est affreux. Elle ne l'a jamais aimé ! Après avoir avalé cet horrible breuvage, elle se rend compte que ses vêtements ne sont plus les mêmes.

- « Qu'est-ce que tu as fait ?... Où est ma robe?
- Noooon... Ne t'en fais... Pardon... Ce n'était pas de ma faute... C'est elle...
- De qui tu parles?...De quoi tu parles?...
- Elle m'a forcé à le faire...
- À faire quoi?
- À te droguer une nouvelle fois... je ne voulais pas le faire...
- Mais pourquoi ?...
- Elle voulait me tester encore une fois...
- Tu ne m'as rien fait de mal?
- J'ai veillé sur toi toute la nuit, je te promets ! Comme une mère poule!
- Et ma robe ?
- Oui, c'est vrai... J'ai dû te l'enlever pour te mettre cette jolie chemise de nuit. Mais je n'ai rien fait d'autre ... elle voulait me tester... voir si j'étais capable...
- Capable de quoi ?
- De veiller sur toi... »

Anna ne comprend rien à toute cette histoire ! « Un schizo! Mince! » Maintenant, elle sait qu'ils ne sont plus deux mais trois! Deux visibles et une invisible pour elle!

- « Je voudrais retourner à la cave... s'il-te-plaît ?
- Non, Judith... reste un peu...
- Dis-moi qui est « elle »?
-   C'est ma mère bien sûr !
-  S'il-te-plait , descends-moi à la cave... »

Robert l'autorise à retourner à la cave. Ils descendent tous les deux sans parler. Arrivés dans la petite pièce, Anna voit la télé qui est installée.

- « J'ai quand même pris le temps de te la descendre et de l'installer mais je t'ai protégé tout le reste du temps.
- Contre quoi?
- Je t'ai protégé, c'est tout!.. Je vais me préparer, je travaille aujourd'hui. Tu n'as rien mangé ce matin.
- Je n'ai pas faim... je suis fatiguée.
- Repose-toi. Je reviendrai avec un bon repas . Il y a des fruits sur la table. Regarde un bon film.
- Au revoir.
-  À plus tard ma jolie... »

Et il sort de la pièce. Anna court à la douche. Et sous la douche, elle pleure. Elle, qui espérait pouvoir s'enfuir ! Une prison dans une autre prison! Elle se sent prise au piège plus que jamais ! Après sa douche, elle met un jean et un pull et des chaussettes et se glisse dans le lit sous la couette. Elle se sent en colère et si triste. Comment va-t-elle pouvoir sortir d'ici ? Et elle se sent si vide aussi !... Tellement que son ventre la rappelle à la vie! Elle mange une pomme. Son regard se porte sur les livres de seconde que Robert a acheté. Elle en prend un et commence à étudier le programme d'histoire de la première année de lycée qu'elle est en train de perdre. Elle fait des exercices de maths. Se corrige toute seule grâce aux corrigés. La matinée passe. Et de même pour le début d'après-midi. La porte s'ouvre.

- « Me revoilà avec ton déjeuner. Des lentilles et des saucisses ! J'espère que tu vas aimer! C'est simple mais je crois que c'est réussi.
- Merci.
- Tu dois avoir faim.
- Oui.
- J'étais très content de t'avoir vu apprécier le repas que je t'ai préparé hier. "

Anna commence à manger. Robert se sert une assiette.

- « Je vais t'accompagner. J'ai envie de déjeuner avec toi!
- Je voudrais savoir...
- Oui?... Dis-moi... J'aime quand tu me parles!
- Est-ce que ta mère est avec nous?...
- Non... Parfois... En fait, j'aimerais qu'elle n'y soit pas! Elle n'est pas toujours présente...
- Elle était méchante avec toi quand tu étais petit ?
- Non, pas du tout ! Ma mère a veillé sur moi jusqu'à ce qu'elle parte. J'étais un enfant malade jusqu'à mes cinq ans. Elle passait ses nuits à mes côtés. Il y avait une très grande fusion entre nous. Je ne mangeais rien. Et elle se donnait beaucoup de peines pour me faire des bons petits plats.
- Mais pourquoi tu as dit qu'elle te
testait et qu'il fallait que tu me protèges ? Est-ce d'elle ?
- Parce qu'elle a toujours fait ça ! Elle n'a jamais aimé me voir heureux avec quelqu'un d'autre et hier soir, j'étais heureux! Parlons d'autres choses ! »

Anna ne comprend toujours rien. Et n'a plus envie de parler. Robert le constate et ne sait comment réagir. Quand tout à coup, elle voit le visage de Robert changer et il se lève brusquement...

- « Non, maman, non! Laisse-moi! »

Il se tient la tête et la regarde d'un regard noir. Anna a peur. Elle va se cacher dans la salle d'eau. Mais il n'y a pas de clé à la serrure. Elle s'assoit accroupie contre la porte. Et elle l'entend.

"Non... ce n'était pas de ma faute... tu m'as poussé à le faire. Laisse-moi... Je ne suis pas un menteur ! C'était un accident ! "

Anna entend du bruit comme s'il avait soulevé la table et que tout était tombé par terre. Les assiettes, les couverts, les verres, les lentilles et les saucisses s'étalent sur le sol. Un énorme vacarme et puis, plus rien ! Le silence... Quand tout à coup, il revient à lui.

- " Judith...Judith... Où es-tu ? Oh non! Qu'est-ce que j'ai fait ! "

Il se dirige alors vers la salle d'eau. La porte est bloquée par le corps d'Anna qui appuie de toutes ses forces! Mais elle n'est pas assez forte pour résister longtemps. Robert pénètre dans la petite pièce. Elle est tremblante !

- « Mille excuses... Je ne voulais pas te faire peur... je vais tout nettoyer. Viens je vais te mettre un film pendant que je répare mes bêtises... »

Il la soulève et l'installe dans son lit en face de la télé. Il choisit un film. Et le met en route. Ensuite, il ouvre le placard à balais et commence à nettoyer. Anna voit le bloc de papier sur lequel elle a fait ses exercices de maths et se dit qu'elle va écrire un message d'appel à l'aide. Elle en fera une boule et espère pouvoir la mettre dans le sac poubelle. Elle commence à écrire dès qu'il tourne le dos.

"Aidez-moi. Kidnappée. Il est cuisinier. Se fait appelé Robert Friton. Anna Fournier"

Elle fait une boule de papier. Et fait un coeur sur deux parties visibles de sorte à interpeller quelqu'un au centre de tri. Anna demande si elle peut accéder aux toilettes. Robert l'autorise à y aller et elle laisse tomber la boule dans le sac poubelle. À son retour, le sol est mouillé mais propre. Elle fait attention à ne pas glisser et se remet devant le film. Robert s'approche d'elle. Il s'assoit sur le bord du lit.

- « Ce n'était pas de ma faute...
Elle s'était emportée encore une fois. Elle disait que je n'étais pas capable d'être amoureux d'une femme et de m'occuper d'elle...  En vrai, elle voulait surtout que je ne m'occupe que d'elle ! J'avais une amie... elle était tombée enceinte... ma mère l'a appris... elle l'a forcée à avorter en lui racontant tout un tas de choses ! Elle lui a raconté des choses horribles. Et pour finir, on s'est séparés. En me quittant, ma compagne avait dit quelque chose comme: « tu n'es pas sain, tu n'es pas fiable, etc ». Quand j'ai appris ce que ma mère lui avait raconté ... je me suis énervé et je l'ai poussée... elle est tombée et sa tête a tapé contre le bord de la table base. J'ai emporté son corps à la montagne. On a un petit chalet dans un bois. J'ai creusé un trou et l'y ai mise. Je n'ai jamais déclaré son décès. Je paye toutes ses factures. Voilà... Tu sais tout. Ce n'était pas de ma faute... je te protégerai d'elle... N'aies pas peur... Elle n'est plus là... On n'est que tous les deux maintenant ! Je crois qu'elle voulait juste que tu saches qu'elle faisait partie de moi... »

Anna ne savait pas quoi dire. Un schizophrène et un assassin en plus! Une mère folle qui n'est plus là mais qui fait toujours des siennes ! « Au secours ! Pourvu que son mot en boule puisse l'aider ! Il faudra tenir encore un peu... »

Mamie Aquarelle Où les histoires vivent. Découvrez maintenant