Mercredi 18 juillet 2018,
tard dans l'après-midi,
tôt le soir.Salut,
El'.La fête est à son comble ce soir : mes grands-parents s'engueulent comme à leur habitude. Rectification, ma grand-mère gueule sur mon grand-père comme à son habitude et quant à lui, il essaie de répliquer comme il le peut, c'est à dire pas beaucoup. Mon frère, lui, s'occupe de vider la planète d'eau et d'assoiffer encore plus d'individus en se faisant un petit bain tranquille, pour le fun.
Meurtrier.
Ma mère, elle, est en train d'aider à vider l'ancienne maison d'un tonton mort depuis des années qui avait des milliers d'autographes, de photos, de cassettes, d'affiches de films et de babioles non identifiées.
Il était surnommé Monsieur Cinéma, et j'adorais ce tonton artiste et fou complètement décalé des autres adultes que j'avais l'habitude de voir. Il s'appelait Claude Blazy, et c'était le frère de mon arrière grand-mère, tu sais, celle que j'aimais tant et qui est morte il y a presque un an. En le lisant comme ça, on me croirait totalement détachée, limite ironique. Mais c'est pas le cas, je crois juste que je me suis lassée de toutes ces histoires de famille. Et encore si celle-ci était un tant soit peu intéressante, j'veux bien, mais pour le coup elle est simplement chiante et ça me prend drôlement la tête. Bien entendu, je parle encore de ma famille.
Si ma mère est partie aider à vider, c'est pour la simple et bonne raison qu'ils vont vendre cette maison. Pourquoi ? Le fric, tout simplement. L'argent gâche des vies, parce que les gens s'accrochent comme ils peuvent à ces bouts de papier, alors peu importe qu'ils en aient ou non, ils rapporteront tout à ça. L'argent, l'argent, l'argent. Y'a que ça qui existe, au final. C'est ce qui résume leur vie, en fait.
Pourquoi je suis énervée ? Parce que mon père souhaitait racheter cette maison, il s'était proposé il y a pas mal de temps déjà. Mais, vois-tu, il fallait d'abord s'assurer de ne pas perdre un centime. C'est pas comme si mon père faisait parti de la famille, après tout.
Voilà pourquoi nous dirons adieu à deux maisons cette année. Autant, la maison de mon arrière grand-mère, je n'aurais pas pu y remettre les pieds sans elle. Mais, la maison de mon oncle ? Celle où ils ont grandi, l'histoire de leur vie ? Au revoir, bye.
Plus rien.
Ils vont vendre sa vie, ses affaires, ils vont vider sa maison que des inconnus se plairont à détruire.
Comme tu as pu le constater, c'est la fête ici.
La vraie question est : pourquoi je t'écris à toi maintenant ? Je ne suis pas sûre d'avoir une réponse, peut-être tout simplement que les gens aiment s'écrire à eux-même, ou à leur conscience, tu vois, à quelqu'un qui n'existe pas vraiment. Et peut-être aussi que tu es ma petite conscience, je n'en sais rien pourquoi tu es devenue la personne à qui je devais écrire automatiquement.
Je n'aurai donc aucune réponse à t'apporter, peut-être simplement des suppositions qui ne seront même pas fondées.
C'était sympa de t'écrire, tu sais.
Salut.
Sar'.