Chapitre 18: Fanny.

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Fanny

Minuit. Il est l'heure.

Mes mains tremblent, beaucoup trop. Ma respiration se fait moins régulière, bien que j'essaie de la contrôler. Mon cerveau est trop débordé d'informations pour laisser place au calme. Je suis en panique.

Il fait nuit noire et les alentours sont légèrement éclairés par la pleine lune. Des branches de sapins griffent mes bras dénudés, mais je m'en moque. Je ne sais pas exactement où je vais, mais j'y vais.

J'avance. J'avance parce que je n'ai pas d'autres choix. Parce que je n'ai plus personne. Tommy et Zack sont tout deux dans leur école de formation de cyber-guerre. Ils sont forts en informatique, bien plus que la moyenne, alors ils en ont profité.

Mon père, lui... Puis-je encore l'appeller ainsi, après ce qu'il a fait ? Je ne pense pas, je n'y arrive pas.

Je double le rythme, certainement pour fuir la réalité. Ma réalité.

Stelly. Cela fait plusieurs semaines que je n'ai plus de ses nouvelles. Je ne sais rien de ce qu'elle vit, d'où elle est exactement, de comment elle va. Tout ce que je sais, c'est ce que tout le monde sait. L'essentiel, en fait. « Les futurs combattants de l'année 2590 sont dans une espèce de camp, où ils sont formés et analysés. Ta sœur y est aussi, mais ils m'ont promis qu'ils vont bien. Tous.». Voilà les uniques phrases que m'a dites mon père, le jour où je n'ai plus vu revenir ma sœur aînée après sa journée de cours. Depuis, je tente d'oublier. Je tente d'oublier toutes ces rumeurs qu'on raconte, ici, comme dans les villes. Pas qu'elles me fassent peur, elles m'effraient.

J'aimerais tant prendre sa place. Elle, au moins, saurait quoi faire à la mienne. Et moi, je subirais toutes ces choses horribles que je suis persuadée qu'il se passe, là bas.

Elle me manque, indéniablement. Et je l'aime, bien que je ne lui ai jamais dit depuis plusieurs années.

— Fanny, putain, attend moi !

Je me retourne, et je le vois. Dan. Ou autrement dit, le brun ténébreux qui me sert de voisin au village.

— Je t'avais dit de ne pas me suivre, Dan ! je m'écris, énervée qu'il m'est ainsi désobéit.

— Pourquoi tu pleures ? il ignore ma réflexion.

Je fronce les sourcils. Je ne m'en étais même pas rendue compte. Pleurer est devenue un quotidien, depuis son départ. Alors je n'y prête plus autant d'importance.

— Tu pensais à Stelly. Ou à ton père.

Puis, voyant que je ne réponds pas, il insiste:

— Je me trompe ?

— Non.

Maintenant qu'il a eu sa réponse, je peux m'en aller. Alors je continue, d'une marche que je voudrais déterminée. Le vent fouette mon visage, et je devine que le temps se gâte. Ce n'est pas grave, j'ai l'habitude de me réfugier dans la nature, surtout la nuit. Le froid ne me donne plus autant l'impression qu'il me mord la peau, et les éclairs ne me surprennent plus.

Et puis de toute façon, rien ne pourrait m'arrêter. Pas aujourd'hui, pas en cette nuit. Je suis au tournant de mon histoire, je ne reculerai devant rien.

Les pas de Dan se rapproche, avant qu'il ne se positionne à ma hauteur.

— Hé ! Attends moi, Fa' ! T'es malade de marcher si vite, j'en ai un point de côté, merde !

— Tu n'as qu'à pas me suivre.

— Je ne t'abandonnerai pas, je te l'ai déjà dis. Je suis ton compagnon de galères, et je compte le rester.

Year 2590Où les histoires vivent. Découvrez maintenant