Alors que cela faisait au moins cinq années qu'ils n'avaient pas mis les pieds chez leur gendre, grand-père Mamadou et grand-mère Aïssatou étaient revenus en ville avec la ferme intention d'empêcher le mariage. Ils n'étaient pas prêts de quitter tant que les choses ne seraient pas mises au clair. Dès leur arrivée, ils avaient appelé la petite famille, à l'exception de Bineta, à une discussion sérieuse. Lors de cette petite réunion, ils tinrent un discours on ne peut plus radical par rapport à leur position sur la question.
-Pathé cette situation nous incommode au plus haut point. Dit grand-père Mamadou
Il régnait un silence de mort dans la pièce. Le seul bruit qui pouvait être distingué était celui produit par le ventilateur, malgré la présence duquel une chaleur insupportable semblait accablée le petit monde.
-Nous n'aurions jamais fait le déplacement si cela ne nous tenait pas vraiment à cœur. Reprit grand-père
-Effectivement (en hocha la tête). Confirma grand-mère Aïssatou
-Alors je ne vais pas y aller par le dos de la cuillère... je n'accepterais jamais que ma petite fille soit mariée à un homme issu d'une telle famille. C'est un sacrilège... rien que d'y penser attire sur soi les foudres des ancêtres. Evitons d'être à l'origine de leur courroux (il se tut et détourna le regard)
Toutes les peurs de Mariam venaient de se confirmer, elle manqua de peu de s'évanouir. Pourquoi est-ce que j'ai des parents pareils ? Pourquoi est-ce qu'ils ont une vision si bornée des choses ? se demandait-elle
-Mariam, qu'est-ce qu'on t'a appris ? Où sont passées les valeurs que nous t'avons inculquées ? Demanda de manière rhétorique grand-mère Aïssatou qui allait aussi dire ses quatre vérités.
Mariam avait le regard vide, elle ne fit même pas l'effort de répondre à cette question. Elle n'avait en réalité jamais cru en ces choses. Elle n'était pas d'accord avec la décision de ses parents sur le cas de Fatou et Moustapha. Elle ne pouvait malheureusement alors manifester sa réprobation d'autant qu'elle respecte profondément ses parents et leur a toujours obéi au doigt et à l'œil.
-Mariam tu n'as jamais remise en question nos recommandations et choix, alors ce n'est pas aujourd'hui que tu vas commencer. Reprit-elle... Quant à toi Pathé, je connais bien ta famille, je sais que jamais elle ne permettrait une telle chose. Ne faites surtout pas une chose que vous risquez de regretter le restant de votre vie.
Pathé était pour le moins embarrassé mais il fallait qu'il parle et que sa position soit claire pour tout le monde. Sa fille était tout ce qu'il avait, son épanouissement était au centre de ses préoccupations d'autant plus qu'elle fut éprouvée comme rarement des filles de son âge ne l'étaient. Il ne comptait tout bonnement pas la rendre encore plus malheureuse qu'elle ne l'était. Il prit alors un profond souffle pour parler en termes clairs...
-Maman Aïssatou, Papa Mamadou mon respect pour vous restera pour toujours inchangé. Sachez que j'ai toujours pris en considération vos positions dans tous les cas que nous avons eu à vous exposer. Mais cette fois-ci je ne puis voir les choses de la même manière que vous.
Mamadou n'en crut pas ses oreilles... Il sursauta et fit peur à Mariam. Elle connaissait bien son père, dans ses souvenirs c'était un homme opiniâtre qui refusait toute vision opposée à la sienne sur plusieurs questions.
-Pathé qu'est-ce qui t'arrive ? Tu as perdu la raison ou quoi ? Mariam, qu'est-il arrivé à ton mari ? Questionna grand-mère Aïssatou
Mariam était restée coite, elle n'avait jamais osé tenir tête à son père. Elle tremblait comme jamais cela ne lui était arrivé. Grand-mère Aïssatou avait sa tête entre les mains, comme s'il lui fallait plus que son cou pour la supporter. L'atmosphère était tendue et on pouvait sentir la tension montée. Grand-père ne pouvait toujours pas reprendre la parole, sa surprise le laissa sans voix. Mais il essaya malgré tout de garder son calme pour pouvoir ramener Pathé à la raison.
-Pathé, Bineta est ta fille, on n'en disconvient pas. Mais elle est aussi notre fille, nous avons le droit de décider de ce qui est bien pour la famille et par conséquent pour elle... J'en ai fini avec cette discussion. Ce mariage n'aura pas lieu et c'est tout. Aïssatou suit moi, ordonna-t-il à grand-mère.
Ils quittèrent ainsi Mariam et son mari, qui assis côte à côte se lançaient des regards furtifs. Ils ne parlaient pas mais avaient les mêmes pensées. A quoi serons-nous confrontés pendant qu'ils seront présents sous notre toit ? Notre quiétude habituelle risque de ne plus être qu'un lointain souvenir... Pourvu qu'ils se ravisent ! Ô mon Dieu.
Une fois dans leur chambre Aïssatou suggéra d'appeler les parents de Pathé. Ils sont raisonnables disait-elle, ils seront favorables à notre décision. Mamadou composa le numéro de Diadji, le père de Pathé.
-Bonjour Diadji, tu te portes bien j'espère ainsi que toute la famille ?
-Je vais bien...
Mamadou évita les platitudes habituelles pour aller directement à l'essentiel.
-Je suis présentement chez Pathé... avec Aïssatou, nous avons fait le déplacement pour tenter de le raisonner... expliqua grand-père Mamadou
-Par rapport au mariage de sa fille, je parie. Dit Diadji
-C'est ça ... (Diadji ne le laissa pas continuer)
-Je croyais qu'on en avait fini avec cette histoire ; J'ai été clair avec lui. J'ai appelé Pathé pour lui faire savoir qu'il était hors de question que ces gens (la famille d'Abdou) souillent notre sang. Son grand-père ne l'accepterait pas, aucun de ses aïeux ne l'aurait accepté alors qu'on en parle plus. C'est ça que je lui avais dit.
-Il s'entête et persiste dans sa bêtise. Il m'a fait savoir qu'il approuve cette... cette abomination... Il faut qu'il revienne à la raison
-Il a toujours été un bon fils, il ne m'a jamais contrarié. Je ne pense pas qu'il le fasse aujourd'hui. Laisse-moi lui parler, je sais qu'il m'écoutera...
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L'histoire de Bineta
Short StoryBineta est une fille sénégalaise. Il lui arriva un événement qui bouleversa toute sa vie. Mais elle est une fille forte (enfin c'est ce dont elle s'est convaincue), donc elle décida de braver les épreuves. J'ai mis "épreuve" au pluriel parce qu'elle...