Chapitre 32 - L'ami qui m'a trahi

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Alanah et Ryan se trouvaient à présent complètement seuls dans la pièce. Plus à même de se confier à son ami qu'à Démolian, elle n'hésita pas à lui poser la question qui hantait ses pensées depuis plusieurs minutes.

—Dis-moi que tu veux le piéger ! Fit-elle d'une voix tremblante. Dis-moi que ce n'est qu'un subterfuge pour le tuer ?

Elle insista encore mais voyant qu'il ne donnait pas de réponse, elle dut insister.

—Ryan ?

—Non.

—Non quoi ?

—Non, ce n'est pas un subterfuge pour le piéger. Si c'était le cas, il l'aurait déjà vu et je serais mort. Il est loin d'être stupide.

Il la fixa un instant, en silence. Impassible, il se mit à continuer son discours et les seuls mots qu'Alanah retint furent les derniers.

—Arrêtes de te croire supérieur aux autres et de vouloir faire tourner le monde à ta façon. C'est franchement agaçant. Les autres aussi ont des opinions. Mais tu ne sais pas écouter.

—Heureusement que je ne t'ai pas écouté alors, grogna-t-elle en proie à une fureur démentielle. Et je sais que tu joues la comédie ! espéra-t-elle encore.

Il s'approcha, son visage placé à quinze centimètres du sien. Son souffle lui chatouilla le visage. Ses lèvres s'entrouvrirent légèrement, comme s'il tentait de lui faire comprendre quelque chose. Ou alors de...

—C'est la vérité ! Je suis de son côté.

Alanah sonda plus profondément son regard et découvrit une haine grandissante. Une rage meurtrière qu'il s'évertuait à assouvir. Depuis qu'il l'avait quitté, il n'était plus ce garçon qui piquait son livre et qui parlait pour un rien.

—Pourquoi tu l'as rejoint ? Tu n'as pas pu le faire de ta propre volonté !

—Si. Tu te trompes. Je voulais m'allier à lui, répondit-il d'une voix étrangement douce. Je ne voulais pas y passer à cause de ta stupidité.

Alanah surprit une main baladeuse et chaude en bas de son dos. Elle glissa vers le creux de ses reins. Ryan en profitait grassement pour se rapprocher d'elle, ce qui fit monter la colère au fond de son cœur. Il était impossible qu'il soit devenu aussi détestable. Il était forcé de le faire bien qu'il ne l'avoue pas. Elle l'aimait beaucoup. C'était un ami, enfin elle le croyait.

—Que fais-tu ?

Ryan s'interrompit, pensant qu'elle parlait d'autre chose.

—Ne me touche pas ! souffla-t-elle dégoûtée. Je t'interdis de me toucher tant que tu ne m'auras pas expliqué ce que tu fais !

Sa main disparue subitement, mais sa tête ne s'éloigna pas pour autant. Il désirait ardemment l'avoir elle ! Son regard brûlant voulait tout dire. Il s'était permis ce genre d'écart la fois où elle l'avait rencontré. Ce jour-là, il n'avait fait que la regarder. Le même. Au début, elle n'avait pas compris. Il l'aimait ?

—Tu es une fille naïve Al !

—C'est Alanah ! rectifia la jeune femme énervée. Mes amis ont le droit de m'appeler Al. Toi, tu mérites de crever.

—Tu es bête. Tout ne se passe pas comme dans tes fichus bouquins comme tu sembles le croire. Si tu apprenais à découvrir le monde dans lequel tu vis, tu apprendrais beaucoup de chose.

—Comme la meilleure façon d'apprendre à haïr quelqu'un ?

Ryan lui flanqua un coup dans l'estomac, lui coupant la respiration. Ses poumons bloqués, Alanah lutta un moment pour reprendre le contrôle d'elle-même. Elle se crut en train de mourir, une nouvelle fois. Une boule paralysait son diaphragme, dans son thorax, l'empêchant de respirer.

—La manière dont tu le regardes... reprit Ryan, ça m'exaspère !

—De quoi... Tu parles ? Demanda-t-elle en toussant et en s'asphyxiant à cause du manque d'air et du coup porté.

—Tu ne le devines pas ?

Alanah n'aurait pas posé la question si ça avait été le cas.

—La façon dont vous vous regardez, et dont vous vous parlez.

—ça ne répond pas à ma question !

—Depuis qu'il est rentré dans ta vie...

Oui, elle visait juste. Ça façon de parler de Brandon... De la jalousie pure et simple.

Il recommença la manœuvre avant qu'elle n'ait réussi à toucher le graal, lui infligeant deux fois plus de mal. Un filet de bave s'échappa de sa bouche grande ouverte. Ses yeux sortirent de leurs orbites et son ventre se contracta, à bout de souffle.

—Je vois ce qui se passe entre vous. Tu choisis d'être avec lui à cause de cela !

Il saisit son menton entre son pouce et son index et la força à lui tenir tête. Les larmes aux yeux, elle ne put répondre.

—Tu me forçais à faire des choses que je ne voulais pas.

—C'est... pour ça que... tu en viens à me frapper ? demanda-t-elle en cherchant de l'air. C'est minable comme attitude. Tu n'es pas comme ça... Je le sais. Si quelque chose te... dérangeait, il fallait parler.

-DE QUEL DROIT PRETENDS-TU ME CONNAITRE ? hurla-t-il fou de rage. Je t'ai dit ce qui n'allait pas, je me plaignais et tu n'écoutais rien.

Le cœur d'Alanah manqua un battement. Ses oreilles en prirent aussi un coup. En y réfléchissant bien, il disait vrai. Elle ne le connaissait pas et ne savait pas de quoi il était capable.

—Nous sommes ici à cause de toi. Je n'allais tout de même pas rester sans rien faire ! se justifia le jeune homme. Je suis ma raison. Je n'allais pas suivre une personne handicapée, fusse-t-elle jolie.

—Tu t'assures de rester en vie. C'est tout. Tu ne cherches pas à te battre. Tu te contentes de fuir. Tu n'es qu'un...

Alanah aurait sans doute dû fermer son clapet. Plus qu'agacer d'entendre ses quatre vérités, Ryan recommença à lui propulser son poing droit dans le ventre, plusieurs fois d'affilée. Son corps se balança d'avant en arrière, réveillant d'autres maux. Une douce lumière embruma son esprit durant le cours laps de temps où elle ne put plus inspirer un seul atome d'oxygène.

Plus bornée que la moyenne, elle se résigna à croire qu'il n'était pas devenu ce genre d'homme. Qu'il dénicherait un moyen de les sauver. Qu'il jouât son rôle pour que Démolian n'y voie que du feu. Elle était persuadée que son ami allait la libérer pour qu'ils puissent rentrer. Serait-ce se fourvoyer que de le croire ? Non, l'espoir tenait un homme entre les fils de la vie. Sans espoir, il n'y avait rien.

—Pourquoi es-tu là ?

—Il m'a demandé de te convertir. Démolian a de grand projet pour toi. Je peux te l'assurer.

—Quel genre de projet ?

—Tu vas bientôt devenir une femme et faire ce que le destin t'a réservé.

—Ce que le destin m'a réservé ? C'est quoi ton charabia ? Arrête de dire n'importe quoi et expliques moi quelles sont tes véritables intentions. Ce sera plus simple. Il n'y a pas de destin, on provoque soit même son avenir.

Les Immortels - TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant