Les Immortels - TOME 1

Chapitre 37 - Embuscade

Le pas lourd, Brandon s'avança sur le chemin pavé menant à Arlington. Une capuche sur la tête le dissimulait aux yeux des soldats trainants dans les parages. La peur d'être reconnu raidissait ses membres inférieurs. Son envie de courir était telle que Brandon marchait bizarrement. Sa main vola plusieurs fois vers la garde de son épée dans le seul but de se rassurer. Mais il s'attirait aussi les regards de certains voyeurs interloqués.

Cherchant désespérément le moyen de pénétrer dans le château, le jeune homme ne remarqua pas immédiatement que son trajet s'achevait enfin. Une nouvelle fois, il se tenait au pied du palais. Ce monument architectural avait de quoi le surprendre tout autant que la dernière fois. Comment en était-il arrivé à ce point ? Devait-il rentrer ?

Comment pénétrer discrètement tout seul dans l'enceinte du palais ? La dernière fois, Christopher et Cassia l'avaient aidé à créer une diversion. Seul, comment le pourrait-il ?

Démuni, Brandon paniqua légèrement. Il ne voulait pas échouer en étant si près du but. Alanah se trouvait quelque part, entre ses murs. Il avait vaincu le piège tendu par la voyante, alors pas question d'abandonner.

Une servante apparue à sa droite et monta les hautes marches du palais sans le voir. Habillée d'une robe unicolore, cette femme l'aiderait coûte que coûte.

Sans réfléchir, il se mit à la suivre et gagna les cuisines où personnes ne se préoccupa de lui. Ainsi dissimulé, il put réfléchir. Il devait d'abord découvrir où se trouvait la jeune femme, ce qui ne serait pas simple.

**

Le nez en sang, Alanah reprit connaissance. La brume ne se dissipa pas immédiatement. L'envie de dormir était plus forte. Ses côtes suppliaient à la moindre inspiration qu'elle prenait et sa gorge priait pour avoir un peu d'eau fraiche. Incapable de relever la tête tant la fatigue et la faiblesse la neutralisaient, Alanah resta pendue dans le vide, immobile. Tant qu'elle ne bougerait pas, personne ne la remarquerait. Bizarrement, aucune voix, ni aucun bruit ne trahissaient la présence d'un quelconque intrus.

Elle était seule, pour la première fois depuis des jours. Une joie immense l'envahit quelques instants, jusqu'à ce qu'elle se demande ce qui pouvait bien les occuper pour qu'on la laisse tranquille.

Le battant de la porte trembla alors. Voulant faire croire à son hôte qu'elle était toujours inconsciente, Alanah ne releva pas la tête et elle comprit que son visiteur ne refermait pas la porte en question. Que lui voulait-on au juste ? La nourrir ? Elle aurait adoré manger des spaghettis bolognaises.

Était-ce Ryan ?

Le pas pressé, le visiteur courut jusqu'à elle et maugréa des paroles qui la surprirent grandement.

—Mon dieu ! Lança une voix au moment où une voix caressa son visage.

Surprise, elle remua, mais il ne s'agissait pas de son bourreau. C'était Brandon !

Avec difficulté, Alanah releva le museau. La joie mêlée à l'incompréhension fit battre son cœur plus fort. Le jeune homme, blanc comme un linge se tenait à présent face à elle. Que faisait-il là ?

—Qu'est-ce que tu fais là ? murmura-t-elle.

—Je suis venu te libérer.

—Tu...

Il ne le devrait pas ! Elle s'apprêtait à dire un truc lorsque celui-ci lui plaqua sa main géante sur la bouche pour lui intimer le silence.

—Du calme ! souffla-t-il.

—Faut que tu partes, murmura-t-elle encore et encore.

Les cernes aux yeux, le jeune homme se permit de lui lancer un petit sourire de soulagement. Ses mains volèrent ensuite vers ses menottes. Par miracle, il eut le temps de libérer sa main droite avant que Ryan ne les interrompe en les prenant par surprise.

A moitié détachée, Alanah supportait dorénavant tout son poids sur son bras gauche et elle savait pertinemment que ses jambes endormies ne lui seraient d'aucune utilité pour se soutenir.

Brandon dégaina immédiatement sa lame, imité par Ryan, hors de lui. Un combat allait se déchaîner dans cette pièce et elle n'était pas en état de se battre ou d'aider son ami.

—Tu as fait une grave erreur en venant ici ! le menaça Ryan. Je vais te le faire payer.

—Brandon, il faut que tu te sauves ! S'exclama Alanah espérant toujours qu'il puisse se faire la belle.

—Tu devrais te calmer ! lâcha Brandon plutôt mécontent. Qu'est-ce qui t'arrive ?

A présent, Alanah ne comptait plus. S'ils voulaient s'enfuir, Brandon devait le combattre voir le tuer ce qui horrifiait la jeune femme. En fait, elle aimerait partir sans verser le sang. Or plus les minutes passaient, plus elle se disait que ce rêve serait impossible.

Ryan attaqua le premier, assénant un coup plus violent que Brandon para sans difficulté. Le combat acharné commença. Un concert de tintement métallique se répandait en écho tout autour d'eux, agressant les oreilles de la jeune femme habituée jusque-là au silence.

Ni l'un ni l'autre ne lâcheraient prise. Alanah quant à elle, donna le peu de force qui lui restait à se détacher de ses liens pour libérer sa main prisonnière. En forçant, les plaies se rouvrirent et libérèrent un liquide rouge. Son sang lui permit alors de faire glisser l'anneau de fer et de se libérer.

La seconde d'après, le corps d'Alanah s'écrasa sur le sol de pierre froid, incapable de se réceptionner. Elle ne parvint plus à faire le moindre geste. La faim dévorait son estomac. Elle manquait de force et le combat n'était pas encore fini. Il commençait à peine. Alors elle observa.

Tous deux se battaient avec rage. L'un plus expérimenté que l'autre. Mais Ryan avait l'avantage de la force et de l'énergie que Brandon semblait avoir perdu en cours de route. Ryan se campa sur ses appuis, prêt à passer à l'assaut. D'un geste, il attaqua Brandon sur son flanc gauche. Plus futé, Brandon esquiva le coup et assomma Ryan derrière la tête. Le blond chuta sur le sol, dans un bruit mât, inerte. Brandon avait expédié le problème rapidement. Ryan défait, Alanah et Brandon crurent leur calvaire terminé. Loin sans faut, les problèmes continuèrent.

—Bravo ! s'exclama soudain la voix de Démolian frappant ses mains l'une contre l'autre.

La situation ne pourrait pas être pire. Fou de rage, Brandon devint rouge comme une pivoine. Ses poings se fermèrent, faisant blanchir la jointure de ses doigts. Sa rage intérieure était telle que même Alanah redoutait de croiser son regard.

—Tu es venu libérer ma future amie ? fit Demolian moins joyeux. Tu fais une belle erreur. Tu n'aurais pas dû venir.

Un poing d'air frappa Brandon en pleine poitrine et le plaqua contre le mur du fond. Incapable d'esquisser le moindre geste, Brandon hurla de mécontentement, l'arme toujours dans sa main. Alanah n'avait jamais vu la magie d'un sorcier à l'œuvre. Brandon était paralysé, maintenu par un mur invisible qui le tenait à dix centimètres du sol. A présent, elle redoutait de finir de la même façon.