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Journée difficile. Je m'efforce de ne plus chercher son regard.

Je sors par le portail et la vois un peu plus loin.

Je me tape violemment la tête contre le mur.

T. arrive en courant derrière moi, il pose sa main sur mon épaule.

- Mec, ça va ?

Je le regarde

- Non

- Pourquoi ?

- Hier, fin, je suis allé chez elle

- Attends attends : Chez "ELLE" ?

- Oui, bref, et puis y'a eu des problèmes.

Pas envie de m'éterniser.

Et puis elle s'est excusée, mais moi, je...

- Bon écoute je comprends rien à ton histoire. conclusion ?!

- Ben, elle s'est taillée!

- Mais rattrape là p'tit con !

Je souris en me frottant le front, il a raison.

Je me mets à trottiner, pour ne pas avoir l'air ridicule, puis j'accélère, je ne peux plus attendre.

Je cours, le plus vite possible, les gens me regardent, et moi je cours. Mon petit orteil dépassant de ma chaussette trouée souffre des secousses !

Puis je m'arrête.

Je ne la vois plus.

Je me remets à marcher doucement.

Je l'ai ratée !

Puis, au fond du champ de maïs appartenant autrefois à monsieur José, (paix à son âme) je vois quelqu'un assis par terre.

Et si...

Je commence à marcher dans les hautes herbes qui me piquent les jambes mi-couvertes par mon short de foot, mon cœur s'emballe.

La personne se retourne.

C'est elle.

Je me retiens de regarder T. quelques mètres derrière.

Elle se lève.

Je reste immobile.

Je ne sais pas quoi faire.

Je fais un pas en avant et elle se met à courir vers moi, tête baissée.

Elle arrive à mon niveau et choque contre mon torse.

Je manque de tomber par terre !

Je sens son souffle traverser mon tee-shirt.

J'attends un instant.

J'ai mal aux côtes.

Mais ça fait du bien.

Elle recule la tête.

Mon cœur arrête de battre pour se concentrer pleinement sur ses yeux, si magnifiques.

Je voudrais lui dire tant de choses, mais elle me devance...

"- Je savais pas que toi aussi tu...

- Je te l'avais pas dit.

Quelques mèches rebelles voltigent devant son visage. Je passe ma main le long de sa joue pour les ranger derrière ses oreilles. Elle me regarde, comme elle ne m'a jamais regardé. Elle maintient le regard ferme. Je m'enfonce dans ses yeux vert émeraude.

Je l'embrasse sur la joue.

(elle) - Je n'ai pas connu ma mère...

Je la serre plus fort pour la rapprocher de moi et la sentir contre mon torse.

J'imagine alors les même couteaux qui me traversent le cœur à moi la détruisant elle aussi de l'intérieur, ce petit corps faible et innocent.

Je passe ma main dans ses cheveux.

Une larme perle sur sa joue.

- On va se serrer les coudes ok ?

Elle hoche timidement la tête. Je la serre un peu plus fort pour la laisser enfouir son visage dans mon cou.

Elle sent bon.

Je ne veux pas la perdre. Je n'ai jamais confié mes sentiments à personne, quand on confie ses sentiments à quelqu'un, on se rend vulnérable. Quand il connait tes failles, il peut s'y faufiler, pour te faire du mal,

Je ne voulais pas qu'elle me voit comme ça,

Maintenant elle sait qu'elle peut me faire du mal, parce que je tiens à elle. Parce qu'elle me connait trop.

Je pensais pouvoir toujours contrôler mes sentiments, pour éviter de souffrir. Je pensais ne jamais devoir être dépendant de quelqu'un. Mais je me rends compte que certaines personnes sont obligées de rentrer tôt ou tard dans ta vie, qu'à un moment ou a un autre elles feront partie de toi.

Je sais qu'elle me fera souffrir, et tout ça parce que je tiens à elle.

Mais aujourd'hui, sa tête contre la mienne, je ne veux plus me l'interdire.

Parce qu'elle est spéciale, parce que je ne veux pas la perdre, parce qu'aujourd'hui commencent les vacances, qu'elle va me manquer à en crever, parce que je veux qu'elle sache, je me l'autorise.

Parce que sans elle, je crève.

Pour la première fois je suis vulnérable, pour la première fois je laisse VOIR que je le suis, elle a fait un grand pas, à moi de lui répondre. Mon cerveau cherche les mots, ma bouche peine à les faire sortir, je supplie mes cordes vocales de m'aider. Au fond je sais très bien que je n'ai qu'une chose à lui dire.

Je ne peux plus faire marche arrière.

Mon cœur va sortir de ma poitrine !

Je la regarde pour trouver mon courage dans ses yeux.

Je vais lui dire,

Elle va me faire souffrir.

Je le sais.

Mais c'est trop tard.

Alors... tant pis.

- Je t'aime tellement ."

En fuite Où les histoires vivent. Découvrez maintenant