Ma Seconde Naissance [PAUSE]

Je voudrais encore que tu m'aimes

Kissing my song (1996)

« T'en n'as pas marre de te prendre la tête pour des conneries Axelle ? hurle Mél pourtant à quelques centimètres de moi.

- Tu préfèrerais que je m'en foute de toi ? que je ne dise rien ? que je sois indifférente à ton comportement ?

- Mais quel comportement, bon sang ?

- Tu t'éloignes Mél, je le vois, lâché-je plus doucement. En réalité, c'est plutôt moi que tu éloignes de toi. Je... je le sens.

- Tu délires complètement ma pauvre ! me crache t-elle avec colère.

- Qu'est-ce que tu dirais si j'essayais par tous les moyens de cacher ton existence à ma famille ? Sincèrement, Mél, tu ne serais pas blessée ? »

Lui renvoyer ce qu'elle me fait n'a pas l'air de lui plaire. Je le vois à la façon dont elle se tient, dont elle me regarde. Je lis sur son visage qu'elle perd patience, pendant que, moi, je me fragilise à chacun de ses mots.

À cet instant, je crois être la personne qu'elle déteste le plus au monde. Et quoi de plus affreux que de voir autant de haine dans le regard de notre moitié ? Qu'est-ce qui est plus douloureux que de sentir l'être aimé se détacher de nous ? Quoi de pire quand l'amour nous fait nous sentir au plus mal ?

Voilà qu'elle me balance qu'elle ne peut pas me présenter à sa famille, ni même leur parler de moi, et ça ne devrait pas m'impacter ? « Nous sommes libres chez moi et chez toi », a t-elle ajouté comme pour m'inciter à me contenter de ce qu'elle m'offre déjà.

Je voudrais lui demander si, finalement, le problème ne serait pas tout autre : n'aurait-elle pas honte de moi ? N'aurait-elle pas vécu mon blocage lors de nos caresses comme une humiliation ? Cela pourrait expliquer son éloignement, sa prise de distance par rapport à moi, son envie de s'échapper et de me fuir, moi, qui suis si complexe, si étrange. Cela aurait l'avantage de me donner une explication. Sinon, pourquoi agit-elle ainsi ?

Et puis, j'aimerais lui crier que je l'aime, que je suis désolée d'être si pénible, que je m'excuse d'avoir si peur de la perdre. Je voudrais lui dire que j'ai sans cesse besoin de lui montrer l'amour que je ressens pour elle, que j'ai envie de crier au monde entier que je l'aime, que je veux sentir sa main dans la mienne, simplement, sans que l'on se préoccupe du regard des autres. Mais je ne le fais pas. Je sais qu'elle ne parvient pas à me comprendre. Et je crois foncièrement qu'elle n'arrivera jamais à me saisir complètement.

« Et ce n'est pas ce que tu fais peut-être ? répond t-elle enfin.

- Bien sûr que non ! De quoi tu parles ? lui demandé-je en espérant qu'elle ne parle pas de ça.

- Tu ne te souviens pas d'un moment où tu m'as repoussée ?

- Tu... ne... ne me dis pas que tu fais référence à notre première fois ratée ? murmuré-je la gorge nouée en repensant à ce moment.

- C'est exactement ce à quoi je pense, si, affirme t-elle avec froideur.

- Et tu oses me balancer ça, comme ça, en plein milieu d'une discussion ? Alors que tu sais que ça été difficile pour moi ?

- Oublie.

- Tu rêves, maintenant que le sujet est ouvert, allons-y !

- Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? » lance t-elle en s'installant à son bureau sans même me regarder, décidée à arrêter la conversation.

Ne voit-elle pas comment je m'effondre ?

Il faut que je sorte d'ici. Je me sens mal à l'aise, oppressée, démolie. Alors c'est presque machinalement, à la manière d'un robot, que je me lève et me dirige vers la porte d'entrée. Mél daigne à peine lever le regard de son ordinateur. Peut-être n'y accorde t-elle aucune importance ?