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  Louis

La lumière éblouissante des néons et le cris du Commandant me réveillèrent immédiatement. Je m'étirai et massai ma nuque raide.
Commandant : garde à vous !
Tout le monde se mit debout, le dos droit, la tête haute. Je suivis le mouvement pour éviter de me faire frapper à la première heure.
Comandant : à la cantine dans 10 minutes !

Les lavabos qui avaient été placés à notre effet dans un coin du dortoir étaient en piteux état. Il n'y en avait seulement deux pour une vingtaine de personnes. Je tournai la tête et aperçu un homme d'une trentaine d'années assis dans un coin. D'après ce que j'avais entendu rapidement à son sujet, il se faisait appeler "Harry" et avait été une grande star de la pop. Ça me faisait bizarre de le voir réduit à un homme sans notoriété particulière, assis là, parterre, dans la poussière. Son visage me disait vaguement quelque chose puis je me souvins que c'était le gars que j'avais forcé à avaler sa soupe hier soir. Je décidai d'aller alors le voir. Je m'accroupis à ses côtés. Son regard triste se dirigea vers moi mais en me voyant, je vis une lueur de soulagement passer dans ses yeux.

Louis : Salut, je m'appelle Louis. Toi c'est Harry c'est ça ?
Harry : ouais exact !
Je lui souris, il avait l'air détruit de l'intérieur et il fallait que je l'aide à se reconstruire. Je voyais dans ses yeux qu'il comptait sur moi et qu'il avait confiance. Son regard se dirigea vers la file devant les lavabos.
Harry: ma mère est morte.
Il avait sorti cette phrase comme ça, sans prévenir.
Harry: et je n'arrive pas à réaliser. Je pense à elle mais mes pensées me traversent sans que je n'ai le temps de m'y attarder.
Je passa un bras réconfortant autour de ses épaules.
Louis : tu sais, je pense qu'en quelque sorte, c'est bien pour elle qu'elle ne soit pas parmi nous. Je ne la connaissais pas mais je crois qu'elle n'aurait peut-être pas réussi à survivre ici.
Harry: t'as sûrement raison.
Puis il se leva pour aller faire sa toilette.
Je me retrouvai désormais seul dans la pièce. Tout le monde s'était nettoyé le visage et était parti dans la cantine. Je fis couler un filet d'eau froide le long de mes bras en frottant pour éliminer les bactéries. Dans ces camps, la maladie était notre pire ennemie. Une fois lavé, je rejoignis le groupe dans le couloir. J'avais loupé le petit-déjeuner. Harry s'approcha de moi et glissa quelque chose dans ma poche. Je glissa ma main à l'intérieur et souris en effleurant l'emballage d'une petite brioche.

Louis : merci.
Harry: il faut qu'on soit tous soudé, c'est toi qui l'a dit.

Harry

Nous fûmes divisés en deux groupes. Je me retrouvai avec Louis. On fut chargé de nettoyer l'extérieur des camps jusqu'au déjeuner. Louis me rejoignit et on commença à ramasser les déchets qui traînaient. Il faisait encore nuit puisqu'il n'était que 6h du matin et qu'on était en hiver. La zone du camp était entourée de barbelés électriques et tout de même munis de piquants. On n'est jamais trop prudent ! On arriva près d'un petit bâtiment construit tout en longueur. À sa sortie étaient empilés plusieurs vêtements qui semblaient délaissés.
Louis : des vêtements de morts.
Harry : je crois que tu as malheureusement raison.

Louis se jeta sur le tas et fouilla dedans. Je l'observais faire, sans comprendre. Au bout de quelques minutes il sortit de la pile, une veste en jean dans la main. Je reconnus alors celle de Matthieu.

Louis : ils l'ont tué. Il n'avait que 15 ans et ils l'ont tué.
Harry : je...je suis désolé Louis.
Louis : désolé de quoi ? Ces salauds ont eu ce qu'ils voulaient. Ils ont assassiné des gosses et des vieux qui ne leur étaient d'aucune utilité ! Et toi tu dis que t'es désolé ? Désolé de ne pas avoir pu les en empêcher ? Pardon de te décevoir mais tu n'aurais pas pu de toute manière.

Il se laissa alors tomber à genoux sur la pile de fripes et se prit le visage entre ses mains.
Harry: ne sois pas en colère contre moi s'il-te-plaît.
Louis : je ne suis pas en colère contre toi. Je suis en colère contre eux et un jour je me vengerai !
Je m'approcha alors de lui et le prit doucement dans mes bras. Cette fois ce n'était pas à lui de nous rassurer. Notre meneur avait laissé tomber son rôle pendant quelques heures pour redevenir Louis, un homme brisé comme chacun de nous qui va trouver du réconfort chez les autres. Je le serrai alors plus fort encore contre moi.

WAR LOVE [L.S]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant