Chapitre 19 - Adèle

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J'aurais dû être heureuse, j'étais chez moi. Mais ce bonheur s'en trouvait troublé par un homme. Thomas ressemblait à Henry tout en étant différent. Et je savais que lorsque je laissais place à mes songes ces deux hommes se confondaient à tel point que j'en oubliais tout pour me blottir dans ses bras à lui.

Les domestiques étaient dans leurs appartements, à moins qu'un incendie éclate, ils ne réapparaîtront pas, nous étions seuls dans le reste du bâtiment. Je repris mes habitudes, celles d'avant mon veuvage et me délestai de mon sari pour me plonger dans le bac du jardin. Il était suffisamment vaste et profond pour y faire quelques mouvements. Henry m'avait appris à nager bien que cela lui arrivait rarement de se joindre à moi, préférant me contempler. Avec lui, j'avais appris une forme de sensualité bien différente de celles des autres femmes d'occident, celles d'attiser son intérêt, de nourrir son désir sans pour autant consommer.

Thomas devait me chercher, car je m'étais éclipsée peu après le repas, il me trouva enfin et au fond, j'espérais qu'il le fasse. Quel que soit mon avis sur la question, il le remplaçait peu à peu.

— Ce que j'apprécie chez vous, c'est que vous n'êtes pas avare de me faire profiter de vos charmes. Mais je crois que je serais jaloux si vous laissiez ce privilège à d'autres.

— Détrompez-vous, je suis terriblement pudique d'habitude.

— Ai-je donc droit à une sorte d'exclusivité ?

— Vous l'avez.

Je me laissai doucement flotter, laissant ma poitrine pointer hors de l'eau, son regard en dit long sur ce qu'il pouvait ressentir et je me sentis fondre du désir qu'il se jette à l'eau avec moi et m'enlace.

— Vous savez, ce fameux livre dont votre ami vous a parlé, la cause de ce prétendu litige.

— Oui ?

— Vous ne m'avez jamais demandé de quoi il était question.

— En effet, et quelque chose me dit que cela peut être fort intéressant maintenant que vous le mentionnez.

— Il s'agit de l'un des sept tomes d'un livre très ancien écrit par un certain Vâtsyâyana Mallanâga. Ces livres étaient des guides destinés à l'attention des femmes et de leurs époux. Il décrit les manières de se comporter en société et dans l'intimité. Ce tome en particulier contenait tout un chapitre sur...

J'avais capté son attention et revint au bord, me tenant sous lui.

— Vous devriez le lire Thomas. S'il vous plaît. Il n'a d'ailleurs jamais été traduit excepté une fois, par un ami de mon époux, je crois. C'est cette traduction qui intéressait Miller. Il comptait l'introduire discrètement dans les salons mondains de Londres ou de Paris, il aurait tout autant choqué que ravi ses lecteurs.

— Intéressant. Et vous-même, l'avez-vous lu ?

— Dans son entièreté.

Il tira sur son col, il devait avoir chaud soudainement et il y avait de quoi. Mais jamais autant que lorsqu'il découvrirait de quoi parle cette œuvre. Certaines descriptions m'avaient enflammée moi aussi. Me transmettre ce livre faisait partie des étranges dernières volontés de mon époux et je commençais à comprendre pourquoi.

— Si vous le souhaitez, je peux vous les fournir. Vous l'étudierez avec attention ? Promettez-le-moi.

La femme de l'antiquaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant