Âme en otage

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Syrah mit un certain temps à comprendre comment elle était arrivée là.

Les murs de lave luisaient doucement dans la pénombre du sanctuaire tandis que ses pieds avaient brusquement retrouvé le sol. Elle tenait toujours dans sa main la petite boîte de bois brut et ses doigts touchaient presque ceux de Livaïa sur le couvercle recouvert de runes.

Elle passa une paume fraîche sur son front moite, la chaleur du lieu était étouffante. Cependant, elle n'aurait pas su dire si son souffle court provenait de la température ou de son incursion dans les premiers moments de l'univers.

– Nous devons remonter à présent. Lui chuchota Livaïa. On va commencer à te chercher...

Syrah retira doucement sa main de la boîte de Pandore, ses doigts étaient raides et son bras pesait lourd comme si elle avait tenu la position pendant des heures. Elle se demanda combien de temps s'était écoulé durant cette transe.

Les marches vers la nef étaient encore mouillées et les murs de glace de la cathédrale de Gaïa irradiaient du soleil de midi.
Syrah s'inquiéta pour Argo : elle était partie depuis plusieurs heures.

– Je dois y aller... Argo... il... Enfin, il n'est pas tout à fait remis de son retour...

Livaïa lui attrapa le poignet :

– Tu n'as donc pas compris ?

Syrah regarda la bibliothécaire, à vrai dire elle n'était plus vraiment certaine de ce qu'elle savait ou non.

– Si... Je crois que l'ombre est née de Gaïa... et elle... Elle détruit tout... Sauf si elle a son compte d'âmes...

Elle frissonna au souvenir de ce bruit de succion que produisait l'ombre quand elle engloutissait une âme.

Livaïa pinça le haut de son nez dans un geste d'agacement. Syrah eut l'impression qu'elle déployait des trésors d'effort pour arriver à lui faire passer un message sans montrer qu'elle la trouvait particulièrement lente.

D'ailleurs, si elle avait pu partager un moment de complicité à l'annonce de la mort de Yuraïa, elle retrouvait à présent l'attitude impérieuse et le caractère intransigeant de la bibliothécaire.

– D'accord, porteuse d'âmes. Et que t'a dit Gaïa quand tu as voulu libérer Argo ?

Syrah, qui avait déjà expliqué toute l'histoire retint un soupir d'exaspération :

– Qu'Argo devait rejoindre les ténèbres. Qu'il lui appartenait, parce qu'il... Qu'il avait brisé la règle de Gaïa ! J'ai refusé et... et l'ombre a été relâchée, le pacte a été rompu...

Syrah commença à prendre la mesure de l'horreur que représentait sa décision : l'image de l'ombre avalant des mondes entiers lui revint en mémoire. Elle frissonna.

Cependant, Livaïa ne sembla pas satisfaite, elle continua de fixer Syrah avec impatience.

– Tu oublies l'essentiel... Porteuse d'âmes. Argo !

– Quoi ? Argo ?

Syrah avait élevé la voix sans s'en rendre compte. Elle était passée par tellement d'émotions et de révélations, qu'elle se sentait vidée. Elle rêvait de pouvoir enfin se reposer et n'était vraiment plus d'humeur pour les énigmes.

– Tu affirmes qu'il est différent, non ?

– Oui, il fait des cauchemars, il sursaute pour un rien, il ne parle pas...

– Et son âme était destinée à l'ombre...

– Oui, je l'ai déjà dit. Gaïa assurait qu'il avait enfreint la règle.

Symbiose - Les parangons Où les histoires vivent. Découvrez maintenant