Septième partie

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Cette nuit-là, nous nous sommes envoyés des messages pendant des heures, le soleil commençait à se lever quand la fatigue est devenue plus forte que nous et qu'elle nous a emporté.

C'est à partir de ce soir-là que tout a réellement commencé entre Louis et moi, à partir de ce moment-là on ne s'est plus quitté. Même si l'on ne se voyait pas encore, nous passions tout notre temps à nous écrire, il nous arrivait aussi de nous appeler et de ne pas parler. J'aimais écouter la respiration de Louis, elle me montrait que son cœur battait toujours dans sa poitrine, qu'il était en vie.

Durant les deux semaines qui séparaient les rendez-vous de Louis avec mon père, je ne quittais jamais mon portable. Pas même en dormant. Avant Louis je n'avais jamais vraiment accordé d'importance à mon téléphone, la plupart du temps il restait dans ma chambre ou il était perdu dans un endroit de la maison. Si je le prenais au lycée c'était seulement pour rassurer mes parents, pour que je puisse les appeler en cas de problème ou qu'eux puissent me joindre s'ils en avaient besoin. En réalité avoir un téléphone portable m'angoissait, je n'aimais pas l'idée que des gens puissent m'appeler à tout moment. Parler au téléphone a toujours été une épreuve pour moi, je n'ai jamais su tenir une conversation. Avec Louis c'était différent, je pouvais rester silencieux des heures cela ne le dérangeait pas, je crois même qu'il appréciait ça.

Je me rappelle d'une fois où il ne parlait pas et moi non plus. J'entendais des bruits bizarres dans le combiné, comme des gouttes qui tombaient lentement. Je lui avais demandé ce que c'était, il ne m'avait pas répondu alors j'ai murmuré :

"C'est ton injection ?..."

Depuis la première fois, j'avais posé d'autres questions à Gemma sur le cancer, j'avais lu des livres et regardé sur Internet. Je voulais connaitre tous les traitements qui existaient, j'avais besoin de savoir que Louis avait encore une chance d'être sauvé. Gemma m'avait dit que certain patients se faisaient soigner à domicile. Je me rappelle que le mot "soigner" m'avait redonné de l'espoir parce qu'on ne soigne que les gens vivants, pour qu'ils restent en vie, on ne soigne pas les morts. Si on soignait Louis c'était pour qu'il vive et non pas pour qu'il meurt, mais ma sœur avait rapidement brisé le peu d'espoir qui commençait à peine à naître en moi. Elle m'avait expliqué que la chimiothérapie ne fonctionnait pas toujours, que dans certains cas elle détruisait les cellules cancéreuses et dans d'autres elle ralentissait simplement leur reproduction.

J'ai écouté un long moment les gouttes tomber. J'imaginais Louis allongé dans son lit, un fil sortant de lui contenant le liquide qui essayait de combattre en vain les cellules cancéreuses dans son corps. C'était trop dur.

"Je vais raccrocher.

- Non ! S'il te plaît Harry..."

Il y avait tellement de détresse dans sa voix que je me rappelle avoir fermé les yeux tellement c'était douloureux. C'était rare que Louis se montre faible, surtout avec moi, mais je crois que ce jour-là il avait besoin d'une présence. Il s'était tellement fermé à toutes émotions pour ne pas que sa famille le voit souffrir, qu'il en avait oublié que c'était dur pour lui aussi. Par moment il craquait, il avait juste besoin d'accepter que quelqu'un soit là avec lui, soit là pour lui. Louis n'acceptait pas d'avoir des faiblesses et c'était encore plus dur pour lui de les montrer.

J'ai simplement murmuré encore une fois :

"Je reste là."

Je suis resté là toutes les fois où Louis a eu besoin de moi, mais je n'avais plus d'espoir, j'avais compris qu'il ne pouvait pas être sauvé.

À Demain Où les histoires vivent. Découvrez maintenant