10 - Madre mia

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De retour au camp de base comme ils aimaient l'appelé, c'était assez calme, chacun vaquait à ses occupations. Pour ma part, j'étais dans mon cabinet, affalée sur mon siège. J'avais devant moi mon écran qui venait de se mettre en mode veille après plus de dix minutes d'inactivité sur une fenêtre Skype ouverte. Je n'avais pas la sensation d'avoir le droit de me plaindre à mon frère mais ça s'exprimait comme un besoin. J'étais profondément indécise quant à l'action que j'allais effectuer après avoir bougé ma souris. Mon regard se perdit sur le post-it de mon fixe: l'ancien médecin. Il devait à cette heure changer la couche de son petit, bien épuisé, pensant à nous quand il en avait le temps, regrettant peut-être son absence. Je souris et me levai décidée de sortir de mon errance. Je claquai la porte de mon bureau et me dirigeai vers la salle de jeux.

_ Je prends n'importe qui à FIFA, il vous faut juste à savoir que je n'y ai jamais joué, annonçai-je en pénétrant sous le regard surpris de quelques-uns.

C'était pour moi l'occasion de sortir de mon confort et de me remettre à ma place.

_ Doc' il t'arrive quoi?

_ Je ne sais pas mais je rumine dans mon trou, si vous ne voulez pas de moi ici, disons que je le fais pour le côté psychologique des choses. Ça vous va? personne ne dit rien, ça me fit plaisir, parce que sinon je ne savais pas trop vers quoi me tourner.

Entre Thomas et Djibril, une place se créa m'octroyant juste assez d'espace pour respirer. Les monégasques ne me laissaient pas le choix. L'un d'eux me passa une manette, je la relookai comme la première arme à feu qu'on m'avait posée dans les mains. Lemar bien entreprenant commença à m'expliquer chacun des boutons de toutes les couleurs de toutes les formes. Il arriva au dernier.

_ T'as compris? je levai la tête vers lui le regard implorant son aide.

_ Je crois que j'ai oublié le premier... Et le deuxième et le troisième... Enfin on peut les refaire plus doucement ?

Il me sembla que j'étais devenue l'attraction principale au milieu de ces journées ressemblantes. Sous leurs airs amusés, on me réexpliqua, j'essayai de me concentrer pour me souvenir, utilisant des moyens mnémotechniques douteux. Le principal était qu'ils fonctionnassent. Après une heure d'acharnement et de supplice observé par des pros, je saisis les bases. Je jouai une fois seulement de la partie droite de la manette pour l'apprendre et une seconde fois seulement la partie gauche. Pendant ce temps un joueur subissait mon bas niveau en s'occupant de l'autre côté. Celui avec qui ça marcha le mieux ce fut avec Samuel Umtiti, on ne parla pas beaucoup pourtant j'arrivai à anticiper certains de ses mouvements.

_ J'abandonne, annonça-t-il.

J'en fus surprise et lorsqu'il se leva du canapé, j'espérai qu'il se rassît mais il s'en alla bel et bien vers ses autres coéquipiers qui faisaient un jeu de cartes. J'en vins à la conclusion que j'avais vraiment besoin d'entraînement, comme tout, je me souvins de mes ratés en stage à l'hôpital, j'avais progressé depuis: rebelote pour FIFA, quoique ce ne fut probablement pas ma priorité. Djibril tenta de me rassurer.

_ Ne t'inquiètes pas Doc', tu ne vas pas louper ta vie si tu ne sais pas ça.

Je posai la manette sur la table et soufflai.

_ Vous avez raison, je vais rester sur mes bases de médecine, mais c'est moins amusant.

_ Je suis sûr qu'une petite mémé t'a déjà pissé dessus, ricana-t-il pour détendre l'atmosphère.

_ Et pas qu'une malheureusement.

Quelques secondes passèrent puis il m'annonça une bonne nouvelle.

_ Tu sais que tu peux utiliser la salle de sport? mon attention complète se porta sur lui. Je me disais que ça pourrait t'aider si t'en a besoin, les kinés y font des footings parfois.

Une victoire pour oublier la guerre | R.Varane & les BleusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant