La Mascarade des Damnés - Tome. 1 L'enfant sans père [Terminé]

Oraison païenne - partie 1

Il dû certainement y avoir une époque où le Midnight Sun était un club branché d'Atlanta, mais à en juger par son état actuel, c'était il y a bien longtemps. Aujourd'hui, ce n'était plus qu'un repère de ce que la ville faisait de pire, ou du moins, de moins reluisant.

Perdu à la fin d'une ruelle sinistre et d'un dédale de caves, ce n'était pas le genre de lieu où on atterrissait par hasard en fin de soirée. Que ce soit pour un verre, de la compagnie ou d'autres choses moins avouables, il fallait vouloir venir ici. Pourtant, malgré les murs à la peinture écaillée, l'ambiance sulfureuse ainsi que l'odeur omniprésente d'alcool et de cigarette, la salle était comble.

Ambre s'étonna à peine de cette affluence en descendant les escaliers d'accès au club. Il était rare que les affaires surnaturelles attendent le week-end. Après tout, peut importe d'être un soir de milieux de semaine quand on à l'éternité devant soit ou que l'ont parle au esprits des défunt. La sorcière avisa l'assistance à la recherche de sa cible. Devant elle, le club n'était qu'un tas compact et bruyant, massé contre le bar à l'abri des regard dans la pénombre.

Dans un coin, un groupe de métal inconnu entraînait l'assistance sur des ondes sombres et un texte contestataire. Réchauffement climatique, loi de la finance... Ils psalmodiaient à qui voulaient bien l'entendre l'idiotie du monde et son inaction face aux changements sur notre terre.

La sorcière étira un sourire en coin en réceptionnant le message du groupe de hard rock : « bouge toi les fesses si tu veux que les choses changent ».

Du haut de ses talons et de ses vingt quatre ans, Ambre n'aurait pu être plus d'accord. Elle venait justement en ce lieu pour agir face aux changements que semblaient vouloir imposer la roue du Destin.

Arrivée au bas de l'escalier, elle avisa encore la salle de concert – bar, mais il faisait trop sombre pour y distinguer quoique ce soit. Pas de quoi décourager la toute nouvelle protectrice du Sabbat, tout juste diplômée, et en mission pour l'Aînée des sorcières de la ville. La jeune femme murmura les mots d'illumination et le monde obscur du bar se révéla à ses yeux en même temps que la localisation de sa cible.

Mue par son sort de vision, Ambre fendit la foule sans mal. La sorcière s'amusa en constatant qu'elle portait l'uniforme des habitués du lieu ; en noir des pieds à la tête, veste en cuir et talons compensés. Pour sa part d'individualité, elle portait ses cheveux bruns ondulés en un carré long déstructuré, des yeux verts ornés d'un smoky noir et de long cils. Elle correspondait parfaitement au dressing code du lieu, et, à en juger par les regards appuyés de certains, elle devait être plutôt attirante. Pas intéressée pour ce soir, elle rejoignit l'objet de sa venue, affairée au bar à vidée une bouteille de vodka pure.

Avec sa carrure de gentleman négligée et son regard perçant, il avait tout de ces flics cassés par la vie des films en noir et blanc. Comme pour compléter le tableau, il portait un de ces intemporels cirés de détective couleur taupe et un barde d'au moins trois jours.

- Ne me dites pas que c'est vous que la vielle chouette envoie ? Dit il d'un ton propre aux soirées trop arrosées quand la sorcière arriva à sa hauteur.

Ambre se planta derrière lui dans une posture qui dégageait la confiance en soi.

- Vous avez quoi, vingt cinq ans ? Cracha-t-il finalement avec dédain.

Sans lâcher sa bouteille et son verre, il se tourna vers elle. Sans gène, il l'avisa des pied à la tête avec un mélange étrange de dégoût et de désespoir sur le visage. Puis il bu de nouveau.

- Je dois vous accompagner jusqu'au Sanctuaire. Trancha finalement la sorcière avec une pointe d'impatience et de superbe dans la voie. Une escorte vous attend pour vous conduire en lieu sure un fois que vous aurez parlé avec l'Aînée. Notre chef souhaite profiter dès maintenant de vos...

Il eut un rit de dément, aussi incontrôlable qu'effrayant. Soit il était saoul, soit il avait perdu la raison, ou bien le deux ? Heureusement, la musique du bar était trop forte pour que qui que ce soit fasse attention à ses exclamations malsaines.

- A quoi bon ? A quoi bon ? Je suis mort de toute façon ? Mort je vous dis. Il se vautra lamentablement sur le bar. Pourquoi ai-je fais ça ? Pourquoi ? Ils vont me trouver...

L'homme continua un instant avant d'écouler les dernières onces de patience de la sorcière. Elle ne résista pas à la boutade.

- Cliniquement c'est déjà le cas, effectivement.

Il se détourna de sa bouteille et la darda d'un air mauvais.

- Maintenant, soit nous passons la soirée à énumérer des évidences en attendant que la mort définitive ne vienne, soit je vous conduis en sécurité ? A vous de choisir.

- Ca vous amuse, hein ? Lui cracha-t-il au visage alors qu'un profond relent d'alcool piqua le nez de la jeune femme.

- Assez je dois dire. Fit elle dans un sourire mutin. Maintenant suivez moi avant que je ne change d'avis.

La sorcière fit volte-face et ouvrit la voie vers la sortie, sa cible, alcoolique et dépressive sur les talons.

Ah, ces vampires, de vraies drama queens quand ils s'y mettent.