10 - I'll sleep when I'm dead

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CHARLIE 

Elijah von Dast avait l'air beaucoup moins impressionnant sans ses atours impériaux. Sans sa grande cape en hermine, il avait l'air moins grand. Sans sa couronne, sa tête semblait moins droite. Sans son sceptre, ses mains semblaient moins crispées. Il n'était qu'un homme, après tout. C'était ce que disait souvent Père, même si elle avait du mal à le croire. Il avait tant fait pour Nox. Il ne lui semblait pas qu'un simple homme puisse accomplir tant de miracles.

Dans le cadre trop grand de la porte de sa chambre au château, Elijah ne paraissait pourtant qu'être une personne normale. Vêtue de vêtements trop chers, certes. Elle exécuta une révérence rapide - elle avait perdu la main en vivant à la campagne - et se redressa pour fourrer une cape de pluie dans sa petite valise marron. Elle n'avait rien d'autre que ce qu'elle avait déballé la veille lors de leur arrivée, la nuit précédente. Aucun risque de prendre trop de temps en préparation.

"Je te dérange ?"

L'Empereur ne semblait pas si sûr de lui. C'était même plutôt le contraire. Il avait un sourire un peu gêné, comme s'il avait la crainte secrète qu'elle le houspille. Bien entendu, elle n'aurait jamais osé faire cela. Elle avait un minimum de savoir vivre.

"Non, Votre Majesté. Que puis-je pour vous ?"

Il s'assit sur son lit et elle remercia une dame de chambre d'être venue le refaire. Quand elle était sortie de sa couche, au crépuscule, elle n'avait pas pris la peine de le refaire. A Irmingarde, elle ne s'en occupait pas non plus, Allen passait dans les chambres pendant le petit-déjeuner et quand elle retrouvait à la sienne pour se laver, tout était aéré, replié, rangé.

"Tu as beaucoup de courage, Charlette. Ne souhaites-tu pas emmener au moins un garde du corps avec toi?"

Elle réfléchit un instant et sourit en pensant à Auguste. Lui qui se plaignait de la vie monotone du palais serait certainement soulagé de connaître un peu d'action. Mais ils devraient déjà se débrouiller pour que Félix ne rapporte pas leurs réelles intentions à Père, elle n'avait pas besoin d'un chaperon supplémentaire.

"Monsieur, je suis mon propre gardien. Cette mission n'est pas démesurément dangereuse."

Elle espéra avoir donné la bonne réponse. On savait qu'auprès de l'Empereur, il fallait toujours mesurer ses mots. Certains disaient qu'ils savaient déceler un cœur impur sous une montagne de flatterie, tant il était vif et intelligent.

"Tellement courageuse. Je suis donc bien coupable de lâcheté. A ta place, je ne suis pas sûre que je me serais dévoué pour aller chercher Yvan."

La jeune femme se crispa et avala difficilement sa salive. S'il ne cessait de flatter son courage, c'est bien qu'il devait avoir une raison. Elle n'était pas sûre de vouloir savoir laquelle.

"Ce n'est rien de cela. Juste une mission de reconnaissance. Je laisserai le travail le plus dur et dangereux aux hommes de mon père, lorsque je lui aurai rendu compte de la situation."

Elijah eut un sourire énigmatique et se leva. Il fit quelques pas, inspectant une chambre que Charlie n'avait pas eu le temps de faire sienne sans que ce maudit sourire de quitte ses lèvres.

"C'est drôle, tout de même. Je me demande pourquoi ton père a donné son accord. Il a une tripotées d'éclaireurs pour faire le travail."

La main de Charlie se serra sur la cape. Est-ce qu'il la mettait à l'épreuve ? Il avait pourtant l'air d'être d'accord, une heure plus tôt.

Lady von Dast [Ruthless Ravenwell - 2] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant