07 : Sui Generis

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CHAPITRE 07 : Sui Generis

Dans le désert de silence seulement balayé par quelques soupirs humides, le vibreur d'un portable fut comme un coup de tonnerre. Jolt et sa compagne du soir cessèrent de bouger, le lit cessa de gémir.

— Décroche, souffla-t-elle... Mais j'espère que c'est important.

Au milieu de la nuit ? Jolt aussi. D'un coup d'œil, il lu le nom de Force Russel. Il décrocha immédiatement.


— Allo, lâcha-t-il essoufflé, inquiété par cet appel tardif.

Bonsoir, Monsieur, répondit Russel d'une voix agréable.


Ça, ou Jolt était juste en train de fantasmer cette suavité qu'il entendait presque.


Excusez-moi de vous déranger si tard.

— Qu'est-ce qui se passe ?

Jolt tentait de calmer sa respiration en la faisant profonde. Mais cet appel l'inquiétait vraiment. Pourquoi son chef de sécurité avait-il besoin de l'appeler si tard ? Ils n'étaient pas exactement comme cul et chemise. Jolt sortit du lit et fit quelques pas.

— Je voulais savoir si tout allait bien.

— ...Pourquoi, quelqu'un attaque ?

— Pas que je sache, Monsieur.


...Quoi ?


— ...Alors pourquoi tu m'appelles ?

— Je prends de vos nouvelles pour la soirée. Si vous me dites que tout va bien, c'est parfait.

Est-ce que Russel avait bu, ou fumé ? Et si oui, quoi ?

...Est-ce que Jolt venait de le tutoyer ? Il sentait que quelque chose était en train de se produire mais impossible de réfléchir. Tout ce qu'il parvenait à ressentir était un mélange d'angoisse par anticipation, de tension avant un danger imminent qui soufflait juste au creux de sa nuque, et le pressant désir de retourner au lit, reprendre sa danse acharnée avec sa délicieuse invitée.


— Tout va très bien, Russel, laissa-t-il tomber avec un peu trop d'exaspération.

— Entendu, je vous remercie. Bonne soirée.

— Bonne soirée.


Pourtant, il resta songeur après avoir raccroché. Un long moment, il n'eut plus de contrôle sur son esprit, et subit malgré lui un voyage vers ces rêves qu'il avait fait ces dernières nuits. Ces rêves de violence écœurante, de satisfaction intense à en vaciller, juste pour avoir obtenu son regard sur lui.

Ou son coup de téléphone ? Il ne tremblerait pas pour si peu. Il n'était pas à sa merci.


— Qu'est-ce qui se passe ? soupira son invitée derrière lui, toujours couchée.


Jolt lui lança un bref regard par dessus son épaule.


— Il faut que... je marche un peu.


Elle se redressa tout de suite, soucieuse :


— Ça va ?


Il hocha la tête, mais ils surent tous les deux que c'était un gentil mensonge. Jolt resta pensif en enfilant un boxer, et quitta la pièce sans trop savoir où aller.

Il avait la sensation que ce sentiment d'assouvissement dans ses rêves, celui qui le dégoutait tellement éveillé, le guettait depuis un recoin sombre de sa tête. Et il détestait de ne pas pouvoir le rejeter. Il détestait de ne pas vraiment en avoir envie.

RADICAL : T1 「MxM」Où les histoires vivent. Découvrez maintenant