27 : Où est mon téléphone ?

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C'est la BOMBE, BOMBE BOMBE
Radical BOMBE BOMBE BOMBE

(Thème musical. Ou folie, à vous de choisir.)


***


27 : Où est mon téléphone

Force se réveilla. Ces rêves... Il avait l'impression de les voir les yeux fermés. Et que c'était pour ça qu'il ne les comprenait pas, pas encore.


En regardant autour de lui, il se rappela qu'il était à l'hôpital. Il avait conduit une petite partie de la nuit pour amener Jolt ici, un centre médical renforcé appartenant à Pollux. C'était la procédure en cas d'attaque de cette importance, car on ne savait jamais si les attaquants n'étaient pas près à s'en prendre aussi des hôpitaux publics. Pollux avait donc ces centres médicaux protégés un peu partout dans le pays, autour des plus grandes villes.

À peine arrivé, Force avait été admis en soins intensifs en raison de ses blessures. Même si Qilin était intervenu, il lui restait quelques hémorragies internes. Apparement, une des balles s'était logée contre un os, arrêtée net par celui-ci, et il avait fallu la lui retirer chirurgicallement.

Et donc, il était là. Il avait été anesthésié localement durant l'opération, mais on ne lui fournissait pas d'anti-douleurs. C'était inefficace sur sa morphologie. Tout son corps le lançait, comme un va et viens, une onde de douleur dont le pic le plus haut était juste un peu trop intense pour être supportable. À part ça, ça allait. Il était pratiquement agrafé à son lit par tout un tas de fils de prise de tension et autre, il osait à peine bouger par peur d'arracher quelque chose sans s'en rendre compte. Il chercha autour de lui, voir s'il trouvait son téléphone, et fut assez contrarié de ne le voir nulle part.


La porte de sa chambre s'ouvrit, un homme entra sans frapper. Il s'arrêta en voyant Force, moitié surpris, moitié agacé, et soupira.

Ce n'était pas un médecin. Il portait un vieux blazer brun au lieu de la blouse blanche réglementaire. Et des lunettes à écailles d'un style assez similaire, presque vintage mais un peu trop ringard pour l'être vraiment. Et il était dégarni, il semblait l'être depuis toujours. Force ne l'avait jamais connu autrement.

Celui-ci se redressa comme il put dans son lit.


— Bonjour, Monsieur Lefebvre.


Si c'était lui qui venait, Force avait fait quelque chose de mal.


— Russel, attaqua directement le supérieur, qu'est-ce que vous avez foutu ?


Merde. Il savait ?


— Vous avez laissé les attaquants s'échapper ?

— ...Pardon ?

— Vous croyez que c'est quoi, exactement, votre job ?

— Ils étaient armés et extrêmement hostiles, j'ai privilégié la sécurité du client. Ce n'était pas une attaque ordinaire, Monsieur, c'était une milice mercenaire mandatée spécifiquement.


Lefebvre secoua la tête.


— Non, coupa-t-il. Les autres, les Sui Generis. Le client me dit que vous avez négocié sa libération contre le fait de ne pas engager de poursuite ?

— J'ai privilégié la sécurité de client, Monsieur. C'est ça, mon job.

— Vous auriez dû les ramener, Russel !


Force avait du mal à comprendre. Et même à le croire. Il se défendait de ne pas avoir arrêté les Sui Gen ?... Il se souvenait de cette ancienne angoisse qu'il avait ressenti, quand Cyclone le lui avait demandé. C'était plus ou moins ce qu'il ressentait maintenant.

Il aurait les ramener, il devait ramener d'autres Sui Gen à Pollux.

Quoi ?... Pourquoi ?


— Le client aurait pu être blessé, je n'ai pas voulu prendre le risque. Et...


Il hésita... Les mots de Cyclone lui revinrent, comme s'ils ne l'avaient jamais quitté. Cyclone et lui étaient liés par leurs rêves.


— Je n'aurais pas pu les retenir et me battre contre la milice.


Lefebvre écarquilla les yeux. Ce fut de la surprise, et en quelques secondes elle se changea en rage :


— Vous êtes en train de me dire que c'est de leur faute ?!


Force resta coi, mais rien n'y parut. Son expression ne varia pas d'un pouce, elle ne le pouvait pas.


— Oui, Monsieur, finit-il par répondre. Mes choix ont été basés sur mon état physique et ma capacité à protéger le client, à cause de cette attaque.


Lefebvre se retrouva sans rien à répliquer, et secoua seulement la tête en grande désapprobation.


— Ça fait beaucoup d'excuses, Russel


Force était normalement un employé docile. Il devait l'être. Pourtant, cette fois, des mots passèrent ses lèvres. Les dents serrées, il eut un rictus quasi félin, et lâcha :


— Mais quel est exactement mon job, Monsieur ? Je pensais que j'étais garde du corps. Je pensais que les agents de Pollux sont le bouclier.


Lefebvre n'était bon qu'à brasser du vent. Si bien que sa répartie fut soufflée d'un coup.


— Par ailleurs, Monsieur, je ne trouve pas mon téléphone. Où sont mes affaires ?

— Pourquoi vous auriez besoin de votre téléphone ?


Le vieil homme ricana.


— Votre convalescence est terminée, allez voir à l'accueil votre chambre de séjour.

— Où est mon téléphone, Monsieur ?


Cette foi, il haussa les épaules. Il chercha à avoir l'air de ne pas s'en soucier, mais Force vit clair dans son jeu. Il voulait sortir de cette pièce au plus vite. Il avait peur de lui.

Comme tout le monde, manifestement.

Une fois seul, Force réalisa ce qu'on venait de lui dire. Il avait une chambre de séjour ici, au complexe. Ça signifiait qu'il devait libérer la chambre médicale, mais qu'il n'allai nulle part. Qu'est-ce qui se passait ? Est-ce que Jolt avait viré Pollux ?

Péniblement, après s'être dégrafé de tous les fils, il se leva. La douleur généralisée n'était toujours pas partie, et toujours aussi odieusement lancinante. Il n'avait même pas de vêtements, ici.

À pas lents, car le moindre mouvement était difficile, toujours dans la grande robe en papier fin que lui avait fait enfiler l'hôpital, Force sortit de la chambre.

RADICAL : T1 「MxM」Où les histoires vivent. Découvrez maintenant