Heart's Mechanic - New Year Eve

22 - LEONHARD

Autant je n'étais pas vraiment disposé à développer le sujet de ma famille... autant si elle veut qu'on parle du Benelux, ça ne me dérange pas, bien au contraire. Et surtout maintenant que j'ai croisé un autre néerlandais. Il faudra que je m'arrange pour essayer de retrouver qui il est, plus tard - on ne doit pas être dix mille sur la base... je suis sûr que si je demande au standard, on pourra me donner ses coordonnées. Je m'arrête sur cette étrange réflexion - bon sang... ça faisait bien longtemps que je n'avais plus ressenti cette envie de... connaître quelqu'un. Ce qui impliquerait de faire l'effort de sortir de chez moi, de venir sur la base, de retrouver cette personne - tout un processus que je n'avais pas mis en œuvre depuis bien longtemps. D'où me vient ce soudain regain d'enthousiasme pour la vie ?...

La réponse est à mon bras bien sûr. La fraîcheur de la jeune femme a clairement eu des effets bénéfiques sur moi... comme Ross me le soutient depuis le début, d'ailleurs. Elle avait encore une fois raison. Même quand l'étudiante se met en tête de me faire sortir de mes gonds... au moins, elle m'oblige à ressentir des émotions. A me sortir de ma dépression. Ais-je autant changé en aussi peu de temps ?... Ça fait quoi, à peine plus de trois mois qu'elle est devenue la stagiaire d'Eldridge ?... J'ai presque l'impression qu'elle a toujours fait partie de mon équipe au final. Elle s'est tellement imposée dans mon quotidien... qu'au final, elle y a trouvé sa place. C'est... assez troublant.

- J'ai vu ça... mais du coup comme tu dis, c'est à la fois un avantage et un inconvénient. Un avantage, parce que votre langue maternelle est celle du monde entier - un inconvénient, parce que vous êtes les seuls à ne pas grandir au minimum bilingue.

Le tutoiement m'a échappé sans même que je ne m'en rende compte. Dans la salle principale, il y a toujours autant de monde sur la piste - quelle heure peut-il bien être ?... Rah, mes anciens programment visuels me manquent dans ce genre de situation - avant, j'avais toujours l'heure affichée dans un angle mort. Maintenant, je suis comme le commun des mortels... ou presque.

De son côté, miss Barns s'amuse à provoquer le fameux McTavish - je la surveille du coin de l'œil alors qu'elle fait ses grimaces... et je m'avance immédiatement par réflexe d'un pas entre elle et le soldat ivre dès qu'il fait mine de vouloir approcher. Je le foudroie du regard alors que ses amis le retiennent au bar - ils font bien... parce que moi s'il approche pour en découdre, je lui casse quelque chose. Histoire de bien commencer la nouvelle année.

- ... La langue des signes ?... Sérieusement ? m'esclaffais-je. Vous n'êtes pas capable de reconnaître le néerlandais, mais vous pouvez parler le morse et la langue des signes. Vous êtes pas croyable, m'amusais-je en secouant doucement la tête.

Coincé au bar, McTavish nous fusille du regard. Bon, je cherche depuis tout à l'heure le bon moment pour donner son cadeau à miss Barns... j'avoue, j'ai repoussé cet instant autant que j'ai pu, parce que plus j'y pense, plus je me dis que mon idée est complètement stupide. Que j'aurais pu faire plus d'effort, pour essayer de lui trouver quelque chose de plus... personnel. Personnalisé. Un truc du genre. J'ai joué la facilité sur ce coup là - j'ai profité de mon argent... et du fait que ce soit une femme. Je ne m'en sens pas très fier... mais le seul moyen de vraiment savoir si j'ai merdé autant que je le crois, c'est de le lui donner, une bonne fois pour toute.

- Hum, miss Barns... commençais-je, un peu gêné. J'ai, euh... j'ai quelque chose pour vous. Pour vous remercier... pour Noël... pour un peu... enfin voilà. Ça vous ennuierait de me suivre dans un endroit... un peu plus calme ?... demandais-je en me sentant complètement idiot.