J'arrêtai ma Honda devant l'herboristerie, qui ouvrirait dans les jours à venir. J'avais déniché un ébéniste qui installait des bibliothèques. Je prévoyais d'y disposer des pots remplis d'herbes sèches et d'autres cristaux bruts. Je le saluai en posant mon casque dans la réserve du fond.
— Ça avance bien. Vos meubles sont superbes ! avouai-je, mes doigts courant sur le dessus d'une étagère lustrée.
— Merci. C'est une passion depuis qu'j'suis gosse. J'me voyais pas faire autre chose, répondit l'artisan, un tournevis à la main.
— On ne peut pas lutter contre sa vocation, proclamai-je, un sourire en coin. Avez-vous besoin de moi ?
— Pas pour l'instant. J'dois couvrir ce mur avec les meubles que j'ai apportés dans le camion d'hier, et il ne m'restera que les meubles bas que j'vous installerai d'main. À moins d'un contretemps, j'vous rends les clés d'main soir.
Il se frotta le front machinalement devant la somme de travail qui lui restait à effectuer. Son visage restait lumineux malgré les signes du temps. Sa bonhomie me l'avait fait préférer à son concurrent. Déjà que j'avais des difficultés, si en plus je m'encombrais avec des personnes qui me donnaient envie d'abréger leur vie pour le bien collectif, je ne m'en serais pas sortie...
— Super. Je vais chercher un café, je vous en commande un ? lançai-je en mettant un billet dans la poche de mon jean.
— Avec du lait et deux sucres. Vous êtes gentille, ajouta-t-il avec un sourire.
« Je suis une femme adorable, à n'en pas douter... » ricanai-je pour moi-même.
* * *
Une fois sur le trottoir, j'appelai mon pilier, Eddy. Ses informations m'aiguilleraient sur la façon d'atteindre le clan des vampires sans faire trop de remous sur mon passage. Mon objectif n'était pas de me venger en signant mon œuvre, au contraire. J'aspirais à une retraite tranquille et non à une chasse à la femme par tous les vampires de la planète.
— Comment vas-tu, Fléau ?
— Salut. Je n'ai pas le temps, attaquai-je en scrutant les passants.
— Comme d'hab'. Comment puis-je illuminer ta journée ?
— Trouve-moi tout ce que tu peux sur trois personnes : Marlan Scully, médecin-urgentiste à l'hôpital de Rodez, un des leurs ; un agent de police et membre de la CAM, patronyme Carter ; et la dernière est une certaine Sylvia, serveuse dans un resto, Au bon plat, à Montbazin. Procédure habituelle, et j'en ai besoin...
— Pour avant-hier, je sais, me coupa-t-il. Au fait, tu as fait bon voyage ?
— Es-tu certain de vouloir vraiment entamer la conversation ?
— Allez, Fléau, un peu de contacts humains te feraient le plus grand bien.
— Ne t'inquiète pas pour moi, Bip Bip, et ne me titille pas, ces bouseux s'en chargent déjà ! répliquai-je avec condescendance.
— Personne ne te résiste, soupira-t-il en simulant un orgasme.
— T'es pas possible ! Fais ton boulot, c'est tout ce que je te demande, ordonnai-je d'un ton strict.
Je lui raccrochai au nez. Il avait l'habitude. À mon arrivée sur Terre, j'avais constitué un vivier de collaborateurs qui possédaient un talent exceptionnel, que je qualifiais de mes piliers. Ils ne se rencontraient jamais et n'avaient aucun lien direct en dehors d'Eddy. Je les avais recrutés via le darknet en prenant soin de brouiller toutes les pistes pour assurer mon anonymat tant physique que virtuel. Eddy avait fait ses preuves et demeurait le seul être humain à détenir des informations valables à mon encontre. Je n'aurais pas été prête à avouer que je lui accordais une confiance aveugle, mais suffisamment, pour m'en servir comme d'un bras droit fidèle et dévoué. J'avais mené une enquête minutieuse sur lui durant plusieurs semaines et je connaissais les moindres détails de sa vie et de ses habitudes. À mes yeux, Eddy était aussi transparent que l'air.
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1 - Dissonance
FantasyJe suis Siobhan, une sorcière Fille d'Odin, le Fléau. Tueuse à gages froide et insensible, personne n'a envie de croiser mon chemin. On me paye cher pour débarrasser la Terre des monstres. Et je ne boude pas mon plaisir, surtout quand ce sont des va...