1 - Dissonance

Chapitre 5 Partie 3

Je récupérai ma moto et démarrai pour regagner mon appartement quelques pâtés de maisons plus loin. Je longeai le côté de la brasserie, lorsque je détectai une vibration particulière. Elle picota mon épiderme telle une nuée de minuscules décharges électriques. Si j'en jugeais par l'unique rythme cardiaque affolé que je percevais, des vampires attaquaient un humain. Je n'aurais pas dû m'en mêler, mais c'était plus fort que moi. Je roulai jusqu'au lieu de l'agression et braquai la Honda.

— Pas croyable ! pestai-je.

En un quart de seconde, je me jetai sur les deux morts-vivants qui s'en prenaient à Sylvia. Les tuer aurait été trop imprudent, alors je leur soufflai une incantation de répulsion. Ils s'écartèrent de nous en feulant et nous abandonnèrent dans la ruelle isolée. Recroquevillée en chien de fusil, Sylvia sanglotait.

— Ça va aller ? chuchotai-je en la redressant avec douceur.

— Ils m'ont suivie quand je suis sortie prendre l'air et m'ont amenée ici. J'ai essayé de leur dire d'arrêter, mais ils refusaient d'entendre quoi que ce soit ! J'ai hurlé qu'ils auraient des problèmes avec Arthur ! Je lui appartiens ! (Ses yeux se remplirent de larmes qui s'écroulèrent massivement dans un battement de paupières.) Ils n'auraient jamais dû s'en prendre à moi. Je ne comprends pas ! m'expliqua-t-elle entre deux spasmes.

Pour ma part, je comprenais très bien. Leur district contenait des renégats qui se moquaient de savoir si Sylvia était une donneuse attitrée ou non. L'odeur métallique s'insinua dans ma bouche : ces monstres l'avaient mordue à de multiples endroits.

— Où est ta voiture ?

— Sur le parking, articula-t-elle avec difficulté, au bord de l'évanouissement.

— Donne-moi tes clés. Je reviens.

Je la calai contre le mur en brique et partis à moto récupérer son véhicule. Je le localisai rapidement sur le parking. Je me garai et repartis aussitôt la chercher. Je l'installai sur la banquette arrière de l'Audi en l'auscultant rapidement du regard. Des morsures ornaient son abducteur d'où elle perdait beaucoup de sang. J'arrachai le bas de mon tee-shirt d'un coup sec pour lui faire un garrot au niveau de la cuisse.

— Arthur t'a-t-il fait boire de son sang ?

— Oui, pourquoi ?

— Tu aurais dû cicatriser, non ? Reste allongée, je t'emmène voir Scully.

— Marion ? (Je la regardai à travers le rétroviseur.) Merci d'être intervenue.

— Je t'en prie.

Je fixai la route, consciente que je venais de commettre la première erreur de ma carrière ! Elle pleura en silence tout le trajet jusqu'aux urgences de Rodez. Pour ma part, je me torturais l'esprit pour imaginer une échappatoire, au cas où je serais tombée dans un piège orchestré par ces macchabées. J'avais besoin d'action, j'étais servie !