25 - Une bonne personne

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Il est tard, je le devine à la hauteur du soleil dans le ciel.
Je regarde un instant ses rayons obliques qui traversent ma fenêtre puis je prends conscience de la présence du Warg à mes côtés, sur le lit.

– Faut pas te gêner...

Il m'ignore ce qui me fait sourire. J'étais tellement fatigué que je ne l'ai pas sentit monter.
Je me lève en grimaçant, j'ai l'impression de m'être fait piétiner par un Troll.. ok, plusieurs Trolls.
J'ai mal de partout. Je me traîne jusqu'à la grande armoire pour voir ce qu'elle contient. Que des robes apparemment.
C'est bizarre de trouver une armoire remplit de robes dans une forteresse...
Je hausse les épaules, plus rien ne me surprend, et j'en prend une dans les tons gris neutre. Je mets un temps fou à m'habiller puis je sors.
La forteresse est étrangement calme, comme si rien ne s'était passé. J'arpente les couloirs sans croiser beaucoup de personnes jusqu'à la grande salle, là, il y a du monde. A croire que tous se sont réunis pour écouter le roi.
Je rejoins Legolas, Gimli et Aragorn au premier rang.

– Nous avons gagné une grande bataille, fait Théoden en balayant ses Hommes du regard. C'était un moment difficile et nous en sommes sorti vainqueur mais la guerre n'est pas terminée pour autant. Aujourd'hui il nous faut marcher sur Isengard, rassembler notre peuple et récupérer nos terres !

Les Hommes crièrent à l'unisson leur approbation.

– Reposez vous aujourd'hui, reprend le Roi. Demain nous partirons pour Isengard, montrer à
Saroumane qu'il a échoué, le Rohan est toujours debout !

Nouveau cri d'approbation, leur motivation fait plaisir à voir.

– Nous aussi nous allons en Isengard, fait alors Aragorn tout bas. Nous serons très près de Fangorn...

– Je sais, acquiescé-je en souriant. Je comptais aller voir mon frère de toute façon, j'ai des choses à lui dire avant de partir pour le Mordor. Vous êtes bien sûr les bienvenues.

– Je serais enchanté de visiter cette forêt de mystère, répond Legolas avec entrain.

– Je n'aime pas trop les forêts mais je suis curieux de voir vos plaines et votre fort, enchérit Gimli.

Je lui souris, ils sont vraiment mes amis. Ravie, je me tourne vers Aragorn.

– Je serais ravi de visiter vos terres et de rencontrer votre frère.

– Merci, votre amitié est le bien le plus précieux que je possède et...

Soudain Le Warg se frotte à ma jambe me faisant chanceler. Surprise, je le regarde alors qu'il réclame des caresses.
Je ris et les autres se joignent à moi, en plus d'être protecteur le voilà jaloux. Je le caresse affectueusement avant de ressortir.
L'air est frais, la neige n'est pas loin. Je frissonne avant de prendre la direction des écuries. Alors que je marche, perdue dans mes pensées, je remarque que des gens me dévisagent avec de la crainte voire de l'hostilité. Perplexe, je m'arrête. Le monde semble tourner sans moi alors que je les dévisage à mon tour. Je ne comprends pas ce qui se passe mais je n'aime pas ça. Soudain Le Warg se met à grogner, attirant encore plus de regards sur nous.

– Arrête, soufflé-je en lui effleurant la tête.

Je décide de les ignorer, c'est sans doute la meilleure chose à faire, mais je crains qu'ils aient à nouveau peur de moi. Après tous ce que j'ai fait ça serait décevant...
Pensive, je suis certaine d'oublier quelque chose, j'arrive aux écuries où je trouve Eomer en train de vérifier les sabots d'Équinoxe.

– C'est gentil de prendre soin de lui, fis-je en m'approchant.

Eomer lève la tête avant de me sourire.

– C'est un étalon d'exception, un vrai cheval de légende.

– Arrêtez, il va prendre la grosse tête, rigolé-je.

Équinoxe m'assène un coup de tête d'indignation ce qui fait rire Eomer.

– Je n'avais jamais vu un cheval pouvant entraîner ainsi les autres dans son sillage. C'était incroyable.

– C'est l'une de ses particularités, répondis-je amusé.

– Et quelles sont les autres ?

J'hésite avant de reprendre.

– Aussi étrange soit il, il ne craint pas le feu puis... il est extrêmement têtu.

On rit à l'unisson tandis qu'Équinoxe hennit d'indignation. Eomer le met dans un box mais ne ferme pas la porte.

– Repose toi, mon grand, fis-je en le caressant. Nous avons de la route à faire demain.

– Vous nous accompagnez ? C'est une excellente nouvelle.

– C'est la moindre des choses.

– Vous êtes loin de chez vous, vous n'étiez pas obligé de nous aider.

– Vous laisser ainsi dans le besoin aurait été de plus cruel, répondis-je alors qu'on remonte la rue. Ce n'était pas possible, pour aucun d'entre nous.

Eomer sourit.

– C'est justement cela qui différencie les gens de valeur des autres.

Surprise, je m'arrête. Eomer me dévisage puis voyant ma surprise, il reprend.

– Les gens de valeur ne peuvent laisser des personnes dans le besoin, qu'ils soient grand roi ou simple enfant perdu.

Il pose alors sa main sur mon épaule puis me sourit à nouveau.

– C'est cela qui fait de vous une bonne personne, même si la plupart du temps vous vous cachez dans les ombres.

Je ris, il m'a bien cerné, mais déjà il doit retirer sa main.

– Je trouve cela fascinant, fait-il en observant sa main.

– Mais ce n'est pas simple à vivre au quotidien, avoué-je gênée.

– Je m'en doute bien, d'ailleurs vos exploits se sont propagés parmi le peuple et malheureusement certains vous craignent, ils y voient de la mauvaise magie.

– Ça j'en ai l'habitude...

– Je m'en excuse, c'est déplorable, mais faites attention à vous. Ne restez pas seule.

Je comprends la mise en garde, à nouveau il s'inquiète pour moi, c'est gentil. Je désigne alors Le Warg qui nous suit docilement sans broncher.

– J'ai un bon chien de garde, fis-je d'un ton aussi léger que possible.

– Aussi vigilant qu'original, rit Eomer.

Il m'assène une tape amicale dans le dos puis s'en va. Je le regarde remonter la rue puis je sens peser des regards sur moi. Je n'ai pas peur mais je sais que je dois rester prudente. Une foule en colère pourrait être un danger pour moi et la peur est une ennemie, elle me fait perdre mon contrôle. Je dois rester maître de moi-même, pour mon bien et le bien de tous.

– Dame Isil !

Je me retourne pour voir Erwin arriver aussi vite que sa blessure à la cheville lui permet.

– Un problème ? M'enquis-je surprise.

– Non, pas du tout, c'est le seigneur Aragorn qui m'envoie...

– Qu'est-ce que j'ai fait ?

Erwin me dévisage surpris puis hésitant.

– Rien, enfin je crois... Il m'a dit de vous rappeler de faire réparer votre équipement avant le départ de demain.

Je tique avant de me frapper le front.

– C'est ça que j'oubliais, fis-je atterré de moi-même. Il faut que j'aille à la forge.

– Je peux vous y conduire ! Et même porter vos affaires.

Je souris, amusée.

– Fait attention, je pourrais finir par te prendre comme écuyer.

Une lumière traverse le regard d'Erwin alors qu'un sourire béant étire ses lèvres.

– Ça serait trop bien ! Je pourrais vous suivre partout et vous observer pendant que vous m'apprendriez tous vos savoirs !

J'ai peut-être parlé un peu vite...

– Je... j'ai dit ça comme ça, repris-je hésitante. Mais pour commencer, je veux bien de l'aide pour porter mes affaires.

– D'accord mais je serai vous convaincre. Vous verrez, je vous deviendrai indispensable !

Je ris avant de lui ébouriffer les cheveux. J'aime vraiment ce petit bonhomme plein d'entrain.
On part vers le bastion tandis qu'il me conte tous les exploits qu'on pourrait faire ensemble. Je m'en amuse sans le contredire, il a déjà peut-être perdu ses parents alors autant le laisser rêver.
Je n'ose pas lui demander si il a quelqu'un pour s'occuper de lui, c'est une question délicate, mais je doute de pouvoir l'amener avec moi. Aller en Isengard représente un danger trop grand pour un enfant mais aurais-je la force de le laisser ici, tout seul ?
Je ne sais pas...
Je lui ai sauvé la vie, en suis-je pour autant responsable ?
Décidément sauver quelqu'un est un acte lourd de conséquence.
J'en ris tandis qu'on amène mes affaires aux forgerons où j'étais visiblement attendu. Aragorn prend vraiment soin de moi, il faudra que je pense à le remercier.
On répare mon armure cabossée, on recoud mes vêtements abîmés, on affûte mes lames mais je ne veux pas qu'on touche à mon casque. Malgré sa belle éraflure, je veux le garder tel quel. Je veux garder une trace en mémoire de Haldir qui m'a sauvé la vie en me donnant ce casque.
Il est comme moi, éraflé mais toujours là.


***


Elrohir et Elladan ne savaient pas quoi penser de ce qu'ils voyaient. Des arbres en mouvement et Isengard prit dans les flots.

– Allons-nous voir ? Demanda Elladan hésitant. Cela vaudrait peut-être le coup d'œil ?

– Je ne sais pas, répondit Elrohir. Ça nous ferait faire un détour mais...

Il se tut, adsorbé par les êtres végétaux qui arpentaient ce qui restait d'Isengard. La tentation était forte mais le temps pressait.

– Partons vers le Gouffre de Helm, reprit Elrohir en faisant pivoter sa monture. C'est la seule piste que nous aillons et nous devons rapidement remettre l'épée à Aragorn.

Elladan hocha la tête avant de regarder une dernière fois Isengard. Ils repartirent au pas afin d'économiser leurs montures. Ils n'avaient fait que quelques mètres lorsqu'un oiseau piqua vers eux pour venir heurter la poitrine d'Elrohir. Surprit, l'Elfe peina à récupérer l'oiseau sonné et fut surprit de voir un Crebain entre ses mains.

– Fée, souffla t'il en le reconnaissant.

– Anar surveille donc la région, fit Elladan qui avait suivi la scène.

Le Crebain croassa puis picora les doigts d'Elrohir avant de s'envoler vers Fangorn.

– Drôle d'oiseau, s'amusa Elladan. Mais j'y vois un signe encourageant.

– Moi aussi, Anar sait ce qui se passe... Hâtons nous, mon frère.

Elladan rit.

– Vous serez bientôt réuni, ne t'inquiète pas.

Elrohir rougit avant de balbutier.

– Je... Je ne sais pas comment elle va réagir...

– C'est difficile à dire, Isil est plutôt imprévisible, mais je suis certain qu'elle sera contente de te revoir.

Elrohir sourit.

– Je l'espère même si je crains la grande discutions que nous allons irrémédiablement avoir... Je ne lui en veux pas, et je sais aussi qu'elle a changée...

– Apaise-toi mon frère, elle a peut-être gagnée en sagesse et en contrôle mais elle reste elle-même.

Elrohir sourit avant de hocher la tête.

– Oui, elle reste Isil Uruitë, la Lune Ardente... et l'Elfe sensible qu'elle laisse parfois entrapercevoir.

– L'amour te va bien, rit Elladan.

Les joues d'Elrohir se teintèrent de rouge alors qu'il marmonnait des paroles incompréhensibles. Elladan en rit avant de talonner sa monture. Ils repartirent au trot, conscient de la longue route qui leur restait à faire.


Fin du chapitre
Isil se remet doucement tandis que la peur couve en certain et que le départ pour Isengard s'approche.
Les Hommes représentent-ils un nouveau danger pour Isil ? Et que va t'elle découvrir ou redécouvrir à Fangorn ?

Pendant ce temps, Elladan et Elrohir continuent leur route et se rapprochent doucement...




Tome 2 - La Lune Ardente de FangornOù les histoires vivent. Découvrez maintenant