La Pupille Ombrune De Peregrine Faucon

~VIII~

La grande lumière du soleil me tira hors de mon lit assez tôt. Je n'avais pas vraiment réussi à dormir cette nuit-là. Je pensais à ces petits instants que nous venions de passer avec les enfants, au fait que maintenant nous étions comme retenus dans une boucle et à l'idée que peut-être je le regretterai mais, qu'évidemment, il serait trop tard. Je repensai aussi à ce que Miss Peregrine m'avait dit avant de rejoindre les enfants dans le jardin. Ses mots se répétaient sans cesse dans ma tête comme si j'avais manqué un détail et que je le cherchais. Je revoyais aussi l'image de cet homme. Et s'il nous avait vraiment suivi ? Et si nous avions mis la vie de tous les enfants et celle de Miss Peregrine en danger ?

C'était principalement ça qui m'empêchait de fermer l'œil ; un sens de culpabilité qui me pesait avant même que quelque chose se passe. J'avais des mauvais pressentiments. Chose que toutes les ombrunes avaient ; le fait de trouver un négatif dans beaucoup de chose, être très alerte et surtout savoir les choses et les dangers en avance. Parfois, il aurait été mieux d'avancer dans l'innocence et d'affronter quand l'on ne s'y serait pas attendu.

Fatiguée par toutes ces pensées, j'étais rassurée que la nuit soit terminée. Ethan, lui, avait dormi paisiblement.

Je descendis à la cuisine et y trouvai Miss Peregrine. Elle ne se retourna même pas pour me voir qu'elle sut qui était là :
- Miss Blackswann, vous êtes déjà là ?
- Mmh. Mmh.
- Vous avez mal dormi ?
- J'ai beaucoup réfléchi à ce que vous m'avez dit hier et... et j'aimerais pouvoir faire tout mon possible pour éviter qu'un Sépulcreux vienne vous attaquer.

Elle cessa brusquement ce qu'elle était en train de faire et se tourna enfin :
- Ava, je comprends et je vous remercie. Cependant, je prends très au sérieux mon rôle d'Ombrune et je ne vous mettrai en rien face à un danger sans que vous n'ayez de l'expérience avant.
- Alors, apprenez-moi. Vous pouvez m'apprendre !

Mon enthousiasme s'accéléra :
- Je ne peux le faire maintenant. Pas sans l'accord du Conseil des Ombrunes. Il faut d'abord que je m'entretienne avec Miss Balbuzard. D'ailleurs, en parlant d'elle, elle nous rendra une brève visite de bonne heure.

J'hochai la tête. J'avais peur de ce que cette Ombrune pouvait dire sur moi :
- Je veux être là quand les choses tourneront mal.
- Qui vous dit que les choses tourneront mal ? Fit soudainement une voix derrière moi.

Je me retournai et vis Jacob. Miss Peregrine le regarda puis reprit à faire ce qu'elle avait laissé. Jacob s'avança :
- Miss Peregrine je ne comprends pas. Qu'est-ce qui pourrait se passer de mal ? Si le Sépulcreux les avait suivis, il serait déjà là ! Et puis, nous avons deux personnes en plus pour de l'aide ! Et je suis là ! Ce que je veux dire, c'est que nous avons réussi une fois, nous y arriverons encore.

Miss Peregrine posa sèchement le plat qu'elle avait en main, le brisant presque, et se retourna vers Jacob, le regard perçant et lui pointant dessus son doigt :
- Ne recommencez pas Monsieur Portman. Je ne veux pas risquer une fois de plus. Peut-être que cette fois rien ne se passera comme vous l'espérez. J'en ai d'ailleurs la sensation. Nous avons certes deux personnes de plus, mais elles ne savent encore rien sur les dangers que sont les Estres. Barron était certes un homme coriace, mais celui que nous nous apprêtons à affronter est encore pire !

Elle se tut et sortit de la cuisine. Nous la suivîmes jusqu'au salon. Là, elle sortit un gros livre d'une étagère et s'assit sur l'accotoir du canapé. D'un regard noir, nous comprîmes qu'il fallait que nous nous asseyions aussi.

Elle ouvrit le livre sur une photo de cinq personnes qui avaient toutes les yeux d'un blanc neige. Jacob indiqua du doigt l'un deux :
- Lui c'est Barron. Il m'a suivi dans la boucle jusqu'ici quand je suis venu au pensionnat. Il s'est même fait passer pour mon psychologue pendant deux semaines. C'était flippant. Il est arrivé ici. Je ne savais pas quoi faire et j'étais pris au piège. Il voulait prendre Miss P.
- Que font-ils avec les Ombrunes ? Demandai-je.
- Ils cherchent à les capturer et les retiennent pour des expérimentations et leur soif d'âmes. Mais personne ne sait exactement ce qu'ils leur font, car aucune Ombrune n'y est revenue vivante, répondit Miss Peregrine. Hélas, beaucoup d'Ombrunes ont disparues et grande est la quantité d'enfants qui se retrouvent menacés.
- Mais alors comment avez-vous fait à vous échapper ?
- Nous avons réussi à sauver Miss P en unissant nos forces, répondit Jacob. Ce n'était pas trop tard quand nous sommes arrivés et nous avons réussi à tuer Barron.