Chapitre 35 - Je te comprends

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Tout Homme a besoin d'un exutoire pour se vider l'esprit, oublier les soucis du quotidien qui rongent son âme comme une horde de termites le ferait sur une charpente en bois. Cela peut être à travers du bénévolat, de la peinture, de la randonné, du surf et j'en passe. Il y a autant de possibilité qu'il y a d'Homme sur Terre. Pour ma part, mon havre de paix se trouve dans la musique. Lorsque je chante ou joue de la guitare, j'oublie complètement ma différence. Le public aussi ne la perçois plus, je deviens tout à coup un garçon avec du talent que la foule acclame. Mais après ces nombreuses années rêvées à faire de la musique le point central de mon existence, je réalise que ce souhait est en train de me causer du tort. Mon exutoire se transforme en prison, il dresse des barreaux d'acier tout autour de moi. Je dois m'en échapper avant qu'il ne soit trop tard. Il faut que je saisisse la main d'Avianna pendant qu'il en est encore temps.

— C'est moi qui suis désolé, dis-je en entre-lassant ses doigts avec les miens. Être un bon musicien, avoir une belle voix, c'est tout ce que j'ai à offrir au monde. Je n'ai que ça comme qualité.

— C'est faux ! me réprimande-t-elle. Tu as bien plus que...

— S'il te plaît, la coupé-je. Laisse-moi terminer.

Elle hoche la tête, signe qu'elle me promet de ne pas intervenir au cours de mon monologue. Je dois tout lui dire maintenant, mettre les choses au clair avant que la situation ne m'échappe. Ce qui est peut-être déjà le cas d'ailleurs.

— Partager le devant de la scène avec toi c'était comme être au paradis, mais c'était aussi les enfers. Je faisais ce que j'aimais le plus au monde avec une fille pour laquelle j'ai des sentiments alors tu dois certainement te demander qu'est-ce qui n'allait pas, lui souris-je tristement.

Ma voix fragile l'alerte sur mon état d'esprit brinquebalant, elle se rapproche de moi jusqu'à ce que ses genoux se retrouvent sur les miens. Sentir sa présence me donne confiance, avec elle contre moi je pourrais tout réaliser, même les choses les plus impensables.

— Tu as un talent fou, repris-je légèrement plus serein. Tout le monde s'en est rendu compte quand on a fait notre duo. A tel point qu'on ne voyait plus le mien.

— Alors c'est pour ça que tu voulais une chanson chacun ?

Je n'arrive pas à le lui confirmer avec des mots, ils restent enfouis dans mon estomac où ils y dansent la java. Je commence à avoir mal au ventre.

— Shawn, tu aurais directement dû me le faire remarquer au restaurant. J'aurais compris.

— Compris quoi ? Que j'étais quelqu'un qui ne pensait qu'à lui ? rétorqué-je avec un certain sarcasme.

— Pas du tout. Tu l'as dit toi-même que tu ne pensais avoir que ça dans la vie et je viens te le prendre. C'est moi l'horrible personne dans l'histoire, constate-t-elle tristement.

Avianna est tout sauf ce qu'elle croit être. Son cœur est aussi beau que ses magnifiques cheveux roux, trop souvent rapportés aux images de sorcières tout droit sorties du folklore de nos ancêtres. Contrairement à ces créatures malveillantes, elle est l'incarnation même de la bonté. La patience qu'elle a eu envers le garçon difficile que je suis, les gestes affectifs qu'elle m'a accordé, les mots doux qu'elle a osé me susurrer, personne ne s'était jamais comporté comme cela avec moi. Peut-être a-t-elle eu un passé peu glorieux, mais qui suis-je pour juger ? Je n'ai pas été irréprochable ces dernières années.

Ses yeux encore humides et rouges témoignent du tort que je lui ai causé. Elle a raison, j'aurais dû lui avouer la vérité plutôt que de m'enfuir en courant comme un lâche. Cela lui aurait évité les larmes et moi, je ne me serais pas infligé du mal pour rien. Nous aurions gagné tellement de temps si j'étais parvenu à admettre mes sombres pensées.

A fleur de peau [SM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant