Soleil invaincu (2e partie)

Premier baiser (et plus si affinités)

CE CHAPITRE CONTIENT DU CONTENU SEXUEL EXPLICITE.

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Mi-novembre

Lorsque le générique du dernier épisode d'anime fait entendre son ultime note pop, lorsqu'ils finissent de le commenter en riant, le soir est déjà tombé depuis longtemps. L'hiver est aux portes de Séoul, où la température a baissé autour de dix degrés ; l'obscurité couvre la ville dès que l'après-midi arrive à son terme. 

Sung-ki a allumé la lampe et tiré les tentures dans le salon depuis un long moment ; il reste cependant des heures avant que ses amis de 21st June ne réintègrent l'appartement après une dure journée de labeur.

Une pensée de culpabilité effleure le danseur, mais elle ne s'attarde pas vraiment tandis qu'il se réajuste un peu contre Anders. Il a fait semblant d'être malade pour rester ; il a laissé Kyung-hwan, Woo-jae et Elian aller trimer sans lui — mais ils lui ont donné leur bénédiction et l'ont même aidé à mettre au point un stratagème afin de tromper Manager Kim pour la première fois de leur carrière. 

Et puis, comment regretter alors qu'il a l'occasion de passer ce jour volé, privilégié, avec son ami suédois, qui a traversé le globe pour lui rendre visite ? Non, il ne regrettera jamais cela, parce qu'une semaine, c'est si court qu'il faut étirer le temps entre le début et la fin. Il veut profiter de chaque instant où il est si heureux d'être avec Anders, où il se sent si bien.

Le hockeyeur s'est habitué à la skinship ou, du moins, n'a jamais repoussé les poignets de Sung-ki avant qu'ils ne se nouent autour de son cou. Le Sud-coréen est collé à lui sur le canapé comme il serait d'ordinaire collé à Kyung-hwan — jambes passées sur celles de l'autre jeune homme, bras sur l'épaule opposée et autour de son torse, menton confortablement posé sur l'autre épaule. 

Pourtant, ce n'est pas tout à fait pareil que lorsqu'il s'agit du mannequin. Cela le devient même de moins en moins au fur et à mesure qu'il côtoie le Suédois. Si le danseur recherche la chaleur et l'étreinte de son meilleur ami, si son attachement et son affection pour lui passent par un besoin de contact physique, il n'a jamais envie de toucher Kyung-hwan comme il a envie de toucher Anders de façon de plus en plus irrépressible.

Le hockeyeur ne bouge pas, alors qu'il a passé un bras timide autour de Sung-ki, cramponné à lui. Régulièrement, il s'oblige à se rappeler que le comportement tactile de l'autre jeune homme, sa façon d'agir avec lui, n'ont rien d'ambigu en Corée du Sud ; il ne doit pas y mettre son point de vue d'occidental. Alors, il profite lui aussi de ce contact, même s'il se sent honteux, parfois, de glisser dans ses propres gestes un peu plus que de l'affection et de la tendresse amicales. Mais être ici avec Sung-ki, serré contre lui, est bien suffisant, et Anders n'exigera rien de plus.

Depuis la fin du mois d'août et leurs retrouvailles en chair et en os en Europe, Sung-ki a quant à lui compris qu'il était amoureux d'Anders. La distance qui les sépare habituellement — l'immensité de deux continents — donne à ces sentiments la forme d'une envie un peu abstraite, d'une pièce qui manque quelque part et à laquelle il aspire, presque d'une sorte de nostalgie tournée vers le futur — il ne sait pas comment mieux les qualifier qu'avec ces mots qui ne veulent rien dire et qui sont pourtant les seuls qui lui viennent à l'esprit. Mais aujourd'hui, le Suédois est à côté de lui.

Sung-ki sourit dans le tissu qui couvre l'épaule d'Anders tout en inspirant son odeur, une odeur fleurie de lessive et de parfum, un mélange qu'il n'a senti nulle part ailleurs et qui est donc gravé dans sa mémoire olfactive comme étant tout à Anders. Il lui associe ces senteurs de lavande — il lui a demandé, à Paris, de quoi il s'agissait —, qui le ramènent également aux photos du hockeyeur adolescent au milieu des champs mauves de Provence. C'est l'un des premiers souvenirs de leurs premières conversations par e-mails interposés ; la lavande est pour lui liée au Suédois comme le blé l'est au petit prince pour le renard. Il espère qu'il verra un jour Anders au milieu de ces champs pour de vrai.