Lettre 4

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Cher papa...

Oui, c'est vraiment arrivé. Oui cet homme a vraiment posé ses mains sur moi, il m'a déshabillé et m'a pénétré... Le moment était horrible a vivre, je me suis sentie mourir.

Et tu veux savoir ce qui est encore pire que le viol ? C'est ce qui a suivi... On ne se rend pas compte à quel point sa détruit une personne, je suis mal papa, tellement mal. Je ne me reconnais plus. J'ai l'impression de voir ma vie défiler devant mes yeux sans même pouvoir la contrôler.

Je n'arrive pas à faire le point sur rien, mon cœur est en un milliard de morceaux et je ne sais pas comment le réparer. Comment on est censé faire quand ce genre de choses arrive ? Pourquoi est-ce que rien ne nous y prépare ? Pourtant dans la vie on nous prépare à tellement de choses...

Malheureusement celle-là n'en fait pas partie...

Dimanche 3 août.

Allongé dans le grand lit de l'hôtel je fixe le plafond sans bouger depuis des heures. Depuis que je me suis couché en réalité. Mes larmes ne coulent plus et je ne ressens plus rien. J'ai l'impression d'être désactivé, comme si la seule chose que je suis capable de faire c'était rester dans ce lit avec le regard vide.

Tout me semble plus fade, la vie me semble fade. Dans les films que j'ai vus et les livres que j'ai lus quand les filles ou garçons subissent ce genre de traumatisme alors il y a toujours cette personne qui arrive. Elle sort de nulle part et le personnage principal tombe follement amoureux et tout est bien qui finit bien.

C'est plutôt loin de la réalité. Dans la vraie vie, celle où rien n'est juste, les miracles sont trop rares. Il peut y en avoir mais, je commence à me demander si ce n'est pas une simple légende... Je ne rencontrerai pas un beau garçon détruit par son passé autant que je suis détruite par mon présent. On ne tombera pas amoureux et on ne sera pas heureux. Rien ne finira bien...

Je sursaute d'un seul coup quand j'entends des coups donnés contre la porte de la chambre. Je sens mon rythme cardiaque s'accélérer d'un seul coup et je ne sais absolument pas ce que je suis censé faire, tous mes moyens sont aux ralentis et je ne réagis pas.

Je me lève finalement et avec le peu de forces que j'arrive à réunir je vais ouvrir ma porte. A peine ouverte je tombe sur ma meilleure amie qui me regarde avec un immense sourire sur les lèvres et des yeux pétillants.

- Davi ! J'ai passé la meilleure soirée de ma vie.

A peine ses mots prononcés que je sens une bille remonter dans ma gorge, je serre la mâchoire. Non, non je ne peux rien dire. Et puis si j'ouvre la bouché je sais que je vais m'effondrée, je ne peux pas.

- Ça va ? Tu fais une drôle de tête.

- Pardon... Je me sens pas très bien.

- Ho... tu me laisses passer ?

Je met quelques secondes à réagir et quand enfin mon corps semble vouloir fonctionner je me décale pour la laisser entrer.

Toujours d'aussi bonne humeur elle entre dans la pièce en souriant et s'installe sur mon lit.

- Alors... Hier soir j'ai rencontré ce fameux acteur, tu sais celui qui joue dans cette série que j'adore ?

- Hmhm.

- J'ai pu discuter avec lui et... il m'a laissé le numéro de son agent en me disant de le contacter pour des castings et tout ça.

- Hmhm.

- Et je vais jouer dans un film porno...

- Hmhm.

- Davina mais y t'arrives quoi ?!

Je relève la tête vers elle et la fixe, je ne sais pas quoi dire, ni quoi faire. Qu'est-ce que je suis censée faire ? Dire à ma meilleure amie qu'un homme a volé ma virginité ? Qu'il m'a volé ma joie de vivre par la même occasion ? Non... je ne peux pas lui dire. Elle serait anéanti de savoir ça... Dans tout les cas, moi je le suis déjà. Un peu plus ou un peu moins...

- Rien, je t'ai dit je me sens pas très bien.

- Tu crois vraiment que je te connais pas ? Dis-moi.

Je fixe ses yeux bleus et retiens comme je peux la douleur qui monte le long de ma colonne vertébrale pour finir en larmes dans les yeux. Il ne faut pas qu'elle le voit, impossible.

Je force un sourire comme je peux. Je n'ai jamais su mentir et encore moins à Freya, avec la situation actuelle je me sens encore moins capable de le faire.

- Non vraiment, hier quand je suis rentrée j'étais malade et ça va pas beaucoup mieux.

Elle me regarde avec son scanner à la place des yeux et je serre mon poing pour me retenir de pleurer. Plus mon poing je serre mon poing, plus je peux sentir mes ongles rentrer dans la peau de la paume de ma main.

La douleur que me procure mes ongles chasse un peu de la douleur qu'il y a dans mon être. C'est faible mais suffisant pour que je puisse convaincre Freya, c'est faible mais sa me permet d'avoir une bonne raison de souffrir. Une raison d'avoir mal, physiquement.

- Bon, et si on allait en ville ?

- Freya... Sa te dérange si je rentre en taxi ?

- Non... prends soin de toi et fais attention. Et tu m'envoies un message dès que tu es chez toi.

- Oui.

Elle me prend dans ses bras et je profite de cet instant pour me rappeler que je ne suis pas seule, j'ai Freya et elle prend soin de moi. J'aimerai tellement pouvoir lui rendre mais je n'y arrive pas, je ne sais pas comment faire.

Après qu'elle ne soit sorti de la chambre, j'ai soufflé un grand coup. C'est dur de lui mentir mais, dire la vérité ? Je ne sais même pas comment je dois le faire. Comment on fait pour annoncer ça ? Comment on fait pour réussir à le dire, sans avoir l'impression de mourir...

Mourir... Pourquoi est-ce que je ne le suis pas ? Pourquoi est-ce que je suis encore vivante avec cette douleur qui ne me quitte plus depuis hier soir ? Pourquoi est-ce que je me repasse en boucle les images de cet soirée ?...

Cher papa //TERMINE// Où les histoires vivent. Découvrez maintenant